Par curiosité, une étape par la prairie hautement symbolique pour la Confédération Helvétique est programmée. La route pour s’en approcher vaut déjà la peine bien qu’elle traverse quelques villages. Depuis la route, on a une vue plongeante sur la prairie et un magnifique panoramique. Je profite de l’arrêt pour jeter un oeil sous la selle, car une fiche codeuse s’y cache pour donner l’accès aux modes pros de l’électronique (Enduro Pro, Dynamic Pro), mais c’est une option.
Trop tôt dans la saison, il faut emprunter le tunnel du Gothard pour rejoindre le Tessin. L’énorme bouchon est une formalité à remonter, seul l’obstination de certains à ne pas s’écarter me laisse sans voix. Pour les 17 km de tube, je suis bien content d’avoir le régulateur de vitesse. Bloqué à 80 il n’y a qu’à se laisser porter. Je l’activais même systématiquement dans les villages, plus besoin de garder les yeux sur le compteur.
La prochaine étape sur l’itinéraire est le balcon d’Italie. Mais ce que je ne savais pas c’est que la route qui y mène depuis la Suisse est très très étroite et l'ascension finale est en piteux état. Et comme si ce n’était pas encore assez difficile, une généreuse averse s’est abattue sur la région avec une petite dose de grêle. Le ciel a décidé que j'essaierais tout de suite le mode pluie de la GS.
Devant moi, des amis abordent une enfilade d’épingle de façon hésitante. Pour moi c’est un jeu d’enfant: campé bien haut sur la moto avec le large guidon, j’ai toute la liberté de mouvement nécessaire pour regarder bien haut et braquer la direction au maximum. Tout juste sur le ralenti de la 2e, l’Allemande bondit hors du virage en allumant déjà le contrôle de traction. L'adhérence est soudainement très précaire avec cette pluie survenue après une période assez sèche, heureusement que l’électronique veille d’une façon sécurisante.
Après la traversée de Laveno-Mombello à Intra sur le Lac Majeur, le détour par Piancavallo vaut autant le coup pour la vue que les petites routes. Mais le summum de la journée sera sans aucun doute la vallée allant de Cannobio direction Domodossola. Le route est par endroit très étroite, mais c’est là que j’ai poussé la Rallye dans ses derniers retranchements.
Avec le moteur en Dynamic Pro et le réglage rigide de la suspension, la moto réagit instantanément et se laisse piloter assez vigoureusement. Les 125 chevaux s’expriment pleinement bien qu’on aimerait en avoir 40 de plus. Equipé du shifter, le rapport supérieur s’engage instantanément et aide à mieux profiter du couple maximal à 6’500 tr/min. Inutile d’aller chatouiller la zone rouge à 9’000 tr/min.
Pour s’arrêter, on tape dans deux disque de 305 mm de diamètre à l’avant et un disque de 276 mm à l’arrière. En option, la GS prend aussi un ABS Pro, appliquant les freins différemment lorsqu’on est sur l’angle pour limiter le redressement et l’écartement de la trajectoire lors d’un freinage en courbe. Une technologie en laquelle il faut avoir confiance mais qui personnellement m’aide à rouler plus fort. Lors d’un gros freinage de l’avant, la suspension active compense immédiatement la plongée de l’avant. Il ne me reste qu’à rétrograder à l’aide de la commande hydraulique et du pied avant de me jeter dans le virage.
Arrivés au col du Simplon, retour au mode pluie aidé des poignées chauffantes pour affronter la neige. En 3 jours on aura affronté toutes les saisons.
Avant de s‘engager sur la remontée du Valais par l’A9, faute de mieux, notre groupe s’offre un passage à Loèche-les-bains. Le séant de certain en a bien besoin, alors que le mien est choyé par le selle de la 1200 GS. Mon seul regret point de vue confort, c’est le saute vent enduro un rien trop court pour dévier le vent au dessus de ma tête. Bien qu’il soit très facilement réglable à une main, la position haute ne suffit pas. Mais ce choix est compréhensible, avec un grand pare-brise on ne verrait vraiment plus rien lorsqu’il est plein de boue. On regarde facilement par dessus celui-ci.
Jusqu’à Monthey le régulateur de vitesse a une fois de plus sauvé mon poignet droit d’une crispation inutile. Pour la suite, nous avons repris la Vallée Verte pour ne pas sombrer dans l'ennui sur l’Arc Lémanique. Pendant tout le week-end, j’aurais suivi l’indication de vitesse du GPS de la moto. En effet le BMW Navigator VI fabriqué par Garmin est parfaitement intégré sur la R1200GS. A gauche, un grand sélecteur rotatif permet de zoomer sur la carte à tout moment. En poussant cette roulette vers le côté, l’affichage change et peut faire apparaître 1, 4 ou 16 informations concernant la moto, le tout étant paramétrable. Cet ordinateur de bord est un vrai plus pour la moto, augmentant malheureusement un peu plus son prix.
En un peu plus de 1300 km en 5 jours, j’ai bien compris pourquoi ce modèle est un best-seller. La 1200 GS est confortable, polyvalente et reste excellente à rythme élevé. Son autonomie de chameau m’aura aussi pas mal surpris. Après 325 km, l’autonomie affiche 50 km et on doit pouvoir en faire le double. La fiche technique dit 4.96 l/100km, j’ai mesuré 5.16 pour la même distance, chapeau.
Mais je vais être dur avec cette moto, à titre personnel voici ce qui ne m’a pas plu sur cette BMW. Comme passé mi-régime, il n’y a plus de couple, on se retrouve en permanence en 6e. Pour avoir de la reprise, il faut tomber 3 rapports avant d’essorer la poignée. Je n'aime pas non plus le principe de la fiche codeuse pour les fonctions pros. Un menu dédié aurait été plus simple et éviterait de manipuler une fiche sous la selle.
Comparée à d’autre trails du genre (Multistrada, Super Adventure S) je trouve que la GS manque de tranchant. Les pneus font une différence, c’est une certitude, mais je ne pense pas que l’ESA ou le châssis gagneront en rigidité avec une monte pneumatique différente. L’équipement de série de cette BMW n’est pas extra-ordinaire non plus, tout ce qui fait la différence est en option ! Mode de conduite Pro, démarrage en côte, ABS Pro, intégration du BMW Navigator, contrôle de traction, régulateur de vitesse, etc. Tout est dans des packs additionnels, une habitude allemande sans doute.
Ces deux derniers paragraphes sont cinglants, mais ils concentrent l’essentiel de ce que je trouve de négatif sur tout mon essai, tout le reste n’est que positif. La R1200GS mérite sa place de légende incontournable, d’autant plus que cette version Rallye est une réussite visuelle. Il faut juste garder en tête que la concurrence ne chôme pas et se développe exactement là où BMW baisse sa garde.