Roadbook publié le 27 août 2015

Sibérie Extrême - Episode 3 : la BAM Ouest [page 2]

Texte de David Zimmermann / Photo(s) de David Zimmermann

Pages

Les pistes sont devenues boueuses et très glissantes, on progresse à 50km/h maxixum. On affronte également les premiers ponts en bois. Nombreux et pourris pour la plupart, ils sont extrêmement glissants et il faut souvent tout d’abord les traverser à pied pour repérer si on peut les passer à moto. Parfois il manque un morceau ou il y a de gros trous au milieu. Dans le cas contraire, traverser la rivière là où les camions passent. Et le choix n’est pas toujours facile, parce que bien évidemment, loi de Murphy oblige, les ponts les plus pourris se trouvent là où les rivières sont les plus difficiles à traverser.

Après avoir roulé la plus grande partie de la journée sans rencontrer âme qui vive, on tombe sur un 4x4 en panne... Il n’y a pas de réseau téléphonique et les gars sont bloqués ici depuis ce matin. Grâce au téléphone satellite de Ian, ils font un appel et semble-t-il que quelqu’un va venir les chercher... Pas le moins du monde stressé à peut-être passer la nuit ici, ils nous souhaitent une bonne route.

On arrive en début de soirée à Taksimo, complètement frigorifié et trempé.

J’entre dans le premier hôtel et quelle ne fut pas ma surprise, une fois n’est pas coutume, de tomber sur deux jeunes et charmantes réceptionnistes ! Je les aborde avec mon plus beau sourire et mon meilleur accent russe possible pour leur demander si elles ont de la place pour nous. Elles me répondent d’un ton glacial à faire geler la flotte qu’il y a dans mes bottes depuis ce matin : "Non, c’est plein !", sans même dédaigner bouger la tête de dix degrés dans ma direction ni même faire un sourire de politesse.

Plouf, plouf, plouf, font mes bottes quand je quitte cet hôtel...

Par chance, on trouve un second hôtel, avec une bonne vieille matrone comme il y a habituellement dans les hôtels russes.  Elle nous accueille chaleureusement dans son petit hôtel au troisième étage d’un vieil immeuble sans ascenseur. Mises à part les deux tortues qui se promènent librement dans le hall de la réception, nous sommes les seuls clients, ce qui n’est pas une surprise en soit. Quelle personne sensée viendrait de son plein gré dans cette ville ?

La douche chaude fut la bénédiction de la journée et Ian s’y est précipité en premier avant même de monter tout son matos. Rouler une journée entière avec de l’eau dans les bottes, je peux vous assurer que ce n’est pas bien beau quand finalement on sort les pieds. Ils sont bleu-gris et l’odeur (ouch!) qui ressemble à de l’eau qui a stagnée dans des égouts pendant quelques mois…ou un truc du genre, quoi. Je n’avais pas trop pris la peine de regarder ma tronche dans le rétroviseur, mais j’étais couvert de boue jusqu’aux sourcils... C’est peut-être pour ça que je n’ai pas trop eu de succès au premier hôtel...  Parce que, franchement, ne trouvez-vous pas ça bizarre qu’un hôtel soit complet dans le trou du cul du monde ? Hein ?

On trouve un café, le seul café, dans la gare où l’on mange une soupe chaude et quelques pilmenii réchauffés au micro-onde. Cerise sur le gâteau, j’hérite du lit king-size et les deux autres dorment sur des canapés, parce qu’aucun des deux ne voulait partager le lit avec un gars ! Du coup, j’ai fantastiquement bien dormi.

Le pont Vitim et notre plus grosse frayeur...

Le onzième jour, tandis que la pluie battante se fait entendre sur les fenêtres, ni Ian, ni Uwe ne semble vouloir se lever, et moi je suis déjà réveillé depuis belle lurette... Moi qui croyais que les vieux ne pouvaient pas dormir le matin, ça n’est en tout cas pas le cas de ces deux !

Je les réveille et on discute la possibilité de rester un jour de plus ici, en attendant que la météo se calme. Mais personne n’a vraiment envie de rester dans ce trou où il n’y a de toute façon rien à faire.

Commencer une journée en mettant ses pieds dans des bottes mouillées, c’est un peu comme le moment où l’on passe le cap critique des testicules dans l’eau quand on se baigne dans un lac à 16°C...  Difficile sur l’instant, mais après ça, on est prêt à affronter n’importe quoi. Et c’est tant mieux puisque la pluie arrête de tomber !

On a roulé la première partie de la journée en compagnie de Sergei, un chauffeur de camion, qui nous suivait avec son Ural. A plusieurs reprises, on a voulu le laisser passer devant, lorsqu’on était bloqué devant un pont pourri ou une rivière, mais il se contentait de nous dire qu’il restait derrière, au cas où on aurait un problème. En général, il allumait une clope et nous regardait en rigolant traverser les rivières avant de sauter dans son camion et de poursuivre.

