
Mais avant tout et pour faire bien kitch, voici une petite mise en scène histoire de renforcer les préjugés :
Fine, extra-basse et extra-longue, la VT 1300 CX Fury, avec sa fourche démesurée et son gros bycilindre de 1’312cc reluisant au possible, le tout logé dans un cadre Chopper (squelette), s’émancipe des standards du premier constructeur mondial et vous fait découvrir Honda sous un autre jour que celui du Soleil levant.
Pour les puristes, les vrais,- les bikers quoi ! -, les Customs Made in Japan sont souvent assimilés à des copies de Harley-Davidson et subissent comme principaux reproches de manquer de personnalité et d’afficher un caractère trop aseptisé, sans vibration, sans sonorité.
Avec cette VT1300CX, Honda a tapé fort et se démarque résolument de ces clichés de moto copiée, bien que l’inspiration s’en rapproche fortement.
Esthétiquement réussie avec son cadre qui n’en finit plus, son réservoir en forme de goutte d’eau, sa selle culminant à 67,8cm du sol, son cardan intégré au bras oscillant, son radiateur situé entre les tubes du cadre à tel point que ce dernier se fond dans la masse, car même ses durites sont dissimulées sous les carters en plastiques chromé – « Warning » – qu’ai-je oui de dire ?! Des plastiques chromés ?! Eh oui, le parfait tableau que je viens de dessiner vient de s’effondrer spontanément. Les chromes rutilants qui composent cette moto sont en grande partie en plastique. Vous me direz que ceci n’a que peu d’importance du moment que la tenue dans le temps soit bonne, mais j’aurais tout de même préféré du bon vieux métal ayant subit un chromage en règle.
Les plus fins limiers apercevront, ou non, la dissimulation quasi-parfaite de tous les fils électriques ou autres câblages ; un bon point pour les pointilleux du détail.
Une fois en selle, tout tombe parfaitement sous la main et sous les pieds ; étonnant lorsque l’ont voit où se trouvent les reposes-pieds. Tout en avant, le guidon reculé, l’assise basse, au final, la position est des plus naturelles. Moi qui angoissait quelque peu à l’idée de devoir avaler des kilomètres dans cette position, me voilà rassuré et prêt à démarrer.
La mise en marche se fait conventionnellement. Le son sourd et grave bercera vos oreilles et vous évitera d’éventuels maux de crâne dont souffrent les bikers propriétaires de modèles Harley-Davidson déchicanés.
En ville, il faudra être patient et oublier vos remontées de files intempestives. La VT1300CX n’est pas la compagne idéale pour ce genre d’exercice ; la faute est à son empattement et à son angle de chasse très important. Le rayon de braquage ne vous permettra pas de corriger ce souci de maniabilité urbaine. Vous l’aurez compris, cette moto n’a rien à faire en ville, sauf si vous voulez cruiser au bord du lac et jouer les garçons de café.
Une fois sortie du chaos urbain, la moto se sent immédiatement à son aise et se conduit facilement, le tout avec un feeling impressionnant de facilité. Les grands espaces sont définitivement faits pour elle.
Oubliez vos repaires habituels, sa conception n’est pas celle d’une sportive ou d’un roadster et vous vous retrouverez rapidement avec des étincelles aux talons. La garde au sol extra-basse ne vous permet pas de rouler vite et les câles-pieds vous le rappellerons rapidement. Je vous le concède, cette moto n’est pas faite pour ça ! Toutefois, vous pourrez adopter un rythme dynamique grâce à un cadre rigide et des éléments de suspension bien choisis. Le freinage est suffisamment puissant pour vous stopper rapidement en toutes circonstances. Pour ce dernier, je me suis senti plus à l’aise avec le frein arrière qu’avec l’avant ; l’arrière me paraissant plus approprié à ce genre de conduite.
Le bicylindre doté d’ailettes généreuses, qui donnent l’illusion d’un bloc refroidi par air comme la concurrence, propose 58cv fort de 107Nm et se marie parfaitement avec la philosophie de la VT1300CX. Le moteur est performant, souple, linéaire et ne gênera que de peu de vibrations. Vous pourrez cruiser sans arrières-pensées. La moto reprend très bien dès les plus bas régimes. Ce Chopper vous incitera à de longues balades.
Ce dernier souffre un peu d’un manque de chevaux lorsque l’autoroute s’impose. Il faudra vous caler à vitesse légale et ne pas chercher à faire des dépassements téméraires. De toute manière, passé 130km/h, vous fatiguerez rapidement. L’absence de protection sur ce genre de machine ne laisse pas la place à des excès de vitesse ; vous pourrez ainsi garder votre permis encore un bon nombre d’années.
Si, au départ, j’étais réfractaire à ce genre de moto, après plusieurs centaines de kilomètres, j’ai finalement apprécié pouvoir me déplacer différemment. La Cruiser attitude a donc pris le pas sur le possesseur de sportive que je suis. Pouvoir profiter du paysage avec une position de conduite confortable, ne pas se stresser à cause d’un éventuel excès de vitesse n’a pas de prix ! Seul problème, les regards incessants des passants et caisseux en ma présence devenaient insupportables… après tout, n’est-ce pas non plus un des buts de la Fury ? Laissez votre Harley - pardon Honda ! - un instant sur une terrasse et elle disparaîtra sous une foule de curieux qui chercheront un bon moment avant de découvrir que cette moto si exclusive n’est qu’une Honda.