Photos de Ula Serra et Felix Romero, Vidéo de Justin, Will, Biel & Rick (GPS Media)
Publié le: 16 octobre 2024 par Patrick Schneuwly
Kawasaki Versys 1100 – Essai de la survivante parmi les routières

Les moteurs 4 cylindres en ligne sont en voie de disparition, d’autant plus pour une pure routière. Heureusement, elles n’ont pas toutes disparu ! Kawasaki a revu sa copie avec la Versys 1100 que j’ai eu l’opportunité d’essayer. La candidate rêvée pour un roule-toujours qui voudra faire de longues étapes routières.

ESSAI

Sur le marché des motos routières, les quatre cylindres ont progressivement disparu au profit des bicylindres et quelque trois cylindres. Je compte trois motos routières qui côtoient la nouvelle Versys 1100 sur ce marché : la BMW S1000XR et la Suzuki GSX-S 1000 GX, Seulement les deux ont un moteur dérivé de celui d’une sportive, avec 160 et 152 chevaux, respectivement. Un genre de roadster énervé et haut sur patte. La Versys se contente de 135 ch. pour être une routière qui privilégie le confort à la simple performance.

Le moteur de l’ancienne Versys 1000 avait pour défaut avoué un léger déficit de refroidissement. C’est pourquoi on trouve un radiateur d’huile sur celle-ci. Une autre imperfection était de manquer de puissance bas dans les tours, typique d’un moteur 4 cylindres. Pour y remédier, Kawasaki a augmenté la cylindrée du moteur en allongeant la course des pistons et augmentant la hauteur de la culasse de 3 mm. De 1’043 cm³, on arrive à 1’099 cm³. Avec des cames moins pointues qui ouvrent moins les soupapes, il y a maintenant significativement plus de couple entre 2’500 et 6’000 tr/min.

L’étagement de la boite de vitesses a été revu pour que ce supplément de couple soit effectivement traduit en de meilleures reprises à bas régime et plus d’allonge sur les 5 et 6ᵉ vitesse. La preuve en est, du ralenti en 2e on monte difficilement jusqu’à 2’500 tours et à partir de là, le moteur commence à tracter. Raisonnablement jusqu’à 4’000, puis de façon linéaire jusqu’au rupteur à 10’000. Cette agréable sensation de pouvoir prolonger l’utilisation des rapports avec un cri rageur fera toujours le charme d’un 4 cylindres.

Le shifter bidirectionnel a été reprogrammé pour autoriser son utilisation dès 1’500 tr/min, avant il demandait plus de régime pour fonctionner. Je n’ai pas testé cette ancienne méthode, j’ai directement utilisé le sélecteur comme je le ferais sur n’importe quelle autre moto. Il fait effectivement de son mieux pour passer chaque vitesse qu’on lui demande, avec le moins d’à coups possible. Quelques fois, dans le premier tiers du compteur, ce n’était pas sans ménagement. Un peu d’aide à l’embrayage qui est en plus assisté fluidifie naturellement le processus.

En entrée d’épingle avec une décélération importante, j’ai plusieurs fois rentré la 1ʳᵉ pour garder du rythme et m’extirper avec le maximum de couple possible. À chaque fois le changement s’est fait parfaitement, sans délai ni soubresaut pouvant faire croire à un faux point mort. Idem en ressortant, l’enchainement avec la 2ᵉ, toujours au shifter, était fluide car en pleine accélération, dans la plage idéale d’utilisation du moteur.

Mais il faudra se garder d’utiliser le shifter n’importe comment. Tout comme on ne change pas nécessairement de vitesse en appui sur l’angle avec pied + embrayage, la coupure d’allumage à ce moment-là déstabilise assez la moto pour trouver ça inconfortable. J’ai même changé quelques vitesses en courbe, avec une adhérence sub-optimale, j’ai eu droit à un témoin de contrôle de traction le temps d’un instant, mais qui a duré pour moi une éternité. J’ai cru que le KTRC me jugeais, bien piètre motard qui monte un rapport à un moment pareil.

