Carnet de voyage(s) - Les essais presse à l’heure de la Covid-19…

« Ce n’est pas agréable mais ça ne fait pas mal », me glissa l’opératrice, tandis qu’elle enfonçait l’écouvillon dans ma narine gauche. Protégée par un masque FFP2, une charlotte, des sur-lunettes, une combinaison intégrale et des sur-chaussures, son geste est rapide et sûr. Quelques secondes plus tard, c’était fini.

Je la regardai longuement, pensif, tandis qu’elle plaçait l’échantillon dans le tube, en refermant ce dernier délicatement. Presque machinalement. On se croirait dans un mauvais film catastrophe. Sauf que nous sommes sur les rives du lac de Neuchâtel. En décembre 2020. Trois lignes matérialisant les voies de circulation, des préposés qui vous guident vers les postes de prélèvements libres. Oui, nous sommes au Drive-in de Yverdon-les-Bains… Et demain, si tout va bien, je roulerai vers l’aéroport de Zürich.

La nuit dernière, je n’ai pas beaucoup dormi. Pas bien dormi du tout.

Sur le trajet du retour, je fus assailli de questions, soudain bombardé de doutes.

Et si, malgré toutes les précautions, malgré le port du masque à en avoir le visage qui gratte, malgré les gestes barrières depuis des mois et des mois, et si tout cela n’avait servi à rien ? Faire tout ceci pour, au final, ne plus pouvoir partir? Trois heures plus tard, le verdict tombe… "Test négatif". Ou la promesse d'un voyage, et l'excitation de pouvoir tester une toute nouvelle moto.

Appli de traçage téléchargée, inscription au ministère espagnol de la santé faite et QR code reçu comme un précieux sésame, résultat du test en poche, me voilà fin prêt. À quoi au juste? Nous sommes début décembre 2020, en plein dans la seconde vague qui frappe l’Europe. On est préparé. À quoi au juste ? Et puis à quoi bon, est-ce bien nécessaire tout cela ? Les consignes sont strictes et les règles, claires. Et c’est le prix à payer pour participer au lancement mondial d’un modèle sur lequel un constructeur britannique mise beaucoup… Se protéger, protéger les autres.

Vendredi, fin d'après-midi. La neige tombe, humide et drue, tandis que je sors enfin des confins de Lausanne. Par endroits, elle commence même à tenir sur la chaussée. Les premiers panneaux indiquant « Berne » puis « Zürich » me sautent à la figure. La nuit est tombée, et l’excitation monte en moi. Graduellement… Demain dès l’aube, je m’envolerai.

Et nous volerons vers le royaume de Neptune, quelque part sur une île volcanique au nom d’oiseau et située au large de l’Afrique occidentale…

Oubliés les tracas. Loin derrière moi, les clameurs de la ville. Et devant, loin devant, la promesse d’un bel essai et des paysages somptueux. Faire connaissance. Moi et la moto. Faire corps. La moto et ma pomme. Et encore plus loin, loin devant, au-delà de l'horizon courbe, l’écume de mes jours.