BMW über alles
D’ici la fin de cette année 2021, BMW s’attend à célébrer un nouveau record de ventes avec près de 140'000 motos déjà écoulées jusqu’en août. Les objectifs sont clairs : Être la marque moto premium numéro 1 au niveau mondial. Rien que ça ! Après avoir lancé avec succès les R18 et R18 Classic en 2020 (4'000 ventes), la marque bavaroise dévoile aujourd’hui les R18 B et R18 Transcontinental. Ces deux nouveaux modèles également motorisés par le plus gros boxer de tous les temps, sont prêts pour en découdre avec leurs concurrentes américaines.
Le Bagger et le Cruiser à la sauce bavaroise
Avec la R18 B (pour Bagger) et la R18 Transcontinental, BWM s’attaque directement au marché des gros cruisers, un des seuls segments où les bavarois n’étaient pas présents. D’ailleurs, le lancement presse était initialement prévu au USA. Les frontières étant toujours fermées, l’évènement a été déplacé à Frankfurt. C’est moins exotique, mais au moins on a droit à un évènement!
BMW a réussi le pari de construire deux modèles répondant parfaitement aux codes stricts de cette catégorie de mastodontes à l’américaine tout en préservant l’ADN de la marque à l’hélice. L’immense et magnifique « Big Boxer » de 1800 cm3 ne laisse aucun doute quant à la provenance de la R18. Vous le saviez peut-être déjà, mais la R18 est un hommage à la mythique R5 de 1936. Celle-ci était dépourvue d’amortisseur à l’arrière. Tout comme sur les R18 et R18 Classic sorties l’an passé, BMW a voulu respecter au mieux l’esthétique de la R5 dont la R18 est un hommage. Afin de donner l’illusion que le cadre arrière est de type rigide, le mono-amortisseur est complètement caché sous la selle. Très réussi.
Même s’il n’y paraît pas au premier coup d’œil, le cadre des deux nouvelles R18 diffère des deux premiers modèles. La stabilité a été améliorée, tout comme la possibilité de prendre quelques précieux degrés supplémentaires d’angle en courbe. La transmission finale par cardan est ouverte, comme sur les modèles produits jusqu’en 1955. Un sympathique et esthétique clin d’œil au passé.
Tout respire le luxe sur cette moto. Des finitions magnifiques du moteur en passant par la peinture, les chromes jusqu’aux petits détails esthétiques comme les logos « Berlin Built » sur les couvercles des bocaux de frein, d’embrayage ainsi que sur les cadrans analogiques de l’imposant tableau de bord, rien ne semble avoir été épargné. Avec un prix de départ de 28'520 CHF pour la version B et de 29’520 CHF pour la Transcontinental, il est clair qu’elle s’adresse à une clientèle exigeante.
Du choix des caches-culasses usinés dans la masse au type de jantes en passant par le nombre de haut-parleurs, il y a tellement d’options disponibles pour ces deux modèles que je ne vais même pas aborder le sujet ici. Le plus simple pour les intéressés est d’aller directement sur le configuration BWM pour les versions B & Transcontinental pour voir en temps réel les modifications sur la moto et tout à la fin, la facture totale qui peut allègrement dépasser les 40'000 CHF en fonction de vos choix…
En selle Simone!
Au moment de remonter la béquille, les 400 kg de la Bagger ne sont pas finalement si déroutant que ça, notamment grâce à une hauteur de selle de seulement 720 mm, mais surtout au centre de gravité très bas du moteur boxer. Quand le Big Boxer de 1802 cm3 se met en branle au démarrage on sent très bien l’effet de son couple de renversement. C’est la première fois que je pose mon cul sur une moto de ce type, et il me faudra bien quelques kilomètres pour prendre mes marques.
C’est impressionnant, elle est tellement immense que j’ai l’impression d’être « dans la moto ». Ma plus grande crainte, au début, concernait la garde au sol limitée de ce type de moto, et donc je prends mes premiers virages avec précaution avant qu’on atteigne l’autoroute. La position à son bord est hyper relaxe aussi bien pour les bras que les jambes. La visibilité est également un peu déroutante par rapport à d’autre types de moto, avec ce gigantesque tableau de bord qui occupe une bonne partie du champ de vision. Une fois mes repères pris, je dois dire que j’ai beaucoup aimé être au guidon de la R18 B. L’itinéraire choisi par BMW privilégiait les grandes courbes, là où la R18 est le plus à l’aise car malgré ce que l’on penser, elle prend quand même un peu d’angle. Il faut juste ne pas aller trop vite dans les courbes serrées.