La Kawasaki Versys 1100 s’adresse en grande majorité au marché européen, trois quarts seront écoulés chez nous. Les marchés où elle se vend le mieux, c’est la France, l’Allemagne et l’Italie (dans cet ordre). Un trait que le constructeur retrouve souvent chez les propriétaires, c’est qu’ils sont souvent assez grands et ceci se retrouve sur les proportions de la moto. Par exemple, la selle 840 mm a été choisie comme hauteur standard, alors qu’il existe une version 820 mm qui sera au catalogue des accessoires.

De série les deux selles sont en mousse confort, aucune selle plus confortable n’existe en accessoire. Moi, la hauteur me convient bien, mes collègues plus petits avaient plus de difficultés à mettre les pieds au sol. Les cale-pieds sont au niveau des mollets, obligeant à écarter un peu plus les pieds de la moto. Sur la route, ces 2 cm de différence contribuent à élever le centre de gravité de la Versys 1100, elle réagit par conséquent un peu plus vite aux déplacements du pilote.

Le guidon aussi est largement dimensionné, j’avais l’impression d’être très large et avec 950 mm, c’est le cas. Il donne un excellent bras de levier sur la moto, la maniabilité est au rendez-vous.

Grâce à l’habillage de la moto qui doit faire le tour d’un large moteur 4 cylindres, la protection au vent pour le bas du corps est généreuse. De série, il y a également des protège-mains qui écartent l’air des bouts du guidon. Confortable et utile contre le froid, surtout secondé par les poignées chauffantes. Pour protéger le haut du corps, la Versys opte pour un large saute vent à réglage manuel. Il est installé sur des glissières où il faut défaire deux grosses vis pour le déplacer. Sur une moto qui pourrait être la nouvelle référence routière, le réglage électrique aurait été un bon plus. Heureusement, en position haute, la protection est proche d’être parfaite. L’air me passe au-dessus du casque et autour des épaules. De quoi rouler longtemps sur l’autoroute, moins fatigué et moins exposé aux intempéries.

Deux versions sur trois sont commercialisées en Suisse : la S et la SE. Une Versys plus basique n’est pas proposée. L’unique différence entre la S et la SE est la suspension. Mécanique sur la S et semi-active avec Sky Hook pour la SE. C’est celle que j’ai essayée.

Deux packs d’équipements pourront être commandé simplement et installé par le concessionnaire. Il s’agit d’un kit Tourer avec les valises, sacs intérieurs et une protection de réservoir. Ou on y met l’ensemble Grand Tourer qui ajoute des protections de cadre, des feux additionnels, le support pour GPS et un top-case 47 litres avec un dossier garni pour le confort du passager.

Les motos essayées ont le kit Tourer+ qui n’est pas proposé en Suisse.

C’est sur une SE que j’ai pu rouler près de 300 km, sur toutes sortes de route. J’ai trouvé des billards, mais heureusement aussi des routes en moins bon état pour se rendre compte en conditions réelles des capacités de la Versys. Excepté la largeur à appréhender, elle met rapidement le pilote à l’aise. La selle confort est accueillante et les deux leviers réglables rendent les commandes forcément plus conviviales. Pour l’allumer, je dois plonger ma main vers le té de fourche, le contacteur de clé y est un peu à l’abri et ce n’est pas une tare de conserver une clé à la place des transpondeurs devenus trop répandus.

Les boutons sur le guidon sont restés en nombres raisonnables. Je relève le bouton Select pour le pouce droit, il sert à entrer dans le menu et la navigation se fait avec haut/bas au pouce gauche. En roulant, ce sont ces haut/bas maintenu pressé avec les gaz fermés qui changent les modes de conduite. Pression courte fait défiler les informations comme l’angle de la moto, les trips partiels, odomètre. Sur une SE, le bouton preload à gauche change la charge de la moto : pilote, pilote et bagages, duo, duo et bagages.

