"Patrick, tu prends la Monster Diesel en essai !", voilà la phrase que m'a dit Yann au téléphone après avoir reçu la confirmation. L'espace d'un instant, je m'égare en me posant la question : comment ai-je pu manquer une news qui annonçait un moteur à mazout sur une Ducati ? Heureusement, il me suffit que de très peu de temps pour me rendre compte que l'on parle là de l'édition spéciale du designer italien Diesel. Vous aussi, ça vous a fait le coup ?
Pour cette Ducati, ils ont mis le paquet sur le look. Les traits les plus évocateurs de la Monster, c'est-à-dire le cadre treillis et l'unique phare rond n'ont pas bougé. Bien que le phare semble avoir un peu fondu au soleil en tombant vers l'avant, mais c'est dans l'air du temps, la face est ainsi plus dynamique et plus moderne.
Le double échappement à droite des S2R et S4R n'a pas été repris sur la 1100 Evo, alors qu'elle représente l'édition sportive du millésime, à moins d'estimer que la Streetfighter ait pris cette place dans la gamme. Heureusement, les designers de l'édition limitée se sont souvenus de ce détail en élaborant ces très beaux tubes entièrement noirs mats qui n'ont de silencieux que le nom. En deuxième, montez à 50 puis soulagez la poignée de gaz et écoutez les vitres se briser !
La peinture verte mate exclusive de la Diesel la rend à la fois discrète de loin et extravagante lorsqu'on se gare au milieu d'autres motos. Les deux prises d'air du réservoir sont cachées par deux inserts en alu arborant en grand le logo du designer italien. La selle sortie de ses ateliers porte la même étiquette que les jeans et est aussi confortable qu'elle le paraît. Une fois le capot de selle signé Monster retiré, le roadster pourra aussi accueillir un passager.
Sur cette édition, un cache noir mat a été ajouté au-dessus du compteur. De loin, il semble dissimuler deux petits compteurs ronds mais c'est bien l'instrument de bord digital d'origine qui est en-dessous. Celui-ci souffre d'ailleurs d'un défaut de visibilité lorsqu'on est grand : la vitesse est difficilement lisible et le témoin de marche du contrôle de motricité est carrément invisible.
Cernés par toutes ces pièces vertes mates, noires ou grises, les étriers Brembo des freins avant apportent la seule touche de couleur, sans compter le phare arrière. Ceux-ci ont été peints en un jaune pétant ; certains apprécieront cette excentricité. C'est une affaire de goût.
Je suis averti dès le début : rouler une Ducati Monster est quelque chose de spécial. Le caractère moteur est semblable à celui des bicylindres des motos mythiques de la marque. A l'inverse d'un quatre-cylindres, il ne faut pas chercher à monter haut dans les tours avec une Monster. En effet, passé 6'000 tours, le moteur s'essouffle très vite.
Sans être habitué, ce sera très frustrant pour attaquer et arsouiller avec vos potes. Vous essayerez de les suivre et tirerez toujours plus sur la poignée, sans résultat. Dans la confusion, je me suis vu obligé de changer de vitesse alors que je venais d'entrer dans une grande courbe rapide. Pas très rassurant !
Ce roadster n'aime pas non plus les grands axes. La prise au vent est importante et, là encore, le moteur manque d'allonge. Mais ne croyez pas que la Monster soit bonne à rien, loin de là ! En exploitant au maximum la courbe de couple entre quatre et six mille tours, vous seriez déjà largement hors-la-loi. C'est au rythme de la balade que le gros L2 sera le plus agréable à rouler. Très expressif, ce sera aussi un plaisir pour les oreilles.
Dans l'ensemble, l'étagement de la boîte est bon. Cependant, en ville, vous préférerez probablement utiliser la première plutôt qu'être secoué comme un prunier sur le deuxième rapport. Même constat pour le sixième rapport qui ne s'utilise que sur l'autoroute ; autrement, il n'y a pas assez de couple.
Une chose que sait faire la Monster, c'est les parcours sinueux où la vitesse ne fait aucune différence. Une véritable avaleuse de virages ! Le guidon légèrement cintré et refermé, les fesses un peu en arrière des pieds : la position invite à se jeter dans les virages. Grâce à la fourche Marzocchi et l'amortisseur Sachs, tous les deux réglables, la tenue de route est très saine. L'inscription en courbe et la prise d'angle se font sans effort et avec précision.
Le contrôle de traction veillera au grain quand vient le temps de s'extraire de la courbe. Bien réglé sur l'un des quatre niveaux, il ne sera pas intrusif mais juste rassurant. L'ABS, déconnectable en un instant dans le menu (tout avec le bouton "haut" du commodo gauche, pareil pour le DTC), vous laissera assez de liberté pour une utilisation sur route. Et avec l'efficacité des freins, si par un geste de panique vous attrapiez trop fort la poignée, il préservera probablement votre roadster d'un contact avec le goudron.
Si vous rêvez d'une Monster comme première moto, le style de conduite ne vous perturbera pas. Si par contre son look ravageur vous ferait changer votre moto, prenez bien le temps de l'essayer. Taillé pour la frime et la balade, le roadster italien trouvera ses clients parmi des motards exigeants qui cherchent exactement ça.