Le moteur, bien qu'il ait une cylindrée impressionnante est un modèle de douceur. Il reprend dès 1'500 tr/min sans trop de vibrations et son régime de prédilection se situe entre 2'000 et 3'000 tr/min. A 2'000 tr/min, il fourni déjà 150 Nm et atteint son couple maximum de 158 Nm à seulement 3'000 tr/min. La puissance maximale de 91 CV est atteinte à 4'500 tr/min. Vu le poids de la bête, les accélérations sont correctes mais sans être impressionnantes. Celui qui cherche les performances pures ne se dirigera pas vers ce genre de moto. Le confort de la selle est bon, mais passés les 200 km je commence lentement à sentir mes fesses. A la fin du tour, après 270 km, j'ai consommé une moyenne de 6 l/100 km. Avec son réservoir de 24 litres, on obtient une autonomie confortable de 400 km.
La maniabilité à basse vitesse
Lors des sessions photos, nous avons dû faire de nombreuses manœuvres pour faire demi-tour sur la route. Quand on est presque à l’arrêt, il faut faire attention à ne pas trop braquer, on se fait vite surprendre par le poids de la bête. J’ai également pu tester la marche arrière à une occasion, une option à 1'140 CHF. La moto doit être au point mort avec le moteur en marche. Il faut ensuite actionner le levier situé au dessus du sélecteur de vitesse, puis utiliser le bouton de démarrage pour reculer. C’est le démarreur qui entraine la marche arrière, comme sur d’autres motos de cette catégorie.
Dans 99% des cas, vous n’en aurez probablement pas besoin, car quand on arrive avec une moto de 400 kg, on prête attention à ne pas se retrouver en fâcheuse posture. Mais dans le 1% des cas, en particulier si vous êtes seul, elle peut s’avérer vital. Ne pensez pas pouvoir poussez la moto par vous-même sur un faux-plat !
3 modes de conduire : Rain, Roll et Rock
La R18 possède 3 modes de conduite. Après le mode « Rain » que je n’ai pas essayé, on trouve le mode « Roll ». La puissance arrive de façon très douce et progressive. Le moteur distille relativement peu de vibrations en dessous de 4'000 tr/min. C’est le mode idéal pour cruiser confortablement.
En mode « Rock » la différence est palpable déjà au ralenti. Le moteur vibre plus. La réponse à la poignée de gaz est également beaucoup plus directe. Ça tracte immédiatement et la cavalerie débarque mais sans jamais qu’on se sente dépassé. La puissance et le couple du Boxer de 1802 cm3 conviennent tout à fait à ce genre de moto et si l’on regarde les fiches techniques de la concurrence, on se trouve dans le même ordre de grandeur. Les américains ont un petit avantage au niveau du couple, mais par rapport au V2 le boxer offre le gros avantage technique qu’il ne vous grille pas les œufs. J’ai senti aucun dégagement de chaleur en roulant, même lorsque nous étions arrêtés aux feux.
Après avoir posé la question à l’un des ingénieurs de chez BMW présent à l’évènement, il m’a confirmé qu’en mode « Rock » l’allumage est réglé différemment pour que le moteur soit plus « vivant ». Si les vibrations sont présentes sur un peu près toute la plage de régime, en particulier en phase d’accélération, je ne les ai pas trouvées désagréables et ça colle parfaitement avec ce style de moto. On veut sentir qu’on a un bon vieux moteur à explosion entre les jambes non ?
Niveau sonorité, on retrouve le son grave typique du boxer. Il est peut-être plus grave que celui du 1250 mais pas vraiment plus fort. Les habitués des choppers aux échappements évidés vont être déçus. On l’entend bien en phase d’accélération, mais il reste relativement discret à vitesse constante. L’avantage est que vos voisins ne vont pas vous détester à chaque fois que vous la mettez en marche.
Sa boite de vitesse est un modèle de souplesse tout comme son embrayage à sec à un disque. Celui-ci est pourvu pour la première fois d’un système anti-dribble, afin d’éliminer tout blocage de la roue arrière causé par l’important couple moteur en cas de rétrogradage.
Freinage combiné
Le freinage est de type combiné. Vous pouvez freiner que de l’avant ou de l’arrière ou même des deux, mais c’est le calculateur de la moto qui répartira correctement la proportion de freinage entre l’avant et l’arrière. Là aussi, je dois dire que pour un monstre de 400kg, ça freine carrément bien.