Avec chaque mode de conduite, il y a des paramètres différents qui s’appliquent aux multiples aides à la conduite. C’est ce que Kawasaki appelle le Cornering Managment, l’action combinée du contrôle de traction, de l’ABS, de la suspension Sky Hook qui cherche toujours à maintenir la moto horizontale et stable. Ce n’est pas une moto destinée au sport, elle ne cherche pas à optimiser son grip en acceptant un transfert de masse vers l’avant, la plongée de la fourche reste maitrisée.

La séance photo s’annonce avec 4 km de route que le groupe va parcourir 4 fois dans chaque sens. La route est en plus fermée durant cet exercice, de quoi profiter de ces enchaînements de virages tout à fait à l’image du reste de la matinée. C’est aussi une excellente occasion de tester différents réglages et de comparer entre deux passages. Difficile de dire si je préfère attaquer en road ou en sport. Car le premier semble tout aussi efficace, sans les inconvénients d’une suspension qui filtre moins et rend la moto plus vive. Il faudra attendre l’après-midi pour rouler suffisamment longtemps et savoir si les gants changent la sensation de fourmillements.

Repas terminé, le programme prévoit de rentrer par le chemin qu’on souhaite, chacun avec un GPS sur la moto. Seulement, il pleut. Non, ce n’est pas dommage, car j’ai l’équipement Leatt FlowTour et le layering étanche (présenté sur le site), je ne vais pas bouder mon plaisir, bien au contraire. La situation rêvée pour le mode pluie. Je vois mes deux collègues suisses filer devant et moi un peu distancé, je ne force pas. La route est irrégulière, comme celle dans les stations de ski qui doit endurer la neige longtemps durant l’hiver, agressée par beaucoup de sel pour éviter le verglas. Avec la pluie, même avec un contrôle de traction aux aguets et un moteur devenu très calme, je suis un peu emprunté, le retour d’information n’est plus le même. Et j’ai des fourmis dans les mains.

Heureusement, la pluie cesse et l’itinéraire est toujours aussi sinueux. Une fois la route sèche, l’attaque reprend de plus belle. L’ADN de la Versys est 100% voyage, mais pas stérile pour autant, on ne chasse pas aussi simplement le motard qui sommeille en chacun. Il faut seulement admettre qu’à ces vitesses (trop vite pour la suisse) la moto est physique à cravacher. Elle répond présent et c’est un régal, cependant la nuit qui suit, on aura le sommeil plus lourd pour s’en remettre.

Mettre une prise USB sur la moto, de nos jours, c’est devenu un standard. Tout le monde a connu la batterie faible un jour sur un appareil et se retrouve soulagé de pouvoir le charger en roulant. Par conséquent, Kawasaki a posé une prise USB-C sur le guidon, littéralement. Ce gros boitier est posé là, sans aucune intégration. On dirait une décision de vendredi 16h55. L’autre inconvénient, c’est que la prise est dans le champ de vision et est monté sur des caoutchoucs, ainsi, il bouge beaucoup dans le coin du champ de vision.

La journée se termine par un bout d’autoroute, où je plante le régulateur à vitesse légale et me laisse conduire comme le ferait un voyageur lors d’une longue étape. La stabilité de la Versys est bluffante. Elle est simplement plantée là, ne bouge que si on lui demande. Sans tenir le guidon, il ne tressaute même pas, je fais plusieurs courbes juste en guidant la moto de mon corps, la Kawasaki n’hésite pas et se laisse faire. Protégé du vent, confortablement assis, je profite du paysage et imagine les longs voyages routiers que j’entreprendrais avec cette moto. Un commentaire au sujet du régulateur de vitesse, avec Set il garde la vitesse, sans surprise. Si on l’interrompt, avec Res il reprend la vitesse tout doucement. Enfin, je n’ai pas compris le fonctionnement des boutons +/- car la vitesse semblait ne pas changer. J’ai choisi d’utiliser surtout la poignée de gaz et set.

