Un modèle unique, qui ne partage rien avec la gamme Kawasaki. La Ninja H2 est la représentation-même de l'exclusivité. En consultant son dossier de presse très étoffée, on découvre la moto, ses composants, la raison de l'emploi de certains matériaux, les détails techniques... La Ninja H2 fascine avant même que l'on prenne place sur sa selle. Attardons-nous tout d'abord sur le coeur de la bête, son quatre-cylindres en ligne délivrant la bagatelle de 210cv avec RAM Air (air forcé) à 11'000tr/min. Jusque-là, rien d'extravagant, les Kawasaki ZX-10R et la ZZR 1400 en font autant. Ce qui retient toute l'attention, c'est bien son compresseur ! En effet, le 998cc est suralimenté par un compresseur entraîné par une chaîne, et c'est ce qui promet toute la différence. Le compresseur a été choisi pour la simple raison qu'il est beaucoup plus compact et plus léger qu'un turbo ; en effet, nul besoin d'un intercooler (système de refroidissement) ni de conduits de redirection des gaz d'échappement. Aussi, développé exclusivement par Kawasaki pour la Ninja H2, le compresseur assure un surcroît de couple dès les plus bas régimes (ce que ne permet pas un turbo) et augmente la puissance à haut régime. Sa vitesse de rotation maximale atteint 130'000tr/min et comprime l'air jusqu'à 2.4 bars (pour la H2R). Pour accepter un pareil niveau de pression, la boîte à air est conçue en aluminium renforcé et abrite seuls les injecteurs et les cornets d'admission. Le filtre à air, lui, prend place en amont du compresseur.
Sans entrer dans les détails techniques de la mécanique, on remarque déjà que la Ninja H2 n'a rien de la conception d'une moto conventionnelle et est incomparable à ses deux soeurs ZX-10R et ZZR 1400. Pour faire bref, quand on ouvre en grand la poignée de gaz de la Ninja H2, la réponse du moteur est immédiate et le couple est disponible sans délai. Quant à l'accélération... on vous laisse lire les lignes qui suivent.
Pour palier aux performances du moteur, Kawasaki a équipé sa Ninja H2 de freins surpuissants. Brembo a été désigné, sans hésitation et à juste titre. On retrouve deux immenses disques de 330mm de diamètre enserrés par les très efficaces étriers radiaux monoblocs M50. Aussi, rareté sur les machines japonaises, les freins sont complétés par des durites de type aviation, gage d'endurance et de constance en usage intensif. A l'arrière, on se contente d'un simple disque de 250mm et un étrier à deux pistons.
Côté partie-cycle, le fabricant de suspensions Kayaba (KYB) profite de l'exclusive Kawasaki pour lancer son nouveau modèle, la fourche AOS II racing. Celle-ci est basée sur les modèles à cartouche séparée air-huile des motos de cross. Les tubes de 43mm de diamètre de couleur noire se règlent en compression, en précharge et en détente, directement depuis le haut.
L'amortisseur arrière est fixé au système Unitrack et bénéficie des mêmes possibilités de réglages. Du beau matériel, assurément, bien que l'on s'étonne que Kawasaki ait fait l'impasse sur l'incontournable fabricant suédois (ndlr : Öhlins).
Toutefois, l'amortisseur de direction est badgé Öhlins et se distingue par sa faculté à interagir avec l'unité centrale en s'ajustant automatiquement en fonction de la vitesse de la moto.
Et finalement, l'électronique est à la hauteur des ambitions de la mécanique. En quelques lignes, listons la dotation électronique de la Kawasaki Ninja H2 :
Seul le tableau de bord résiste à la modernisation. Alors que de nombreuses motos définies comme technologiques arborent fièrement un écran LCD en couleurs, la Kawasaki se montre conventionnelle avec son compte-tours analogique et son écran LCD monochrome. Heureusement, ce dernier ne manque pas de gadgets avec notamment l'affichage du niveau de pression de la turbine et de sa température.
La clé de la Ninja H2 porte aussi le logo "River Mark", le ton est donné. Pas de commande keyless, il faut encore insérer la clé dans le Neimann. On s'installe à son bord de la même façon qu'on le ferait sur une sportive. Le poids du haut du corps repose sur les poignets. Les jambes sont très repliées. La moto est plus longue que la ZX-10R, mais plus courte que la ZZR 1400 ; de ce fait, les bras sont bien allongés et la position n'est pas trop extrême. Ainsi, on peut admettre que la position est confortable, relativement à celle subie sur les sportives. Le fessier est maintenu par deux protubérances caoutchoutées (réglable en profondeur sur deux positions) à l'arrière de la selle ; lors de fortes accélérations, il n'y aura nul besoin de s'agripper au guidon bracelet. La selle est cependant assez dure et étroite, de quoi rappeler que nous sommes bien en présence d'une sportive, pure et dure.
On tourne la clé et le tableau de bord s'illumine. On enclenche le moteur qui s'ébroue dans une sonorité à la fois rauque et métallique. Rien d'extravagant si ce n'est que l'ambiance sonore respire la puissance. Il ne suffira que de quelques coups de gaz, sans même monter haut dans les tours pour le confirmer.
Le premier rapport se verrouille franchement tout en secouant la moto. La commande d'embrayage est souple, l'embrayage anti-dribble n'y étant pas pour rien. En la relâchant, on remarque de suite sa précision chirurgicale. Le couple du quatre-cylindres élance la moto sur un filet de gaz. On change de rapport manuellement, le temps que la mécanique chauffe et à défaut d'utiliser le quickshifter qui est plutôt calibré pour les passages de rapport à haut régime. On enroule gentiment, mais sûrement. Il faut apprivoiser la Ninja H2 avant d'oser chatouiller la mécanique.
En restant bas dans les tours, soit en-dessous de 5'000tr/min, le moteur est souple et ne souffre d'aucun à-coup d'injection. C'est un vrai quatre-cylindres. Plein de couple, il ne grogne pas lorsqu'il faut cruiser sur les rapports supérieurs lorsque l'on traverse une localité, calé à 50km/h. Dès 4'000tr/min, on sent que le compresseur entre dans la danse. Si vous n'êtes pas doux avec la poignée de gaz, il se peut bien que vous subissiez quelques secousses désagréables. On se laisserait presque dire que la Ninja H2 est une machine civilisée. Mais il n'en est rien... !