ESSAI
Depuis que BMW commercialise la S1000 RR, ils ont accumulé une certaine expérience avec, en Superbike et en endurance. Le développement de ce moteur leur a permis d’y ajouter le shiftcam, calage variable des arbres à cames, et afficher 200 chevaux. Seuls les modèles les plus rapides ont droit à ce coeur explosif, à savoir la S1000 RR 2023, la M1000 RR, la M1000 R et finalement la M 1000 XR ! Lorsque les bavarois mettent leur lettre la plus puissante sur une moto, ce n’est pas pour rigoler.
Lors de la présentation la veille de l’essai, les ingénieurs digressent de la présentation pour raconter des histoires vécues lors du développement. Dans leurs bureaux, ils ont rapidement surnommé cette moto le boulet de canon. Il y a plusieurs années, disent-ils (donc l’idée de ce modèle ne date par d’hier), ils avait déjà monté le moteur de la sportive dans le châssis d’une XR. Difficile de faire plus discret. Et bien ils s’amusaient à rouler sur des circuits avec des pilotes amateurs et leur mettre la misère avec leur proto…
Lorsque Peter Hickman (recordman de l’île de Man alors que j’écris ces lignes) a testé la M XR prototype sur son circuit, il s’est inquiété de son temps au tour tellement il pensait être allé vite.
Coeur de 201 chevaux
La sportive de Münich a logiquement un 4 cylindres en ligne, double arbres à cames à calage variable. Dans la RR, on compte sur 212 chevaux, pour la routière ils en ont retranché 11, affichant 201 chevaux sur la fiche technique. C’est dû à plusieurs adaptations, dont la cartographie évidement, mais aussi le rapport final de transmission qui ajoute 2 dents à la couronne. Les 4, 5 et 6e vitesses sont volontairement plus courte pour lever à chaque fois qu’on tourne la poignée, non pour privilégier l’accélération à la vitesse max. Celle-ci est déclarée à 275 km/h, suffisant. Le couple donné sur l’homologation est de 113 Nm, 1 de moins que la nouvelle S 1000 XR; seulement leur courbe est très différente. Pour laisser expirer le moteur, c’est une ligne en inox à laquelle est raccordé un silencieux en titane et carbone de Akrapovic (de série).
Sur les modèles M, la suspension se distingue nettement de leurs modèles S de base. C’est le plus flagrant sur la RR, où la suspension devient 100% mécanique. Pour la M XR, on trouve une fourche où la précharge se règle avec des outils, la précharge de l’amortisseur a une molette déportée. Compression et détente se règlent via le DDC. Avec les modes Road, Dynamic et Race, le réglage DDC est actif. En Race PRO, compression et détente sont figés, réglable via le tableau de bord. J’en reparlerai en évoquant la conduite.
On reconnait logiquement la face de la XR, avec ces feux et ses extensions qui font un peu office de bec comme on en avait l’habitude sur les BMW. La coque arrière de la M est inédite, elle est plus fine (mais reste imposante) et perd ses fixations pour les valises latérales. Pour refroidir un tel moteur, il fallait bien 2 radiateurs et les cacher. Les carénages latéraux sont différents car ils intègrent des ailerons. Obligé pour tout modèle M qui se respecte. Ces ailerons quadriplans procurent 12 kg d’appui à 200 km/h, autant que ceux de la sportive ou du roadster. Pour protéger du vent, un petit pare-brise est installé, il se règle en 2 positions à une main.
Le freinage n’est autre que le même que la Superbike : double disques ø320 mm pincés par des étriers monoblocs Nissin anodisés en bleu et dotés de 4 pistons chacun. Le frein arrière est un disque ø265 mm et un étrier 2 pistons. De quoi faire des freinages de trappeurs d’un seul doigt.
Vous pourrez croiser la M 1000 XR sous deux formes : de base, elle est blanche avec une déco Motosport tricolore. Celle-ci fait 223 kg en ordre de marche avec ses jantes forgées. Ou alors en noir, avec beaucoup de carbon et là aussi le look ///M. C’est uniquement avec le pack de pièces M Competition qu’on peut l’avoir en noir. Dans ce pack, il y a les commandes reculées et des leviers taillées masse de Gilles Tooling mais surtout des jantes en carbone ThysenKrupp pour faire baisser le poids à 220 kg. Je regrette que le bras oscillant ne soit pas brut comme sur la M RR, c’est quand même beau non peint. Il faudra débourser 5’940 francs de plus pour le pack M Competition.
Il faut garder la tête froide
D’emblée on nous met sous les yeux les chiffres importants pour la conduite. Le 0 à 100 km/h est abattu en 3.2 secondes, 0 à 200, 7.4 secondes. N’importe quelle reprise se fera plus vite que ça. Il faudra être prudent avec la poignée de gaz et ne pas lâcher l’embrayage trop vite.
Le millésime 2024 des XR reçoit une nouvelle selle conducteur plus plate. La précédente était très creusée et immobilisait un peu le pilote. Je suis séduit par la position sur cette moto, on a envie de partir pour une longue journée de route. Les mains sont bien posées sur le guidon d’une façon détendue. Habituellement je n’aime pas les rétroviseurs en bout de guidon où je ne vois pas grand chose. Sur cette routière, la visibilité est étonnamment bonne vers l’arrière !
D’ordinaire, les BMW M1000 XR sont livrée avec des pneus Continental ContiRaceAttack 2 Street, sauf certains marchés et nos motos d’essai qui ont des Bridgestone RS11. Toutes nos motos sont aussi des noir, donc avec le pack Compétition. Trimbaler 3 kg de plus toute la journée aurait été scandaleux.
