Yamaha a convié la presse internationale sur le circuit de Jerez, dans le sud de l’Espagne. Tortueux à souhait, mais présentant deux belles lignes droites, il est la scène des étapes disputées des championnats WBSK et MotoGP.
Parmi les invités d’honneur présents lors de la présentation presse des Yamaha R1 et R1M, on compte Michael van der Mark et Alex Lowes, tous deux pilotes WSBK. D’ailleurs, on a eu la chance de quelques photos en piste à leurs côtés.
Le but de notre déplacement à Jerez est bel et bien la possibilité de tester les nouvelles R1. Une puissance identique tout en assurant la norme Euro5, des améliorations techniques comme technologiques, il est vrai qu’il y a de quoi avoir l’eau à la bouche.
Une dizaine de R1 nous attendent, couvertures chauffantes posées, devant un box aux couleurs Yamaha. La matinée est réservée à la nouvelle R1, l’après-midi à la version M, plus radicale, plus exclusive. La première est équipée de pneus Bridgestone hypersport, à savoir les R11, la deuxième de slicks, les nouveaux Bridgestone V02. C’est ainsi que nous profiterons de performances croissantes tout au long de la journée.
Hormis une visite en 2015 dans le cadre du WSBK, je ne m’étais jamais rendu à Jerez, encore moins en tant que pilote. Les sessions du matin me permettent ainsi de découvrir le tracé. Pas mal de virages, une vitesse moyenne assez élevée, deux lignes droites de longueur moyenne, une seule trajectoire possible sur l’ensemble du tracé, c’est ainsi que je résume ma maigre expérience sur ce circuit.
Je m’attaque alors à la R1, le modèle standard. Dès les premiers tours de roue, j’apprécie les gommes Bridgestone R11. Une mise sur l’angle aussi progressive que précise, elles scient parfaitement à la moto. Je serais curieux de les comparer à des Pirelli Supercorsa, références en matière de vivacité, histoire de voir si la moto aurait eu un comportement fondamentalement différent.
Les virages s’enchaînent, les tours s’accumulent et j’assimile le tracé tortueux de Jerez, tout en prenant mes repères. La moto est docile et se laisse malmener tout en laissant place à une certaine improvisation. Elle ne rechigne pas devant mes erreurs d’appréciation et accepte in extremis des corrections de trajectoire. Le châssis est rigide, de même que la suspension est en adéquation avec les performances de la moto. Strictement d’origine, elle permet déjà d’assouvir les pilotes ayant un excellent niveau de pilotage.
A ceux qui se demandent si le moteur semble castré par la norme Euro5, réjouissez-vous ! Le quatre-cylindres CP4 n’a rien perdu de sa fougue, même avec sa ligne d’échappement d’origine. Les valeurs de puissance et de couple restent inchangées par rapport au millésime 2019, soit 200cv à 13’500tr/min et 112Nm à 11’500tr/min. En piste, cela se confirme. Il tracte sur toute la plage de régime, et particulièrement au-delà de 8’000tr/min. Caché derrière la bulle, protégeant parfaitement ceci dit en passant, je jette un oeil au tachymètre qui s’affole. La barre des 200km/h est franchie à plusieurs reprises sans que mes cervicales en souffrent.
En parlant de moteur, Yamaha propose trois niveaux de frein-moteur. Une aubaine ! En mode standard, le frein-moteur est assez important. Après quelques tours de circuit, je switche sur le niveau moyen, plus adapté à la plupart des virages. Ainsi, je garde plus de vitesse dans les longues courbes, au détriment des virages plus serrés où justement un niveau de frein-moteur plus élevé aidait la moto à virer.
Plus haut, j’évoquais un nouveau système de commande des gaz ride-by-wire. Très sensible, la commande des gaz réagit avec une extrême précision. Je suis d’ailleurs même surpris, il n’y a quasiment pas de jeu… la moindre rotation de la poignée se traduit par l’ouverture des papillons de gaz. Un peu surprenant, mais c’est une question d’habitude, diront certains.
Avec une telle cavalerie, le système de freinage doit être à un niveau de performance élevé. Yamaha a admis à demi-mot que les freins de la R1 jusqu’au millésime 2019 n’étaient pas exempts de critiques. Alors que la concurrence adopte les étriers Brembo de dernière génération, modèle Stylema, Yamaha propose un ensemble de marque ADVICS et se contente de plaquettes de frein à coefficient de friction plus élevé. Le résultat est plutôt concluant ! Une bonne attaque et une belle progressivité pour offrir un parfait dosage, c’est clairement mieux que ce que j’avais connu auparavant. Seulement, je peste contre l’ABS. Le mode 1 ne tient pas compte de l’inclinaison de la moto et se montre trop intrusif lors de gros freinage ; le mode 2, qui lui est actif en virage, ne permet pas un freinage digne de ce nom lorsque la moto est sur l’angle, ce qui est très fréquent sur circuit. La sécurité sur route a donc été privilégiée… Quant aux pilotes de haut niveau utilisant leur moto autant sur route que sur circuit, ils espéraient la déconnexion de l’ABS, ce qui n’est pas possible. Damn !
Au fur et à mesure que les tours défilent, je m’acclimate tant au circuit qu’à la moto. Je retarde mes freinages, j’accélère plus tôt. La fourche encaisse les gros freinages tout en gardant un bon niveau de précision. L’amortisseur se contente d’absorber le déferlement de puissance. L’électronique se charge du reste. La traction est assurée, de même qu’une certaine glisse est autorisée. L’accélération est optimale. La roue avant se déleste et quitte à peine le sol. Avec le quickshifter up/down, les rapports passent instantanément et sans accrochage. La centrale inertielle se charge de coordonner les actions des différentes technologies embarquées. Toutes les interventions électroniques se font en douceur, sans à-coup.
Les phases de freinage sont de la même veine. L’attaque des freins est franche. La fourche offre au train avant une précision redoutable, pour peu que l'ABS ne s'active pas. La roue arrière effleure le sol. La moto reste parfaitement en ligne, contrôlable à tout instant.
En virage, plus particulièrement dans les longues courbes, la R1 se caractérise par sa stabilité. Imperturbable, elle est rivée au sol comme sur un rail. Dans les changements d’angle, elle n’est pas la plus vive de la catégorie. Elle se laisse toutefois transbahuter sans effort ni moment de flou.