C’est le seul tracé qui est « nouveau » pour moi, puisque l’année passée, suite au décès tragique d’un des concurrents le second jour, nous n’avons pas roulé le 3ème jour.
Le début est un pur plaisir. C’est un lac asséché et le sol est dur et plat sur plusieurs kilomètres. On peut rouler ici les gaz à fond sans prendre de gros risques. A 140km/h, ma moto avait encore de la réserve, mais moi j’aurais eu besoin d’un caleçon de rechange si j’accélérais encore !
La navigation est également difficile aujourd’hui. A plusieurs reprises, je me perds et je retourne en arrière pour trouver le bon chemin. J’ai aussi droit à ma première grosse gamelle, un vol plané par-dessus le guidon et je me fais mal à la cuisse. Heureusement, la moto n’a rien...
Je fais un bout de route avec un autre motard perdu et au moment où l’on est en train de discuter si on devrait tourner à droite ou à gauche, on voit le drapeau d’un check-point secret caché derrière des arbres à quelques centaines de mètres ! Quelle chance ! Il faut savoir que tout check-point manqué représente 2 heures de pénalité et les check-points secrets 4 heures ! Rien ne sert d’aller vite, si on manque un check-point, le retard qu’on accumule est rapidement colossal.
De retour au bivouac, je réalise que j’ai perdu 2 vis qui tiennent la couronne arrière et que les 4 écrous restant sont à moitié desserrés! Les trous sont devenus ovales, ce n’est pas bon du tout ! Mon compatriote Herbert, qui roule avec l’ex-KTM Rallye Replica de Cottet (Pilote Suisse, Dakar 2013) me dépanne et je resserre tout à fond, avec une dose généreuse de Loctite. Ma jambe me fait de plus en plus mal et je n’arrive presque plus à marcher.
Janne me file des antidouleurs pour pouvoir dormir.
Ce matin je n’ai presque plus mal à ma jambe, mais je prends quand même des antidouleurs au cas où. L’organisateur a décidé de doubler la longueur de l’étape pour les motos. Donc 2 tours pour nous, les amateurs et 4 tours pour les pros!
Ça commence pas très bien pour moi. A peine quelques centaines de mètres après le départ, je bute dans quelque chose que je croyais être du sable mou, mais qui était dur. Un petit vol plané par-dessus le guidon et une fois sur mes pieds je réalise que ma moto pisse l’essence ! Le raccord du réservoir arrière gauche a cassé net ! Je peux juste le regarder se vider, et paf, 5 litres de moins…
Si au départ il y a quelques pistes rapides bien sympas, ça passe vite à des kilomètres et des kilomètres d’herbe à chameau, le cauchemar de tous les participants. Pour les voitures, c’est mortel pour les amortisseurs et pour les motards c’est extrêmement fatiguant. L’herbe à chameau, ce sont des milliers de monticules de terre dure avec un peu d’herbe. Il faut donc se faire sa trace et zigzaguer entre deux…
Je me retrouve la plus grande partie du temps en 1ère ou 2ème vitesse et j’avance très lentement. A la fin du premier tour, on passe sur les dunes les plus hautes du Rallye et ça se passe plutôt bien. Je termine le 1er tour en presque 4 heures (A titre de comparaison, le gagnant des pros à fait 6h35 pour 4 tours !) et je tombe sur mon coéquipier Janne, qui est arrivé un peu avant moi et qui décide de ne pas se lancer dans le second tour. Avec sa 950 c’est déjà un exploit qu’il ait réussi à terminer le premier !
Je n’ai plus d’essence et nos gars sont déjà partis… Heureusement, je peux compter sur un autre team finlandais que je connais de l’année passée et qui me dépanne avec 12 litres. Lorsque je me lance dans le second tour, tout va beaucoup mieux pour moi. Je ne suis plus fatigué, j’ai un bon rythme jusqu’au CP1. M’apprêtant à repartir, je réalise avec horreur que la couronne arrière ne tient plus qu’avec 2 vis. C’était une question de 2-3 kilomètres avant que j’aie un très gros problème. Ma première réaction c’est d’abandonner, pour ne pas casser la jante, mais les gars du CP1 me disent que je peux essayer d’aller jusqu’au CP2 par la voie de service.
Les 2 heures de pénalité en moins si j’atteins ce point me motive. Je resserre les vis, et tous les 1-2 km, je m’arrête pour resserrer les écrous.
Depuis le CP2, je peux prendre la route jusqu’à l’arrivée, ça me fera encore 2 heures de pénalité en moins… Je parcours les 16km à 30km/h, en m’arrêtant tous les 2-3km pour contrôler et resserrer les boulons. J’atteins l’arrivée. Malgré mon problème, je suis très content, ça devrait me donner une bonne avance sur tous les concurrents qui ont arrêté après le premier tour.
De retour au bivouac, pas une seconde à perdre, je dois réparer ça. Je trouve un gars qui veut bien me vendre une nouvelle couronne pour 100 euro et je fais la connaissance de Patsy Quick, mécanicienne de Desert Rose Racing qui me fournit les boulons et vis pour la couronne. Pour la petite histoire, Pasty est la première femme britannique à avoir terminé le Dakar en 2006, lors de sa troisième tentative.
Après avoir réparé la roue, il me faut encore faire une vidange, et nettoyer le filtre à air, remplacer le raccord cassé du réservoir. Je vais manger en vitesse à 21h avant de terminer mes travaux. Finalement à 23h, quand je peux enfin aller voir les résultats c’est la grosse déception. Je suis en 22ème position derrière plusieurs concurrents qui n’ont fait que le premier tour. J’apprendrai par la suite la raison : en abandonnant, on ne reçoit des pénalités que pour les CP officiel manqués. Si l’on va jusqu’à au CP final on reçoit les pénalités des CP secrets qu’on n’a pas visités. Du coup, j’aurais mieux fait de m’arrêter après le premier tour…