Une sono Marshall
Un cruiser se doit d’être équipé d’une sono digne de ce nom, afin de pouvoir profiter de sa musique préférée en conduisant tout en s’assurant que toute personne qui croiserait notre route puisse apprécier (ou subir) nos goûts musicaux…
BMW s’est associé avec la fameuse marque d’amplis Marshall pour sonoriser ses deux nouveaux modèles. Si les guitaristes se sont un peu détournés de Marshall ces vingt dernières années (note de la rédaction: David est aussi musicien), il faut avouer que depuis 2012 la marque anglaise a très bien réussi sa transition dans le domaine « grand public » avec ses casques audios, frigos et enceintes Bluetooth au look soigné rendant hommage à leurs dynastie d’amplis. Un bon point pour BMW, le petit logo Marshall sur les haut-parleurs ça fait classe et ça convient parfaitement avec l’esprit du genre.
Le système audio de base des deux nouvelles R18 est composé de deux haut-parleurs sur le tableau de bord auquel on peut ajouter l’option stage 1 à 870 CHF qui consiste en une paire de subwoofer de 90W intégré dans les valises et l’option stage 2 à 1’400 CHF pour la transcontinental qui ajoute une paire supplémentaire de haut-parleurs pour le passager dans le top-case.
C’est la première fois que je me retrouve au guidon d’une moto pourvue d’une sono et je ne vous cache pas que j’avais quelques préjugés sur le concept. Entre le moment où l’on quitte le Radisson Blue de Frankfort avec la Grange de ZZ Top, jusqu’au retour en fin d'après-midi j’en ai profité durant quasiment toute la journée. Ce n’est qu’après une quarantaine de kilomètres que je pense à couper le volume quelques secondes pour écouter le moteur. BMW nous a chargé une playlist tout à fait adaptée, avec pleins de classiques de Motörhead, Jimi Hendrix, RATM, Metallica et j’en passe...
La bulle « coupée » propre au look Bobber est problématique pour les grands, car vous prenez du coup toutes les turbulences dans le casque au-dessus de 80 km/h. Dans ces conditions, sur l’autoroute, il faut monter le volume au maximum pour entendre quelque chose, particulièrement avec la visière fermée.
A mes yeux, la bulle haute optionnelle (485 CHF) qu’on trouve de série sur la Transcontinental est impérative pour profiter de sa musique dans les meilleures conditions possibles. Elle vous permettra également de rouler confortablement avec la visière ouverte, à l’abri des turbulences.
Mise à part ce détail, je dois dire qu’il est plutôt sympa de cruiser en écoutant ses albums préférés. Je peux même avouer que j’ai effectué là mes kilomètres sur l’autoroute les plus divertissants de ma carrière de motard. Les subwoofers intégrés dans les valises sont vraiment efficaces avec des morceaux mid-tempo à la AC/DC ou la Rage Against the Machine. On entend distinctement le son de la grosse caisse et la basse venir de derrière et avec le volume à fond, on sent carrément les vibrations dans la selle.
Un point qui m’a dérangé toutefois est le fait qu’il n’est pas possible d’avoir un accès direct au réglage du volume et choix du morceau lorsque le GPS est activé. Il faut à chaque fois sortir du menu GPS et entrer dans le menu musique pour pouvoir à nouveau avoir accès aux réglages. J’ai fini par m’y habituer mais je trouve en général la navigation dans les menus un peu laborieuse. Par défaut, lors de mon essai, le GPS prenait toujours le dessus dès a chaque changement de direction.
Un écran TFT de 10.25 pouces !
D’ailleurs, maintenant qu’on parle du GPS, j’en profite pour mentionner l’immense écran TFT de 10.25 pouces. Il doit faire le double de la taille de celui de ma voiture ! Niveau navigation, difficile de faire mieux. Il est possible de le configurer pour qu’il affiche sur une moitié la carte et sur l’autre d’autres informations, comme la playlist par exemple. Toutefois l’écran n’est pas tactile, ce qui aurait probablement simplifié la navigation dans les menus. J’imagine que ça sera la prochaine étape. Sachez également que votre téléphone est nécessaire pour l’utilisation du GPS.
Au-dessus de l’écran on a droit à une série de compteurs analogiques du meilleur effet. Aux côté des classiques jauge à essence, compteur de km/h et de tr/min, on trouve une jauge indiquant la puissance disponible en pourcent. Pas très utile, mais ça permet d’avoir une symétrie avec les 4 compteurs.
L’active cruise control fait son apparition en option
Sur les deux modèles, le dynamic cruise control (DCC) est présent de série et l’active cruise control (ACC) fait son apparition en option. Un radar au-dessus du phare mesure en permanence la distance entre la moto et le véhicule qui la précède. La distance est automatiquement adaptée, la moto freinant et accélérant à votre place. L’angle en courbe est également pris en compte pour adapter la vitesse.
Franchement, c’est bluffant. Déjà, l’activation du dynamic cruise control (DCC) chez BMW c’est ultra intuitif. Un seul bouton pour l’activer et choisir la vitesse. On ne peut pas faire plus simple. L’active cruise control nécessite un second bouton permettant de sélectionner trois distances prédéfinies avec le véhicule qui vous précède.
