
Il est 9 heures, ce jeudi, au Smur de Périgueux. Les médecins régulateurs viennent de recevoir un appel faisant état d’une personne âgée domiciliée à Biras se plaignant de douleurs thoraciques. Un symptôme peut-être révélateur d’un malaise cardiaque. Immédiatement, une équipe médicalisée du Samu se met en branle. Deux médecins se munissent de combinaisons et de casques de moto et enfourchent les deux grosses cylindrées pilotées par des motards chevronnés qui, déjà, traversent l’agglomération en faisant à l’occasion hurler les sirènes bi-ton pour se frayer un passage dans la circulation. Rapidement sur place, les médecins prodigueront les premiers soins et le malade sera évacué par un véhicule du Samu au service des urgences du centre hospitalier.
Pour le docteur Michel Gautron, responsable du département de médecine d’urgence à Périgueux, cette intervention est représentative de l’avantage que pourrait apporter l’utilisation de motos Samu dans les secours périgordins. "Nous les avons testées pendant trois jours. Lors de cette expérimentation, nous avons constaté que les motos nous permettaient de nous extraire de la circulation, et donc d’intervenir plus rapidement. Par rapport à un véhicule classique, nous gagnons des minutes précieuses, notamment quand la détresse vitale d’un patient est engagée."
Durant les trois jours d’expérimentation réalisée en lien avec l’entreprise ECB (Emergency City Bike), les motos Samu ont effectué trois sorties. "Il s’agissait de détresses cardiaques, ce qui est notre quotidien en Périgord, souligne le docteur. Or, pour ce type de pathologie, un gain de temps, c’est un gain de vie." Lundi, les motards ont aussi servi d’escorte à l’ambulance du Samu transportant un malade vers le service des urgences. Le trajet a pu être réalisé en un temps record.
On serait donc loin du gadget. Les motos, une Honda Goldwing et une BMW R1200GS jaune fluo, sont d’ailleurs équipées d’un matériel médical dernier cri. Elles renferment dans leur coffre un scope faisant à la fois fonction de défibrillateur et de tous les outils nécessaires à la surveillance des paramètres vitaux du patient comme le pouls, la tension artérielle, la fréquence respiratoire, l’activité cardiaque et la saturation du sang en oxygène.
"En fait, nous avons le même matériel que dans les services de réanimation", explique Jean-Paul Blanchard, un médecin du Samu qui participe à l’expérimentation avec Raymond Loizeaux, responsable de la société ECB. Estimant le test concluant, le docteur Michel Gautron va rédiger un rapport à destination du préfet, de l’Agence régionale de l’hospitalisation et du centre hospitalier afin d’inclure les motos dans l’équipement de base du Samu. Bien entendu, précise le médecin, il ne s’agira pas de remplacer les véhicules existants, comme les ambulances ou l’hélicoptère, mais de compléter cette flotte. Il n’empêche qu’à terme, le responsable imagine très bien qu’un jour un équipage constitué d’un pilote formé aux premiers secours et d’un médecin du Samu parte à deux sur une intervention. Reste à savoir si les autorités suivront.
La Suisse en prendra-t-elle de la graine ?