Une des choses qui a rendu la BAM si mythique au sein de la communauté des motards aventuriers, c’est le fameux pont traversant la rivière Vitim. L’ancien pont ferroviaire fait 570 mètres de long et 15 mètres de haut. Il n’a pas de barrières et est juste assez large pour qu’un véhicule puisse le traverser à la fois. Probablement chaque personne qui l’a traversé a posté sa vidéo sur YouTube. Il y a notamment Iker, ce champion de motocross basque cinglé devenu célèbre pour avoir établi le record de vitesse en le traversant à fond à plusieurs reprises sur sa KTM 950 Adventure (voir la vidéo).

Ce qui est certain, c’est que ce n’est pas de sitôt que quelqu’un va battre son record et ça ne sera certainement pas nous, simples mortels !

Au détour d’un virage, on se trouve enfin face à la bête. L’effet est encore plus impressionnant puisqu’on roule constamment dans la forêt et que tout à coup, on se retrouve face à cette immense rivière. Qu’est-ce qu’il est long ce pont ! Un mélange de peur et d’excitation me prend aux tripes.

Le pont Vitim, c’est la raison principale qui m’a motivé à tenter la BAM. Et là, je me retrouve face à lui ! C’est difficile d’expliquer avec des mots cette sensation. Ian se décide à y aller en premier, et après quelques minutes quand il atteint l’autre berge, c’est Uwe qui le suit. Au milieu du pont, il y a soudain un changement de niveau et Uwe manque de trébucher, mais se rattrape de justesse. Ouf ! J’ai serré les fesses pour lui !

Pages de l'article :

Pages

AcidTracks 2019 - Organisation de sorties pistes

Suivez AcidMoto.ch !

Plus d'articles Moto

On a essayé la Yamaha R7 Turbo - Vidéo
Le garage GBK Motos nous a offert la chance unique d'essayer leur Yamaha R7 Turbo encore assez tôt dans son développement. Suivez-nous au Circuit de Bresse fin Mars pour une prise en main.
Fin de la phase d'essais réels de la Triumph TE-1 - Les résultats
Le projet anglais de moto électrique porté, pas seulement par Triumph, mais par un groupe d'industriels majeurs du secteur vient d'achever sa phase de tests réels. Le constructeur livre des chiffres concrets sur le projet.
BMW Motorrad Days 2022 : Le must de BMW
Le 1er week-end de juillet, nous avons été conviés aux BMW Motorrad Days à Berlin. Au programme: visite de l’usine, salon BMW, beaucoup de customs, de la musique live et une atmosphère unique. Récit.
Préparez-vous pour le 5e Rallye du Cromwell Moto-Club le 2 octobre 2022
Depuis 2016, le Cromwell Moto-Club propose à une vingtaine d'équipages de rouler toute une journée ponctuée de postes où des surprises les attendent. Après 2 annulations, rendez-vous le 2 octobre 2022 !
Bilan après 4'400 km en Aprilia Tuareg
4'400 km dont 2'000 km de tout-terrain par des températures allant de 6°C à 34°C, avec de la pluie, de la boue, des étapes de plus de 12 heures à son guidon dont une étape autoroutière marathon de 1’000 km, c’est ce qu’on a infligé à la nouvelle Aprilia Tuareg 660 durant les 9 jours de ce test extrême. Le tout en traversant 8 pays.
11ème édition de la Rétro Moto Internationale de St-Cergue ce samedi – L’appel du 18 juin
La 11ème édition de la Rétro Moto Internationale (RMI) de St-Cergue aura lieu ce samedi 18 juin 2022. Venez nombreux!

Hot news !

Essai Ducati Multistrada V4S Full - Un 4 cylindres addictif mais qui se mérite
C’était la nouveauté de l’année 2021 pour Ducati : une Multistrada propulsée par un moteur baptisé Granturismo. Le côté extraordinaire de ce moteur, c’est qu’il a 4 cylindres en V. Plus petit et plus léger, plus puissant en même temps. Difficile de dire non !
Essai Yamaha R7 - Attachante et efficace
Pour entrer dans le monde de la moto, nombreux sont ceux qui cèdent aux sirènes de la sportive. Reste qu’à 16 ans c'est 125cm3 et à 18 ans, 35kW, pas plus. Débarque sur le marché une nouvelle R7, qui veut bousculer la concurrence.
Yamaha Ténéré 900 – Une grande sœur pour la T7
Yamaha entend combler le vide laissé dans sa gamme par la Super Ténéré. Bientôt une Ténéré 900 ? Il semble bien que oui.
Triumph Street Triple RS-(RR ?) 2023 - Dorée à l'Öhlins
La Triumph Street Triple RS ne souffre d’aucun défaut et représente même le summum de sa catégorie. Mais voilà, pour les ingénieurs d’Hincley, apparemment, ça ne suffisait pas.
Présentation de la gamme Yamaha 2022 à l’anneau du Rhin
AcidMoto a été invité à l’anneau du Rhin par l’équipe Hostettler pour la présentation de la nouvelle gamme moto Yamaha. C’était durant cette fameuse journée où les nuages nous lâchaient une pluie teintée de sable du Sahara, donc un défi durant les essais.
Essai vidéo - Triumph Tiger 1200 GT et Rally Pro
À l'occasion de l'essai de la Triumph Tiger 1200 modèle 2022, nous avons roulé une journée sur la route et une journée en tout-terrain.