Me voici justement arrivé sur notre spot photo du jour pour rejoindre Denis, derrière l’objectif. Vous serez nombreux à avoir reconnu la montée de Saint-Cergue, agréablement peu fréquentée en ce mercredi de début d’été. Enchaînant les premiers lacets, l’agilité de la Katana saute aux yeux. Le guidon cintré offre un bon bras de levier pour faire tourner la machine sans y penser. Rien à dire sur l’amortissement à cette allure raisonnable : la route est un billard et offre un très bon ressenti, soit le terrain idéal pour le châssis de la GSX-S.
Ce point fort m’avait déjà marqué lors de l’essai du fameux roadster, il y a quelques années sur cette même route : la stabilité permanente de la machine en fait un outil extrêmement adapté pour rouler vite. Aucune réaction imprévue, aucun mouvement parasite, simplement ceux d’une machine qu’on emmène à travers des courbes et réagissant aux commandes.
La position moins sur l’avant et l’assise plus « dedans » de la Katana offrent un sucroît de confort et un ressenti moins sportif. Le feeling de l’avant reste excellent et il n’y aura que la selle un peu large qui demandera un temps d’adaptation pour déhancher librement. Le freinage Brembo fait toujours merveille, alors que la fourche KYB de 43mm est absolument imperturbable. L’ABS n’aura pas eu à se manifester pendant la plupart des mes allées et venues. Il n’y a qu’en forçant un peu le système à s’activer qu’il se sera fait sentir : rien à signaler, donc.
Au fil des kilomètres, le confort reste impérial malgré le peu de protection offerte par le tête de fourche plus esthétique que pratique. Le volumineux réservoir ne s’avère pas plus gênant que cela et le naturel avec lequel on emmène la moto limite la fatigue. L’autonomie plutôt limitée de 180 kilomètres offriront autant de pauses passées à contempler la Suzuki, décidément incroyablement décalée.
Reste qu’après quelques pleins d’essence et un tour dans les superbes petits coins du Jura vaudois et de la Vallée de Joux, la Katana me ramènera à un sentiment aussi peu explicable que rafraîchissant. Cette impression d’être suspendu dans le temps, de simplement profiter du chemin se déroulant devant soi et ses roues. Au-delà de la recherche de vitesse et des sensations dynamiques, il y a dans le plaisir à moto cet insaisissable quelque chose qui nous pousse à ne pas rentrer tout de suite. A continuer de rouler, encore un peu. A la recherche de la réponse à une fameuse question qu’on ne s’est pas encore posée ? En quête peut-être, justement, de tout le contraire, de ce bout de « rien » qui se situe entre un instant et le suivant ? L’essence de la moto, sans doute à titre personnel, s'y trouve peut-être.
C’est peut-être ça qui aura rendu cet essai si ardu à écrire. La Suzuki Katana est une excellente machine, à l’identité très assumée et paradoxalement inédite : c’est un vrai gros roadster japonais à quatre-cylindres. Derrière une ligne savamment dessinée et un clin d’œil à la fois au passé de la marque et à la mode du néo-rétro, elle tire simplement la quintessence d’une plate-forme éprouvée pour proposer un produit abouti et séduisant. Ce fameux look en fera sans doute une machine de niche, dont les ventes ne représenteront qu’une part symbolique. Egalement parce qu'elle ne sera que trop réduite au rang de simple "quatre pattes" japonais classique.
Tout l’esprit est justement là. La GSX-S 1000 S Katana est un symbole. Une icône de Suzuki et de la moto en général. Pourquoi est-elle géniale ? Parce qu’elle est là. Parce qu’elle existe. Peut-être envers et contre tout. Paradoxalement, c’est ce qui fait tout son intérêt. Son petit truc en plus.
Pour utiliser encore une fois la formule, à titre personnel, elle m’aura retransmis au quintuple ce sentiment si particulier que je ressens au guidon de chaque bécane. Elle a changé cette formule consacrée que je prononçais à la fin de chaque essai, « J’en veux une », en « Je veux une moto ». Je veux un engin qui me parle et me procure des sensations. La Katana m’a parlé et je l’ai entendue. En souhaitant qu’elle puisse vous évoquer les mêmes sentiments, je vous encourage à aller essayer cette sacrée machine chez votre concessionnaire.