Elle devrait arriver en Suisse encore cet automne, pour un prix d’environ CHF 16’000.- pour la S et CHF 18’000.- pour la SE. Quant aux packs décrits, Tourer coutera dans les CHF 1’100.- et Grand Tourer CHF 2’600.- environ. Des tarifs très compétitifs pour une moto apte à voyager loin, offrant beaucoup de confort à un roule-toujours qui ne se préoccupe pas de la saison pour entreprendre une excursion.

De retour à l’hôtel on refait évidemment la journée avec mes collègues façon Joe Bar. Selon leurs mots « ils m’ont mis la misère » lorsqu’il pleuvait, c’est là qu’on découvre que j’avais la monte pneumatique OE et eux déjà des pneus de remplacement. J’avais des Bridgestone T31 spec G, eux des T31 de remplacement (si pour vous c’est du chinois, lisez notre décryptage des pneus OE). Qu’est-ce que le Spec G apporte ? « Il est plus stable à plus de 190 km/h que le modèle de remplacement » me répond un technicien de Kawasaki. Mais qu’avez-vous perdu pour atteindre cette stabilité ? Cette question est sans réponse. Je suspecte qu’il soit devenu moins endurant et moins de grip sur le mouillé, étant donné la différence de ressenti entre mes collègues et moi. Changer le pneu OE n’est pas un obstacle insurmontable.

GALERIE

BILAN

ON A AIMÉ :

Moteur souple et plein de caractère

Protection au vent

Équipement très complet

ON A MOINS AIMÉ :

Vibrations dans les mains

Régulateur de vitesse peu convivial

Intégration de la prise USB-C

FICHE TECHNIQUE

Dimensions
Longueur
2'270 mm.
Largeur
950 mm.
Hauteur de selle
840 mm.
Empattement
1'520 mm.
Poids à sec
234 (SE 236) kg.
Poids KERB
257 (SE 259) kg.
Capacité du réservoir
21 litres
Électronique
Régulateur de vitesse
Oui
Aide au pilotage
KCMF, KTRC (SE: KECS)
Freinage
ABS
Oui, sur l'angle (KIBS)
Frein avant
Double disque ø 310 mm, étriers 4 pistons
Frein arrière
Simple disque ø 260 mm, étrier 1 piston
Moteur
Type
4 cylindres en ligne, 4 temps, DOHC, 4 soupapes par cylindre
Cylindrée
1'099 cm3
Refroidissement
liquide
Alimentation
Injection électronique
Partie cycle
Châssis
Twin-tube, aluminium
Suspension avant
Fourche inversée ø 43 mm, entièrement réglable (SE : Amortissement en compression et en détente contrôlé par le système KECS et réglage électronique de la précharge du ressort.)
Course av.
150 mm.
Suspension arrière
Monoamortisseur horizontal à gaz (SE: Amortissement en compression et en détente contrôlé par le système KECS et réglage électronique de la précharge du ressort.)
Course ar.
152 mm.
Pneu avant
120/70 ZR 17 Bridgestone T31 G
Pneu arrière
180/55 ZR 17 Bridgestone T31 G
Performances
Puissance
135 ch.
Régime puissance max
9'000 tr/min.
Couple Max
112 Nm.
Régime couple max
7'600 tr/min.
Transmission
Boîte
6 vitesses
Shifter
Oui, bidirectionnel de série
Embrayage
multidisque à bain d'huile
Finale
par chaîne
Véhicule
Marque
Kawasaki
Modèle
Versys 1100
Année
2025
Catégorie
Routière
Compatible A2
Non
Couleur
Metallic Graphite Gray / Metallic Diablo Black, Pearl Robotic White / Metallic Diablo Black
Lien site officiel
un triangle aux trois côtés égaux
un triangle aux trois côtés égaux
un triangle aux trois côtés égaux
un triangle aux trois côtés égaux
un triangle aux trois côtés égaux
un triangle aux trois côtés égaux
un triangle aux trois côtés égaux
un triangle aux trois côtés égaux