Une fois la surprise du premier freinage autonome passé, on s’y fait vite. L’accélération quand ça repart est relativement « soft », mais rien ne vous empêche de donner un coup de gaz puis de laisser le cruise control reprendre la main automatiquement. Je n’ai aucun doute que cette option va se retrouver sur toutes les motos haut de gamme d’ici peu et se démocratiser dans le milieu de gamme d’ici quelques années. D’ailleurs KTM et Ducati équipent également un de leur modèle depuis cette année. Autant le cruise control c’est pratique pour l’autoroute, autant le système adaptatif est encore plus efficace et pourrait sauvez votre peau en cas d’inattention ou de somnolence.
Compartiment climatisé pour votre smartphone
Point besoin de support au guidon pour emmener votre smartphone. Les deux modèles intègrent un compartiment sur le réservoir capable de contenir un smartphone de 6.5 pouces (comme le IPhone 11 Pro Max). Ce compartiment est équipé d’une prise USB-C pour le chargement ainsi que d’un ventilateur qui se chargera de refroidir votre appareil dès que la température dépasse un certain niveau.
Bagagerie
Pour peu que vous aillez choisi l’option « keyless » à 300 CHF, vous disposez d’un système bien pratique de verrouillage centralisé des valises et du top case au moyen d’une pression sur le bouton de la clé sans contact. Les valises, bien qu’imposantes offrent une contenance modérée de 27 litres (26.5 avec les caissons de basse) chacune et le top case de la Transcontinental une contenance de 48 litres (47 litres avec les haut-parleurs optionnels).
Conclusion
Cette année 2021 est surprenante. D’une part, on a vu Harley Davidson débarquer dans le segment des trails, là où personne n’attendait le constructeur américain, et apparemment avec succès. En parallèle et peut-être de façon un peu plus prévisible, on a BMW qui s’attaque au segment des gros cruisers dont les marques américaines ont le monopole depuis toujours. Une chose est certaine, cette diversité est toute bénéf pour le marché de la moto et la clientèle. Cette nouvelle concurrence sur ces deux fronts sera certainement une source de créativité pour les marques.
Les défauts des R18 B et Transcontinental sont inhérents à la catégorie des gros cruisers (poids élevé, faible prise d’angle en courbe) qui conviennent d'avantage aux grands espaces américains qu'aux routes de montages avec virages en épingles.
Il faut avouer que BMW a fait du beau travail aussi bien au niveau du design que des finitions. Non seulement on trouve toute l’ADN de la marque à l’hélice dans ces modèles, avec un hommage à la tradition comme la motorisation boxer, le type de cadre ou encore la transmission finale par cardan ouverte. On trouve également, comme c’est toujours le cas chez les allemands, des composants à la pointe de la technologie comme l’Active Cruise Control, l’éclairage à LED adaptatif ou encore les suspensions pilotées automatiquement (en fonction de la charge).
Les fans purs et durs de la marque de Milwaukee seront-ils prêts à changer de « religion », au risque de devoir également remplacer toute leur garde-robe et peut-être même de se faire excommunier de leur club ? J’en doute fort... Je pense plutôt que les R18 B et R18 Transcontinental s’adressent à une clientèle nouvelle dans cette gamme qui désire profiter du look rétro et du confort exceptionnel de ce type de moto, sans forcément vouloir s’identifier avec l’une des deux marques américaines.
Vendues à partir de 28'520 (B) et 29'520 CHF (Transcontinental), les deux nouvelles R18 sont des motos chères. Toutefois, pour une moto de cette catégorie on se trouve dans le même ordre de grandeur chez Harley et chez Indian on table plutôt dans les 35'000 CHF.
Comme vous avez pu le découvrir dans mon test, mon impression de cette moto est plutôt positive. Les deux seuls points qui m’ont dérangé sont la hauteur de la bulle trop basse de la Bagger et la navigation un peu laborieuse dans les menus.. L’utilisation d’un écran tactile devrait permettre une nagivation plus intuitive.
Quitte à prendre une si grosse moto, je choisirais la Transcontinental, en particulier pour ceux qui roulent en duo. Sa grande bulle permettrait de rouler et d’écouter de la musique dans des conditions optimales. Parce que quand on a une moto équipée d'une sono, ça serait dommage de s'en priver, surtout que c'est vraiment sympa, en particulier sur les trajets autoroutiers qui sont normalement bien ennuyant. Son top case et le siège confortable qu’elle offre au passager permettrait de partir loin en duo.
D'ailleurs, ce n'est pas impossible qu'on vous faisse un test de la Transcontinental dans quelques temps... Stay tuned ;-)