Quarante ans plus tard, on entend par trail une machine technologiquement ultra équipée, puissante, roulante et en plus confortable. Tout cela à la fois et souvent au détriment du poids, car on a des motos qui dépassent facilement les 220 kg. On est décidément loin de la ligne et de l’esprit de ses illustres ancêtres. Il semble même que presque tous les constructeurs aient tiré un trait sur l’esprit des trails d’origine, préférant peut-être miser sur des points comme celui du confort. Tous ? Non. Un constructeur italo-chinois résiste encore et toujours à l’envahisseur et propose avec sa série Caballero de véritables petites pépites rétro.
Ce constructeur, vous l’avez déjà compris, c’est Fantic. Et les plus avertis d’entre vous ont déjà entendu ce nom. Née en 1968, la marque a toujours misé sur le « off-road ». D’ailleurs la Caballero première du nom, dont l’actuelle s’inspire beaucoup, voit le jour en 1969 et fait un véritable tabac auprès des jeunes motards italiens amateurs d’enduro de cette époque. Bref, j’ai donc toutes les raisons d’être très curieux d’essayer cette nouvelle Caballero « rally edition ».
Osée mais sobre
Je récupère la moto à dix minutes de Soleure, chez l’importateur exclusif pour la Suisse. Une occasion pour moi au retour de découvrir des nouvelles routes et de charmants coins, comme la bourgade de Büren an der Aare, et son pont de bois où je fais une halte café. La première chose qui me frappe sur la Caballero est indubitablement sa couleur : vert militaire et jaune citron. Franchement osé, comme mélange ! J’étais loin d’imaginer trouver ces tons mais je dois avouer que je suis conquis et les badauds autour de moi aussi, apparemment. Comme c’est une moto sans chichis qui se présente vraiment dans son plus simple appareil, la couleur passe d’autant mieux et lui donne vraiment du caractère. La plaque jaune sur le côté ne laisse pas l’ombre d’un doute : on a bien affaire à une édition rally.
Côté éclairage, tout est en LED sauf les clignos. Le phare avant et le petit feu arrière, ronds tous les deux, apportent une touche rétro et les 4 clignos halogènes sont assez discrets, de bon goût donc et plutôt cool pour cette gamme de prix. Les platines de repose-pieds et les tés de fourche taillés dans la masse me font penser à des pièces de prototype de course. De belles pièces ! Autre point positif, la double sortie d’échappement Arrow, qui est simplement magnifique. J’ajoute encore la selle, assez fine et bien dessinée et j’affirme sans conteste qu’il s’agit d’une moto bien proportionnée, agréable à l’œil, sobre. La classe, quoi, avec des finitions tout à fait correctes pour cette gamme raisonnable de prix.
Facile à emmener
Le son de l’échappement me fait plaisir. Déjà au ralenti, le bruit du moteur est dynamique et bien vivant pour une moto moderne. Au guidon, elle s’avère rapidement ultra légère et maniable. Oui, vraiment, dans les virages des routes secondaires, la Caballero s’avère très facile à emmener, je prends plaisir à sortir la jambe et j’ai déjà la banane sous mon casque après seulement quelques minutes au guidon. Très agréablement surpris, donc, de trouver en 2021 une moto aussi maniable et légère. Et comme le grand guidon et la selle assez haute permettent d’avoir une position bien droite et agréable. Certes, je n’ai pas connu l’époque des XT500 et ne peux pas en être nostalgique mais il me vient l’idée d’avoir affaire à ce qu’on appelle un « gromono » à l’ancienne.
Punchy et plaisir
Le moteur, maintenant. Disons qu’il est plutôt punchy même si assez vite limité. En ville et sur les petites routes de campagne, on a un agréable monocylindre qui offre une bonne reprise, avec un échappement qui a des petits retours sympathiques. Mais qu’on ne se méprenne pas, la Fantic est une moto qui se conduit au couple, inutile donc d’aller chercher la puissance haut dans les tours. A vous de jouer de la boîte de vitesses pour tirer le meilleur parti du moteur. Mais en tout cas rouler à 120 km/h plus de 10 minutes, je le déconseille absolument. Je l’ai testé à regret. Non seulement c’est fatigant mais un peu flippant. Le moteur n’est clairement pas adapté pour ce type de conduite et ça se sent.
Mon sourire disparaît lors du freinage. Rien à redire sur le frein arrière, mais à l’avant, le maître-cylindre ne renvoie pas un bon feeling. Si je suis lancé à pleine vitesse, il y a bien du mordant, mais à basse vitesse en résulte un freinage saccadé. globalement c’est difficile de doser et pas très rassurant. Point positif en revanche, l’ABS arrière est déconnectable, ce qui est indispensable pour qui aimerait emmener la machine sur des chemins en terre. Les suspensions sont correctes et le confort est là pour l’essai routier qui est le mien. Toutefois à l’avant je soupçonne que plusieurs réglages seront nécessaires pour qui veut s’adonner à du cent pour cent tout-terrain.
Petit détail moins convaincant : la jauge à essence, qui est un peu comment dire…fantaisiste. Elle descend vite, se met à clignoter. Je me fais une frayeur car je n’ai pas de station avant une quinzaine de kilomètres. Mais voilà que la jauge cesse de clignoter et reprend. Et quand enfin je refais le plein, je constate qu’il restait en réalité environ deux litres (sur les 12 litres totaux du réservoir). J’ai compris ! La jauge pèche par excès de prudence et ne reflète pas précisément la consommation réelle de la moto. Globalement, sachez-le, vous pourrez sans crainte effectuer environ 215 kilomètres. Mais bon, une jauge plus précise n’aurait pas été de refus !
Je pardonne tous les petites imperfections au niveau châssis et électronique car au final le plaisir au guidon autre que la vitesse ! est tel que la Fantic Caballero rally est un de mes coups de cœur de cette année.
Et le plaisir de conduite finalement, c’est le primordial, non ?