Pour situer le cadre de l’essai, je ne l’ai volontairement pas emmenée sur circuit ; d’une part car mon collègue Gonzo l’avait déjà fait un an plutôt dans des conditions optimales (lire l'article), et d’autre part car la plupart des (futures) propriétaires la rouleront essentiellement sur route. En regard de ses performances, c’est triste à dire, mais c’est ainsi.
Toute équipée, tant d’attributs électroniques que de PowerParts, la SuperDuke en jette, vraiment. Qui plus est dans cette livrée blanche et orange. Ses lignes plus acérées que jamais, ses éléments de carénage sont autant bruts qu’esthétiques. La SuperDuke n’est autre qu’un châssis, une paire de roues, un guidon, un semblant de selle... et un moteur, et quel moteur ! Elle respire la performance pure.
Ce moteur, parlons-en. Il est l’un des plus gros twins que l’on puisse trouver sur un roadster, mais surtout il est l’un des plus puissants et des plus coupleux. 177 chevaux et 141 Newton-mètres. Je ne peux que m’attendre à des performances dingues, d’autant plus que la moto ne pèse pas plus de 195 kilos (à sec). Pour me rassurer, je peux compter sur un arsenal technologique d’origine Bosch qui veillera au grain à chaque milliseconde, pour contenir la fougue de l’Autrichienne.
Alors que l’Autriche s’apparente à un pays sage, sans excès et dans le respect des règles, posé au pied des Alpes, comme une sorte de Suisse primitive à grande échelle, on peinerait à croire qu’il est le berceau de bêtes de course. En effet, peu importe le modèle du riche catalogue, KTM transmet la signature ADN de la marque. Le fameux Ready to Race n’est pas un slogan marketing trouvé au hasard. Chaque modèle a bel et bien été développé pour la performance, performance respective au domaine de prédilection du modèle. Si la SuperDuke est un roadster extrême dans son domaine, il n’est pas moins confortable et agréable en utilisation civilisée au quotidien, quand bien même il est difficile de contenir mes pulsions à son guidon. La position de conduite est reposante, avec un guidon large, le dos pas trop incliné vers l’avant et les jambes justement repliées. Aussi, sa commande d’embrayage hydraulique est douce, de même que l’attaque du frein avant est parfaitement dosable. Son gros twin est d’une souplesse remarquable et ne cogne pas, même sur les bas régimes. C’est ainsi que je peux envisager de longues balades journalières de plus de 400km. Parfois, je me crois au guidon d’un gros trail, tant je me sens à l’aise et décontracté.
Toutefois, malgré sa douceur, la tempête supplante à la quiétude de la balade. Bien que j’enroule sur un filet de gaz, il suffit d’augmenter la course à l’accélérateur pour ressentir l’appel de la Bête : « Viens, vas-y, cravache-moi, j’aime ça ! » C’est vrai, ce twin LC8 a une prédisposition à prendre les tours, il ne demande que cela. Il semble ne subir aucune inertie.
Quand je pensais qu’il n’était que très coupleux sur les mi-régimes, je me trompais... Dès 6’000trs/min, c’est l’envolée sauvage. La puissance déboule et bouscule ce qui semblait être un gros trail déguisé en roadster. Là, entre mes cuisses, le twin est expressif et explosif. Sur les trois premiers rapports, gaz en grand, la roue avant ne cesse de se délester en cherchant à pointer vers le ciel. Heureusement, l’électronique contient cette fougue inattendue. A ce propos, la SuperDuke est équipée d’une centrale inertielle multiaxiale qui régit le comportement de l’ABS et du contrôle de traction. Ainsi, en fonction de l’angle pris (en courbe) et en fonction de la phase d'accélération/décélération, l’ABS comme le contrôle de traction agiront différemment. Sur route, c’est un gain en termes de sécurité non négligeable, de même que, sur circuit, un pilote appréciera cette sensibilité.
Ce qui étonne le plus, c’est cette facilité dont fait preuve la SuperDuke. Que je me balade ou que je tire la bourre avec une bande de potes, l’Autrichienne se laisse emmener, et je dirais même qu’elle se laisse malmener sans broncher. Déjà, sa partie-cycle encaisse les nombreuses imperfections de la route, sans pour autant lésiner les remontées d’informations cruciales à un pilotage précis et en toute sécurité. Puis, elle encourage à un pilotage intuitif, à savoir que je n’ai à me concentrer que sur la trajectoire parfaite, sans effort particulier, si ce n’est que de soutenir à l’accélération fulgurante. Et finalement, ce feeling dont je bénéficie à son guidon, les commandes de gaz, d’embrayage et de freins répondant avec précision.
Pour la suite, outre un bagage technique et une dose généreuse de sang froid, je n’ai aucune peine à me déplacer à des allures affolantes, quand bien même un débutant trouverait rapidement ses marques. Les accélérations sont velues, les vitesses atteintes sont inavouables, les freinages sont musclés, ... Avec la SuperDuke, on peut rouler vite, très vite, et ce sans s’en apercevoir. Par chance, le système de freins Brembo assure une puissance à la hauteur des performances de la machine et saura la stopper sur des distances records.