En quittant la zone résidentielle où nous sommes, la moto encore froide adapte son affichage sur l’écran du dashboard. Il m’intime de ne pas dépasser 6’000 tr/min avec une zone rouge exagérément grande sur presque tout l’écran. Comme le laisse deviner la courbe de couple, avant 5’000 tr/min, il n’y a pratiquement rien, c’est poussif mais permet de se déplacer. Une fois à température, on peut se permettre une bonne louche de gaz. La vitesse de montée en régime est saisissante. Comme avec la M RR, les pièces en mouvement du moteur sont allégées et ceci se traduit par moins d’inertie pour une montée en régime fulgurante. À peine tourné la poignée, je passe de 5 à 8’000 et 85% du couple m’a mis une calotte derrière la tête. Un giratoire approche, on recommence en sortant.
5’000 en 2, souder, trop vite, lâcher, le virage te saute à la gueule, freiner (fort). Comme promis par BMW, les freins ont du répondant, leur force d’arrêt est phénoménale. Enfin un peu de ligne droite entre 2 virages, l’occasion de passer la 3 mais loin du rupteur. C’est surtout pour utiliser la boite de vitesse et son shifter d’une redoutable précision. Les virages de la région semblent avoir la tendance à se rapprocher des motards…
J’ai roulé en Road au début, mais la poignée de gaz répond assez mollement aux sollicitations, en dynamique c’est plus direct et je préfère ce ressenti. Je suis aussi perturbé par le DDC qui change en permanence les réglages de compression et de rebond. En road il essaye d’imprimer une certaine souplesse pour apporte ce qu’il peut de confort. Chez moi ça se traduit par un centième de seconde d’appréhension lorsque je prends un virage. Le goudron est très clair et pourrait être glissant, ce qui n’aide pas non plus.
On passe un magnifique lacet dans un paysage aride mais printanier, notre photo spot. En toute logique, on s’arrête peu après pour se coordonner. Je profite d’avoir Dominik Blaß, en charge de la M XR, pour paramétrer mon mode Race PRO1. Poignée de gaz Dynamic, un soupçon d’ABS et d’anti-wheeling, des suspensions figée dans un réglage polyvalent et le bouton DTC sur le commodo gauche qui me donne un accès direct au contrôle de traction de -3 à +3. J’ai aussi un assistant à la glisse comme sur la RR, mais je ne pense honnêtement pas m’en servir.
On commence les passages sur ce lacet et j’ai un meilleur feeling de l’avant. L’asphalte reste clair, mais le comportement prévisible et constant de la suspension rassure. Quelques réglages peuvent être amélioré, mais je garderai Race PRO1 pour le reste du trajet. Dès qu’on a un peu plus d’espace, on s’empresse d’explorer le reste du régime moteur. Changer de vitesse à 8/10’000 quand le moteur est capable de dépasser 14’500 tape sur ma curiosité.
Prochaine occasion, je soude, objectif rupteur de 2, mais j’étais pas prêt à ça. Après mi-régime, ce n’est pas une calotte mais un véritable coup de pied au cul que nous met l’allemande. Pour une mise sur orbite, il y a Space X et la M 1000 XR. Les reprises sont insolentes, plus tard sur l’autoroute, je lis des chiffres insolents qui défilent sur le compteur. On accélère aussi vite qu’on freine et on recommence. Mettez-y une glacière sur l’arrière et lancez-vous dans le transport d’organe, vous aurez du succès. La protection au vent avec le pare-brise en position n’est pas énorme, mais elle suffit. Un pare-brise haut existe en option.
Avant ça nous avions encore tout un itinéraire sinueux, majoritairement en descente. C’est l’image onboard que j’ai mise sur Instagram. Les virages sont magnifiques, mais manque de chance le côté droit de la chaussée a toujours des traits de réparation sur la traj’ et je sens plusieurs petite glisse se passer. Inutile de se mettre par terre pour si peu, je profite de la balade car cette BMW est extra ordinaire.
Merci d’oser encore faire ce genre de trucs
Si à première vue un moteur de Superbike dans une routière peut paraitre idiot, le soin porté par BMW dans l’intégration de ce dernier laisse pantois. La couronne plus grande, les rapports plus courts, les cartographies et les différentes réponses de la poignée de gaz rendent le tout utilisable. En flirtant très souvent avec la légalité il est vrai, mais la vitesse de montée en régime s’apprécie sans dépasser les limites.
Avec la selle moins creusée, on fait à la fois corps avec la machine, sans être engoncé donc parfaitement mobile pour avoir un pilotage dynamique. On imagine alors parfaitement le plaisir qu’ont pris les metteurs au point lors de leurs roulages sur circuit à tourner aussi vite que des amateurs sur des sportives.
Si on a les moyens pour une M 1000 RR et qu’on projette de s’en servir sur route, on aurait presque meilleur temps de prendre cette XR, qui s’apprécie vraiment sur la route. Quant aux sessions piste, à moins de courir dans un championnat, elles ne seront pas moins satisfaisantes. Je m’en vais donc trouver CHF 31’920.- pour me financer ce grand-huit personnel.
GALERIE
BILAN
ON A AIMÉ :
Son look M avec le pack Competition
Les accélérations de dingue
Le freinage ultra mordant
ON A MOINS AIMÉ :
Difficile à utiliser sur route
Pas de bagages durs disponibles
La suspension DDC déroutante en automatique