Arrivé sur un petit bout droit, je me risque à une petite montée en régime pour juger de la puissance offerte par le moteur. Paf ! Le guidon me saute à la figure dans un hurlement aussi effrayant que jouissif, alors que je suis irrésistiblement aspiré par le prochain rond-point, qui s'approche beaucoup, beaucoup trop vite ! Freinage. L'avant s'enterre dans le goudron et je me retrouve au ralenti en moins de temps qu'il ne faut pour dire "Brembo". L'ABS n'a pas bronché, l'arrière n'a pas bougé et mon intimité s'est incrustée dans le réservoir. D'accord...
Constatant que la GSX-S ne demande qu'à aller s'ébattre jusqu'à plus soif, je bifurque vers un terrain de jeu plus sinueux. L'idée de rouler tranquille étant restée avec une partie de ma dignité à l'entrée du rond-point, j'attaque le couteau entre les dents les premiers lacets. L'équilibre général qui a fait des GSX-R 1000 de redoutables outils sur route est toujours là, avec un grand guidon en plus ! L'avant plonge dans les courbes avec avidité, sans jamais mettre à mal la stabilité, et on peut entrer très, très fort. Dans les S, l'agilité de la Suz' fait merveille : la légère impression de lourdeur de la ligne est bien loin !
En sortie de virage, on arrive rapidement à deux constats : dès 7'000 tours, on sort comme une balle de n'importe quel virage et, surtout, l'avant est très, très léger ! Le guidon déleste rapidement, surtout lorsqu'on accélère encore sur l'angle, en profitant du traction control, très adapté à l'attaque sur le niveau 2. L'effet est déroutant et rappelle qu'on a quand-même un vrai bâton de dynamite entre les jambes ! Un amortisseur de direction s'avérerait judicieux pour les plus gênés, mais un peu de retenue et de finesse suffisent à atténuer le phénomène. D'ailleurs, une fois l'antipatinage débranché, on peut même s'adonner à quelques sorties de courbe sur la roue arrière assez facilement. Néanmoins, on préférera rester au niveau 1, où il se manifeste très tard, sur l'angle, voire au niveau 2, sur lequel son intervention en sortie de courbe est plus marquée, sur les grosses accélérations. La force du quatre cylindres est ainsi relativement exploitable en toute sécurité.
Certes, mais l'expérience est de mise pour emmener la Suzuki à hauts-régimes. Au-delà des 8'000 tours et jusqu'à la zone rouge, la poussée est incroyablement forte et les vitesses atteintes dignes de sa cousine sportive ! Reste que le frisson est bel et bien là : la stabilité reste exemplaire, la garde au sol n'est jamais mise à mal et le freinage reste impeccable. On regrette même parfois le feeling renvoyé par l'ABS, qui se manifeste presque tôt. Malgré de gros appuis en entrée de courbe, l'avant conserve sa précision et sa stabilité. On achève de se ralentir au frein arrière, avant de remettre les gaz et s'extraire tout en force du virage. Au changement d'angle dans les enfilades, on reste sur un filet de gaz et on profite de l'allonge et du frein moteur pour garder de la vitesse. Sensations de pilotage au top et efficacité redoutable : elle donne envie cette Suz' !
Après encore quelques kilomètres d'attaque à outrance, il est toutefois temps de rendre la main. Non que la fatigue se fasse sentir ni que les limites de la GSX-S se montrent, au contraire. On arrive rapidement au même souci qu'en roulant une hypersportive sur la route : tout va trop vite, les limites du moteur et du châssis sont pourtant loin et on sent bien qu'on en a encore sous le coude. Mais qu'en se faisant pincer à certains endroits, on peut rentrer à la maison à pied... ou en ambulance. Comme toutes les machines sportives, car elle en est une, la GSX-S demandera d'aller s'amuser sur circuit fermé pour tirer au clair son plein potentiel.
Du potentiel, la GSX-S 1000 en a à revendre et s'avère être la machine qu'on attendait de la part de Suzuki. Avec un tarif intéressant, des aides à la conduite simples mais suffisantes sur la route, on goûte facilement à son excellent comportement, digne de ce qu'on attendant d'une machine si longtemps attendue. Reste que, justement, on a attendu. Mais pas la concurrence, surtout européenne, certes un peu plus chère, mais autrement plus performante au niveau du moteur et des aides électroniques. On a quand-même affaire à un roadster au comportement excellent, qui offre d'incroyables sensations et des performances largement suffisantes. La GSX-S 1000 est en retard, mais ne m'aura pas déçu.
N'hésitez pas à vous rendre chez MM Ride à Genève pour un essai.