Ne vous y trompez pas, la version enduro de la moto de cross n’est pas une vraie enduro, mais simplement la CRF maquillée avec une plaque phare, des courbes de puissance plus douces (3 à choix) et des suspensions assouplies. Moteur, boîte de vitesses, châssis, géométrie, la base est vraiment identique. A l’œil nu et quand on regarde le modèle sans phare, seuls le plus gros réservoir et la jante en 18 pouces au lieu de 19 diffèrent.
Après un petit briefing, il est temps de s’y mettre. Dix 450RX neuves nous attendent d’un côté du semi-remorque-hospitalité, et puis ça sera au tour des dix 450R qui trônent de l’autre côté. Piste d’enduro à gauche, piste de cross à droite, rajoutez un bar à vin, une cible de fléchettes dans l’hospitalité et je m’installe ici !
Dans la jolie spéciale d’enduro tracée en Sardaigne par Giacomo Redondi, champion du monde junior, on comprend vite que la bête n’est pas dans son élément. Il faut dire qu’il a tracé une vraie spéciale bien technique : montées, descentes, dévers, terre meuble par endroit, un peu de boue par ici et de la terre dure par là, la piste est variée mais un peu lente à mon goût. Je ne suis pas un grand fan du slalom dans les arbres en première ou deuxième. Pas mal de collègues se sont plaints mais finalement, j’ai trouvé positif le fait de pouvoir tester la moto dans des conditions variées même si cette spéciale me rappelle à quel point je n’aime pas les parcours lents, et aussi que je suis passablement nul dans ces conditions, avouons-le.
Sur le terre meuble, l’avis est unanime : la puissance arrive trop vite même avec la « map » la plus douce, les suspensions sont trop dures et les rapports ne permettent même pas de passer la 3ème sur ce parcours. Honda a fait le choix de garder les mêmes rapports de boîte et de simplement ajouter une dent à la transmission finale par rapport au modèle de cross, ce qui ne fait pas une grosse différence avouons-le. Le levier d’embrayage est relativement dur et direct pour une moto d’enduro, ce qui est normal puisque c’est simplement le même que la version cross.
Après la spéciale, on nous emmène dans du chemin plus rapide et c’est là que la CRF devient agréable, châssis stable, contrôle de la puissance aisé, la RX absorbe bien la piste typée rallye. La joie est de courte durée puisque Redondi nous amène dans une montée de rivière dans les rochers. Dès qu’on revient dans le technique, on subit un peu le poids et les suspensions de la moto, la maniabilité fait défaut et le physique en prend un coup.
Puisque la version RX semble bien se porter sur les parties plus rapides, j’ai demandé à faire une session sur la piste de motocross et comme je m’y attendais, elle se comporte parfaitement bien. Elle est même plus facile que la version R pour un pilote moyen comme moi car la puissance arrive plus en douceur et les suspensions plus souples conviennent très bien. La CRF450RX est finalement une moto complète mais plutôt typée cross-country qu’enduro. L’avantage pour l’acheteur c’est qu’il pourra l’emmener aussi bien dans les bois que sur une piste rapide ou une piste de motocross. Quand on voit Redondi emmener la moto dans la spéciale, on se dit que pour le chrono pur la RX devrait concurrencer les autres sans problèmes, mais pour les passages techniques ou « trialisant », il faudra être un pilote technique et physique.
Après 3 bonnes sessions d’enduro et la pause de midi, nous entamons nos runs sur la piste de motocross. Le choix du terrain est excellent. La terre est belle, le grip est bon et la piste ne contient pas de sauts dangereux, principalement des tables ou des doubles faciles. Le seul jump intimidant est la table d’arrivée qui fait un bon 25 mètres de longs, mais bon, c’est là que sont les spectateurs alors il faut bien la sauter en entier ! Et puis, c’est aussi là que les ambulanciers attendent alors je me lance, au pire ils seront pas loin ! La seule difficulté de cette piste se situe sur quelques sauts sur lesquels on arrive à l’aveugle et qui tourne légèrement. Cette furtive sensation d’être en l’air et de ne pas savoir si je vais retomber sur la piste ou à côté ne m’avait pas manqué.
Quelques ornières bien solides, quelques gros trous, des montées et des descentes, tout ce qu’il faut pour tester une moto ! De temps à autres, Alessandro Lupino, pilote de MXGP et double champion d’Italie MX1 vient nous montrer à quelle vitesse les virages se passent. C’est aux mains de ce genre de gars qu’on voit vraiment que les limites d’une CRF450R d’origine sont très, très loin de nous.
Les japonais n’ont pas menti, ils ont travaillé sur une moto faite pour la victoire. La puissance est au rendez-vous mais elle est gérable facilement. Là encore, les 3 cartographies programmables ne seront pas inutile selon le terrain ou la fatigue du pilote. Même avec la configuration la plus agressive, la courbe de puissance reste très large et on peut se permettre de ressortir d’une courbe relativement bas dans les tours et la puissance arrive naturellement. Ce moteur a tout pour lui, de la facilité en bas et de la puissance en haut des tours, que demander de mieux ?
Pour parvenir à ce résultat, tout a été repensé. Les ingénieurs n’ont pas simplement fait évoluer leur ancien moteur : arrivée d’air, soupapes, distribution, piston, vilebrequin, système de lubrification, échappement, tout a été revu et le résultat est là. Le piston parcourt 25 mètres par seconde, c’est tout simplement le moteur de série le plus rapide de toute l’histoire du premier constructeur mondial.
Côté châssis, on a gagné en tout 500 grammes, ajoutés aux 500 autres économisés grâce au nouveau réservoir en titane, cela compense le poids que la bête a repris en réadoptant une fourche traditionnelle en remplacement de la fourche à air. De plus, le centre de gravité a encore été abaissé, ce qui rend la maniabilité encore meilleure. Le châssis a été modifié de sorte que la rigidité latérale ne change pas. La résistance à la torsion a quant à elle été abaissée, ce qui permet un très bon feeling sur le train avant.
Au final, on obtient une moto précise et facile à emmener. La fourche Showa de 49mm de diamètre travaille bien et le moindre réglage sur l’hydraulique se fait ressentir en dynamique. La hauteur de fixation de l’amortisseur a été rabaissée de 39mm ce qui aide à réduire encore le centre de gravité et donne un peu plus de charge sur le pneu arrière.
Dans le coin des nouveautés, on peut aussi noter que la CRF450R sera disponible également avec un démarreur et que le switch pour changer la cartographie est désormais côté gauche non loin du coupe-contact.
En conclusion, on peut affirmer que la CRF450R totalement repensée est un succès, elle a déjà d’ailleurs gagné en compétition au Japon et aux Etats-Unis, sans pour autant devenir une moto incontrôlable pour un amateur. Honda réussit un très beau mélange de performance et d’utilisabilité. Quand à la 450RX, on peut simplement regretter encore une fois que Honda ne sorte pas une moto d’enduro pour « Monsieur tout le monde ».