Le réservoir a aussi été l’objet de toutes les attentions. Campé sur le cadre-treillis qui encercle de manière très serrée le moteur, il donne une allure très costaude à la moto, par sa largeur, mais aussi par ses angles et sa ligne fluide.
La qualité des pièces et leur assemblage sont remarquables. On regrettera par contre les quelques fils électriques apparents, de même que les fiches en plastique disgracieuses. Dissimuler ces éléments ne semble pourtant pas être bien difficile. Ces détails de finition ternissent quelque peu le tableau. On s’attendait à mieux, surtout en regard du prix des machines (voir en bas d'article).
Le moment tant attendu arrive. Les Brutale et Dragster nous attendent, toutes alignées et rangées par coloris. Les rouges et blanches claquent alors que les noires et les grises affichent la sobriété à l’état brut. Il n’est pas nécessaire de nous dire à deux reprises de monter en selle. Pour le tour d’essai du matin, la Brutale m’est attribuée.
La selle est fine et étonnamment moelleuse. Les surpiqures rouges et noires qui la bordent sont du plus bel effet. La position de conduite est typique de celle des roadsters de la production actuelle, soit décontractée et légèrement sur les poignets. Les jambes sont bien repliées et les pieds sont assez en arrière. Les cale-pieds sont haut perchés, ce qui augure une garde au sol pour une prise d’angle importante en courbe.
Je tourne la clé de contact et l’écran de bord orangé s’illumine. Une fois que l’ordinateur de bord a effectué son autocontrôle (il ne faut pas être pressé ! Comptez bien 5 secondes !), je prends connaissance des différentes informations diffusées sur l’écran. Il y a des chiffres un peu partout, et malgré cela, il manque une jauge d’essence. Entre le compte-tours qui s’affiche en barre de gauche à droite, la température du liquide de refroidissement qui se gradue verticalement et les chiffres ci et là, j’en perds vite mon latin. D’autant plus que l’écran est couvert d’un plastique brillant dont la surface n’est pas plate... Avec la luminosité environnante, il faut bouger la tête de haut en bas ou de gauche à droite pour lire toutes les informations. En roulant, je me contenterai de lire la vitesse indiquée par le tachymètre numérique, ce sera plus prudent.
Trêve de blabla, levons le camp ! Un coup de démarreur et les "tre pistoni" s’ébrouent. Quelles vocalises, et point de sifflement si l'on compare à la concurrence anglo-saxonne ! Métallique, rauque et très présent, la bande son qui s’émane des trois flûtes servant de silencieux est digne des meilleurs ténors de la Scala de Milan. Ça me prend aux tripes !
Je passe le premier rapport. Tout en douceur, le rapport se verrouille et l’indicateur de rapport engagé me confirme l’information. Les Pirelli Diablo Rosso II faisant office de première monte pneumatique sont encore froids. Le temps de s’extraire de Caso d’Elsa, de s’enfiler dans quelques rues étroites et passer quelques carrefours suffira à constater la facilité de prise en main et l'agilité de la Brutale 800 RR. Le ride-by-wire (commande électronique des gaz) aidant, j’enroule bas dans les tours sans aucun à-coup. Le trois-cylindres se montre toutefois un peu rugueux à bas régime (proche du ralenti).
A peine sortis de la bourgade que les photographes nous sollicitent pour une séance photo. La route est sinueuse et paraît propice à de beaux clichés. Seulement, le revêtement est de piètre qualité avec des trous, de belles déformations et du sable par endroit. Bien que la Brutale soit facile, il m’aurait fallu quelques kilomètres supplémentaires pour saisir le comportement dynamique de la moto pour oser franchement attaquer et avoir un minimum d’allure sur les photos... Casse-gueule, dites-vous ? Et pour couronner le tout, entre deux, on échange de monture avec le collègue... Inutile de vous avouer mon amère déception à la suite de cette séance photo.
La balade se poursuit avec un enchaînement de virages sur plusieurs dizaines de kilomètres : de grandes courbes, des pif-paf, des épingles, ... de tout ! Le rêve de tous les motards.
La Toscane est l’une des plus belles régions d’Italie, par ses paysages, sa culture, son architecture, son histoire et sa gastronomie ; par contre, son réseau routier mériterait un sérieux rafraîchissement. Fissures, déformations en tout genre, trous, asphalte glissant, ... un trail ferait même grise mine ! Enfin, ceci a permis de juger de l’excellente partie-cycle des deux motos. Ni saucissonnage ni torsion, la Brutale comme la Dragster file droit là où votre regard vise.
Revenons à nos moutons ou plutôt à nos virages. La Brutale 800 RR s’est montrée extrêmement incisive et ultra maniable. Le train avant est d’une précision chirurgicale. Il se place instinctivement et avec exactitude. Même lors d’excès d’optimisme quand on arrive en plein virage avec les deux doigts sollicitant le frein avant, la trajectoire de s’ouvre pas et la moto ne bronche pas !