Aujourd’hui, on attaque la seconde étape de grosses dunes. Je pars seul jusqu’au premier checkpoint. La piste sablonneuse est difficile, il y a énormément de vent et on n’y voit pas grand-chose. Quand j’atteins le premier checkpoint, j’apprends que l’organisation a décidé de stopper temporairement l’étape par sécurité. Après une heure d’attente, on nous annonce que la boucle dans les dunes est annulée et qu’il faut rejoindre le prochain bivouac. Beaucoup de participants sont déçus. Moi, pour être honnête, je suis un peu rassuré, j’ai déjà eu mon lot d’émotions sur ce raid. Du coup, je repars directement jusqu’à Zagora par une jolie piste et j’arrive tôt et pas trop cassé à l’hôtel. Ça fait du bien, parce que mine de rien, après huit jours, la fatigue commence à se faire sentir.
Dans le désert, il ne pleut quasiment jamais. Sauf aujourd’hui, bien entendu, pour la première fois de l’année ! Oui, vous avez bien lu, il pleut ici à Zagora, aux portes du désert.
Hier soir, trop occupé à discuter avec une jolie nana, j’oublie d’aller faire le plein. Du coup, ce matin, c’est finalment en dernier, avec 45 minutes de retard que je peux repartir, après avoir galéré pour trouver une station d’essence qui fonctionnait, alors qu’il y avait une panne d’électricité dans la ville.
Il pleut fort et je ne vois rien du tout à travers mon masque. La piste est détrempée, il y a plein de cailloux glissants, je n’ose pas aller trop vite... Soudain, bam ! Sur un tronçon de terre, je glisse et me retrouve à terre. Plus de peur de que mal, mais je suis plein de boue de la tête aux pieds. Je n’arrive plus à nettoyer mon masque en roulant avec mes gants pleins de boue et je suis obligé de l’enlever pour y voir quelque chose et me fait fouetter la gueule par les gouttes de pluies... J’ai froid, je suis trempé, je me sens assez misérable.
Au premier checkpoint, je croise Luc, un jeune enduriste français avec qui je partage ma chambre d’hôtel. On mange 2-3 merguez à l’abris d’une tente préparées par les gens du premier cehckpoint avant de partir pour le deuxième. Comme Luc voulait essayer ma moto, on se les échange et je continue la route avec sa vieille Honda XR400. C’est l’opposé absolu de ma KTM Rallye. Elle est basse, légère, les suspensions sont molles, la selle est tellement confortable qu’on a envie de rouler assis tout le temps et ce petit moulin à air est tout à fait génial pour moi.
Il arrête enfin de pleuvoir et je continue tranquillement mon bout de chemin au guidon de cette petite moto avec laquelle je prends énormément de plaisir, plus qu’avec ma Rallye tellement elle est souple et facile à emmener. Une moto conçue pour gagner le Dakar n’est pas forcément la plus adaptée aux mains de monsieur tout-le-monde, mais ça j’en étais conscient en l’achetant... En fin de journée, quand je revois Luc, il est aux anges. Lui qui fait du motocross depuis son plus jeune âge me dit qu’il s’est régalé comme jamais au guidon de ma KTM.
A l’heure du briefing, Yves, le boss du Raid Passion Désert nous annonce que les intempéries ont coupé tout accès entre Ouarzazate et Marrakech et que l’étape de demain devra probablement être annulée. Plusieurs 4x4 ont été envoyés en reconnaissance pendant la nuit et nous aurons plus d’informations demain matin, mais très certainement on devra passer par Agadir.
Les nouvelles ne sont pas bonnes, la route étant toujours coupée, nous sommes obligés de passer par Agadir, c’est-à-dire 630km de route !
Il fait beau, la première partie jusqu’à Agadir est charmante avec plusieurs jolis cols. On s’arrête pour un bon repas de midi avec tous les autres Suisses avant de continuer la route pour rejoindre Marrakech en fin d’après-midi. Le camion qui transporte nos affaires n’arrive qu’en début de soirée, on est condamné à rester dans nos tenues de power rangers.
Pour cette dernière soirée, une remise des prix a lieu, par catégorie et par groupe. Ceux qui le désiraient pouvaient prendre part au classement au moyen d’un transpondeur qui est récupéré chaque soir par l’organisation. Le meilleur est celui qui a le kilométrage le plus proche de la trace originale. Le concept est bien pensé, mais la précision du transpondeur donne des résultats qui sont parfois bizarres. Certains jours, alors qu’on a toujours roulé ensemble et exactement le même tracé, il y avait de gros écarts dans notre team au classement. Le team suisse termine en deuxième position, malgré mes pénalités pour la journée que je n’ai pas terminée, et Chris et Werni reçoivent chacun un prix.
Un buffet apéro suit la remise des prix avant qu’on se mette à table et qu’on termine la soirée avec des petits shots de vodka sur le parking de l’hôtel.
Le Raid Passion Désert offre tout ce qu’un amateur pourrait rêver d’un rallye, sans le côté compétition et pour un budget abordable. Mais surtout, il y règne une ambiance vraiment chaleureuse et décontractée. Nombreux sont ceux qui reviennent chaque année et je comprends pourquoi.
Malgré une situation de dernière minute nécessitant la modification des deux premières journée, l’annulation d’une partie de la huitième journée pour cause de tempête et de la dernière étape pour cause d’inondation, je suis totalement satisfait de mon raid. Dix jours, c’est vraiment beaucoup. Du coup, qu’on ait perdu la dernière journée à faire de la route ne m’a pas plus dérangé que ça.