Pour 2013, la firme d’Hinckley a revu la Rocket. Aurait-elle été jugée pas assez virile ? C’est ce que nous pourrions croire en regard de la décision des ingénieurs Triumph. En effet, pour lui offrir plus de caractère (encore !), le couple-moteur a été libéré sur les trois premiers rapports.
La Rocket adopte dorénavant la rock’attitude en privilégiant le noir au chrome, de la même façon que sa petite sœur Thunderbird Storm. La moto s’assombrit et affirme son caractère démoniaque. Aussi, de nouveaux coloris sont disponibles et remplacent les précédents : noir mat et double bandes blanches ou noir brillant et double bandes rouges. Tout en sobriété et tout en préservant cette classe à l’anglaise si efficace !
Intimidante, dites-vous ? C’est LA vocation de la Rocket ! Elle incarne elle-même le culte de la démesure. Sur la Rocket, tout impressionne et tout est conçu en regard de sa cylindrée. La roue arrière de 240mm de largeur, l’immense radiateur, le réservoir volumineux et bombé en forme de goutte d’eau, les deux échappements de grand diamètre, une large selle, des disques de frein de 320mm à l’avant et 316 à l’arrière, ... et l’on ne parle pas du moteur de 2300cm3 et du carter-moteur affichant une contenance en huile de 5.9 litres ! La Rocket est un camion à deux-roues, les chiffres parlent d'eux-mêmes.
A part ces quelques touches esthétiques et ce débridage-moteur, la Rocket reste identique. Voyons alors ce qu’elle a dans le ventre !
La selle est basse (750mm) mais relativement large. Les jambes écartées le long du réservoir et repliées à l’équerre. Les bras s’allongent vers les grandes poignées. La position est à mi-chemin entre le cruiser et le roadster. On aime ! C’est reposant, confortable et à la fois propice à une conduite dynamique. La position permet également d’avoir un bon équilibre à l’arrêt et une bonne maîtrise des quatre quintaux dans les manœuvres à basse vitesse.
Le trois-cylindres s’ébroue dans un bruit sourd de turbine. C’est puissant ! Un léger coup d’accélérateur fait violence au gros 2300cm3... mais pas seulement, la moto s’en retrouve bousculée dans toute sa longueur. L’inertie du moteur est toujours aussi incroyable.
L’appel de la route se fait pressant. Le premier rapport se passe dans un cognement rassurant. La mécanique est aussi brute que précise. On enroule sur les trois premiers rapports pour ensuite sauter au cinquième et dernier rapport. Le moteur tracte la Rocket et son équipage sans souffrir du poids. Sur le cinquième rapport, qui n’est pas un overdrive mais un vrai rapport, on aime cruiser et se balader en appréciant l’immense couple disponible dès le ralenti-moteur. Les paysages défilent aussi vite que le réservoir se vide. En effet, le trois-cylindres demande à être nourri (de 8 à 10 litres pour 100 kilomètres parcourus). L’autonomie ne sera pas un problème, puisque le réservoir a été adapté à l’appétit du moteur avec ses 24 litres de contenance.
Une fois lancée, la Rocket se laisse apprivoiser et ne rechigne pas à enquiller les virolets. On ressent toutefois son poids important, mais il ne vient pas troubler exagérément la dynamique de conduite. Violenter la Rocket serait une erreur, elle apprécie la conduite coulée, sans brutalité.
Elle montre sa force tout en douceur. Il faut aborder les virages en soignant la trajectoire. Ses excellents freins Nissin permettent de freiner avec finesse et doigté. En courbe, on travaille la Rocket au corps. Une bonne impulsion sur le guidon permet d’inscrire la moto. Une fois dans le virage, le châssis rigide et précis met en confiance et offre la possibilité d’affronter les longues courbes à allure soutenue sans avoir à subir des louvoiements. Ensuite, déchaînez votre côté viril sur la poignée de droite et sortez du virage en trombe ! Peu importe le rapport engagé, la Rocket porte bien son nom et vous catapultera au virage suivant dans une ambiance sonore sans égal. Pas besoin de cravacher son trois-cylindres pour qu’il exprime son caractère unique !
A l’épreuve des runs, la Rocket montre tout le potentiel de son moteur. Comme cette version 2013 est débridée sur les trois premiers rapports, nous n’avons pu résister à la tentation des départs arrêtés. Bénéficiant d’une excellente motricité et la débauche de couple étant délivrée linéairement, vous pourrez ouvrir les gaz en grand sans avoir à se soucier d’éventuelles dérobades du train arrière. En pleine charge, le moteur produit un son puissant, raclant et très sourd. La suspension arrière se tasse, le pneu arrière s'écrase, la barre des 100km/h est franchie en une fraction de seconde. L’accélération est plus musclée que vive et violente. C’est une accélération grâce au couple et non à la puissance. La Rocket, c’est une machine très virile qui a du caractère à revendre.
On préférera cette version "Roadster" pour les virées en solitaire plutôt qu’accompagné de Madame. La selle passager étant petite et peu moelleuse, couplée à une suspension ferme pour encaisser le couple du moteur en pleine charge, la passagère n’appréciera pas les trajets de plus d’une centaine de kilomètres. C’est pourquoi Triumph a développé la version "Touring", plus adaptée aux voyages en duo (plus d'infos sur TriumphMotorcycles.ch).
La Triumph Rocket III Roadster est une moto unique. En tout point, elle se démarque de ses concurrentes et de la production toute entière. Celui qui l’achètera sera passé à l’acte pour son caractère, son style et l’aura qu’elle distille ! Dans tous les cas, rouler une Rocket est une expérience de vie à part entière.