
Vous avez bien lu, le V4 1’078cc à 65°, découvert il y a quelques mois au coeur de la Tuono, équipe dorénavant la RSV4 Factory. L’alésage passant de 78 à 81mm, le V4 gagne en couple et en puissance. Poussé à l’extrême, il développe maintenant 122Nm à 11’000tr/min et 217cv à 13’200tr/min… Mais les nouveautés ne s’arrêtent pas à cela, loin de là. Aprilia a mis les bouchées doubles pour tenir la dragée à la concurrence.
Esthétiquement, les nouveautés sont peu nombreuses. Il faut dire qu’elle a bien de la gueule, dans ce coloris noir mat. On notera l’apparition de winglets sur les flancs du carénage, augmentant l’appui (aérodynamique) sur le train avant, aidant ainsi à diriger la moto en entrant de courbe et améliorant la stabilité à haute vitesse. A cela s’ajoute, en option, des canaux d’entrée d’air en carbone similaires à ceux utilisés par Aprilia sur sa RS-GP pour optimiser le refroidissement des freins. Autrement, Aprilia ne précise pas les éventuelles évolutions esthétiques… et nous ne nous sommes pas amusés au jeu des sept erreurs. Il y avait mieux à faire.
Penchons-nous sur les détails techniques :
Bref, vous l’avez lu, la RSV4 1100 Factory met la barre très haut, tant technologiquement qu’au niveau des performances.
Le Mugello ! Aaah, qui n’a jamais rêvé d’y poser les gommes de sa moto ! J’en fais partie. Le Mugello est l’un de ces circuits très appréciés. Très roulant et rapide, il n’en est pas moins physique avec les nombreux changements d’angle qu’il impose.
Malheureusement, le team Aprilia nous informe que nous n’aurons droit qu’à quatre sessions de 15 minutes.
Les RSV4 sont alignées dans les box. Les couvertures chauffantes sont installées depuis près d’une heure. Prêtes au départ, elles n’attendent qu’une chose, qu’on les chevauche. Mais avant, un rapide coup d’oeil sur l’écran de bord est nécessaire pour vérifier le calibrage des différentes aides à la conduite. Un coup de démarreur plus tard et le V4 démarre dans un fracas typique d’une MotoGP. Déchicané, l’échappement Akrapovic crache ses vocalises sans retenue. C’est racing, même plus qu’il n’en faudrait pour être dans l’ambiance.Le moteur ronronne, je saisis l’embrayage qui ne demande pas une grande pression et le premier rapport se verrouille avec douceur.
Je quitte la pit-lane sur le deuxième rapport et ouvre en grand. La roue avant lève à peine, parfaitement contrôlée par l’anti-wheelie dont l’action ne se fait même pas remarquer… si ce n’est que par le résultat. Ne connaissant absolument pas le circuit, hormis par le biais de quelques vidéos on-board regardées précédemment. Je le découvre tour après tour. Mais je découvre aussi la RSV4. Facile et d’un comportement très neutre, elle se laisse balancer de gauche à droite et de droite à gauche sans broncher. Surtout, elle pardonne mes trajectoires parfois approximatives que je rectifie brusquement. Je prends rapidement confiance en la moto, je la sens vraiment bien.
Les tours défilent, le rythme augmente à mesure que la confiance s’installe. Je freine toujours plus tard et je me surprends même à freiner sur l’angle. Le train avant est soudé à l’asphalte et est redoutable de précision. Je peux arriver complètement à la ramasse dans un virage, en survitesse et quelque peu stressé (oui, au Mugello, on roule très vite, même en courbe), la roue avant ne bronche pas quand je lui inflige un gros freinage. En parlant de freinage, le nouvel équipement Brembo, modèle Stylema, est bluffant d’efficacité. A peine que j’effleure les freins, le mordant ne se fait pas attendre. Et si je tire encore, ça plante littéralement. Couplé à la stabilité du train avant, je vous assure que les phases de freinage sont aussi efficaces que parfaitement maîtrisées. Je dois avouer que je n’avais encore jamais testé de motos dont le freinage était aussi remarquable !
Quant à la fourche Öhlins NIX, que ce soit au freinage en bout de ligne droite, avec un asphalte bosselé, ou en virage, elle assure son rôle stabilisateur. Toutefois, en sortie de courbe, à la réaccélération, alors que je suis encore sur l’angle, ou juste après le freinage, au moment où je lance la moto à la corde, je reproche un léger guidonnage. Quand bien même l’Aprilia est dotée d’un amortisseur de direction, il y a toujours un léger flou. On m’expliquera plus tard qu’il s’agit de l’effet d’inertie provoqué par la largeur de l’axe de roue avant plus étroit que la norme. Dans tous les cas, ce n’est pas un comportement rédhibitoire et je vis bien avec, puisque la moto le gère sans me mettre en danger. Comme toute Italienne qui se respecte, c’est un défaut qui rend la moto vivante et attachante… Ça ne vous plairait pas, vous, un léger louvoiement en entrée de courbe à 180km/h ?
Ceci dit en passant, un collègue a procédé à quelques réglages de la fourche et de l’amortisseur, ce qui a eu pour effet de diminuer ce guidonnage, sans l’annuler pour autant.
S’il y a bien un coup de coeur à évoquer, c’est le moteur. Mon coeur tape fort à l’instant où j’écris. Le V4 se caractérise par sa force à tous les régimes. Il tabasse, c’est bien le terme, de bas en haut du compte-tours. Pas un creux à l’accélération, il est d’une souplesse impressionnante. D’ailleurs, je pourrais faire tout un tour sur le 4e rapport, hormis sur la ligne droite, sans que j’aie à me soucier d’un vrai manque de relance. A une autre échelle de performances, ça me rappelle le trois-cylindres 675 de la Triumph Daytona.
Et quel son ! Je me croirais au guidon d’une MotoGP. Il tambourine dans des vocalises sourdes pour hurler avec caractère haut dans les tours. C’est puissant. J’adore !
Les quelque soixante minutes d’essai, réparties en quatre sessions, m’ont permis de découvrir cette nouvelle RSV4... sans en faire le tour. J’en retiens sa facilité à toute épreuve, sa stabilité à haute vitesse et au freinage, de même qu’en entrée de courbe, sa vélocité pour le moins expressive, son freinage ultra puissant et dosable du bout des doigts. Et en guise de conclusion, je dirai que c’est une sportive très attachante… et hautement efficace !
Je serais curieux de l’essayer sur route de sorte à juger de l’ergonomie et du confort relatif qu’elle offre dans le cadre d’une utilisation civilisée. Si vous en avez l’occasion, n’hésitez pas à nous donner un retour !