Excédé de voir la même photo d’un motard pris en grand excès de vitesse par le radar installé le long de la D 943 à Annezin, le Centre automatisé de constatation des infractions routières a demandé aux gendarmes d’identifier le pilote. Un motard qui, entre fin septembre 2014 et décembre 2015 a fait crépiter 156 fois l’appareil, avec un record au-delà des 240 km/h sur une route à 90. Parce que pour eux, impossible de l’identifier : le radar flashe par l’avant et les motos n’ont une plaque qu’à l’arrière…
Les gendarmes du peloton motorisé de Béthune ont mis en place des surveillances en début de soirée – le motard a toujours été pris vers 21 h – jusqu’à intercepter un motard qui pouvait correspondre mais qui, ce jour-là, n’a pas déclenché le radar. Ce quinquagénaire qui habitait à Lapugnoy a deux motos – une Kawasaki ZX10R et une Yamaha R6 – pouvant correspondre, ses horaires de travail collent avec les heures des infractions et quand il est en arrêt de travail, en mars 2015, aucune infraction n’est relevée. Suffisant pour le Parquet pour le poursuivre.
Aujourd’hui installé dans le Var, Éric est revenu dans le Béthunois pour s’expliquer. Pour répéter qu’il nie être ce fameux motard : « Je leur ai expliqué que ce n’était pas moi. Ils cherchaient une moto noire, j’ai une moto noire. Sans faire d’humour, pour eux, noir c’est noir… », explique-t-il au juge. Oui, il est motard, jure-t-il en glissant que s’il avait eu des envies de vitesse, il n’aurait pas multiplié ses « pointes » au même endroit : « Je ne suis qu’un motard, mais j’ai quand même un quotient intellectuel ! ». Lui pense qu’« on cherche un coupable. Je suis passé au mauvais endroit au mauvais moment ». Pourtant, la procureur maintient ses accusations face à ce qu’elle qualifie de « mauvaise foi ». Les motos, les tenues, des horaires, l’itinéraire correspondent. Et chaque excès de vitesse mérite une amende, de 50 ou 100 € selon la vitesse retenue. Ce qui, avec le nombre d’infractions, représente environ 15 000 € d’amendes (sans compter le permis qui sautera automatiquement).
Mais Me Sylvie Vantroyen, qui a d’abord relevé des exceptions de nullité sur la validité technique des contrôles et sur la procédure qui qualifie insuffisamment les faits, estime qu’il n’y a « aucune certitude dans ce dossier. Ce n’est pas à moi d’apporter la preuve de mon innocence ! ». Se demandant pourquoi les autorités ont attendu si longtemps pour arrêter « ce fou dangereux » qui passe toujours sur la même route, l’avocate attend des preuves que son client est bien ce motard et plaide la relaxe. Qu’est ce qui ressemble plus à un motard casqué avec un blouson de cuir sur une grosse cylindrée noire qu’un autre motard ? Le juge a mis sa décision en délibéré. Réponse le 26 janvier.