
Dans le domaine des engins motorisés, la lettre R a une résonance particulière. La lettre magique, apposée sur un véhicule, assure son propriétaire de posséder un engin qui sort du lot. Dans les années 90, l’automobile a connu le phénomène GTI. Aujourd’hui, la moto semble vivre un épisode semblable: les constructeurs dotent de plus en plus de leurs modèles de versions améliorées. Dernier marché touché par le phénomène: celui des roadsters mid-size, KTM Duke 690R et Triumph Street Triple R en tête. La première réaction japonaise à ce phénomène jusqu’ici européen, c’est la Kawa Z 750 R.
Une Z qui change dans le détail en se dotant d’une fourche inversée de 41mm de diamètre et d’un nouvel amortisseur, tous deux réglés pour offrir plus de sportivité. Elle s’offre également des durits aviation et des étriers radiaux à 4 pistons à l’avant, actionnés par un maître cylindre radial. On ajoutera également la présence d’un bras oscillant en aluminium et un moteur dorénavant noir à la liste des changements les plus visibles.
En approchant de la bête, on apprécie immédiatement le travail réalisé par Kawasaki. De la splendide peinture vert/noir à la tête de fourche légèrement remaniée, en passant par les repose-pieds aux couleurs du cadre et l’échappement Akrapovic, on s’en met plein la rétine! Déjà jolie à regarder dans sa version basique, la Z 750 se fait désirable. La finition est à la hauteur et finit de rassurer: on a bien affaire à une version haut de gamme. Chouette! On l’essaie?
Contact. Le bloc compteurs, toujours placé très bas pour dégager la vue, affiche un « R » juste sous la zone rouge du compte-tours, affiché sur un fond noir. Sinon, rien ne change par rapport à la frangine et c’est tant mieux: la lisibilité est excellente et le dessin agréable.
D’une pression sur le démarreur, le quatre-cylindres s’ébroue et commence à ronronner agréablement. Si la sonorité d’origine des Kawasaki a toujours été travaillée, l’échappement Akrapovic (une option/promotion à un franc jusqu’à la fin de l’année pour l’achat d’un modèle neuf) fait merveille. Moteur coupé, la Z 750 R en jette. Une fois mise en route, c’est encore autre chose!
C’est parti: premiers tours de roue en milieu urbain. On glisse dans le trafic en profitant du moteur très doux à bas et mi-régimes, qui fait tourner quelques têtes grâce à la sonorité très présente de l’échappement. Avec son vert bien flashy, la Kawa ne passera de toute façon pas inaperçue… et vous non plus! Au delà de la frime, on aime la facilité de la Z, à basses vitesses et en manoeuvre, malgré un poids qui se ressent un peu. Facile au quotidien, la Verte ne demande qu’à bondir au moindre effleurement des gaz. L’Akra donne de la voix et le couple du moteur vous extrait facilement du trafic.
Parader en ville, ça va un moment… Un bon roadster, ça donne envie d’enquiller les courbes! Alors quand il y a un « R » dessus, on ne va pas se priver! Comme souvent, l’autoroute s’impose entre nos roues et les routes à virages. Avec une position bien droite et aucune protection, les longs rubans bétonnés ne sont pas le terrain favori de la Z. Tant mieux pour le permis: on conserve une allure légale en attendant que cela passe, sans trop s’user les cervicales. Les bonnes relances du moteur permettent toutefois de tromper l’ennui le temps d’un dépassement.
Une fois lancée dans les courbes, la Z R (pardonnez la formulation, ndr) ne boude pas son plaisir, et son pilote non plus! Si elle ne s’est pas transformée en vrai roadster sportif, la R affiche une rigueur bienvenue lorsqu’on hausse le rythme. Plus alerte que sa jumelle, elle enfile les virages en toute quiétude, le tout dans un « ROOOOOOAAAA » d’échappement digne des plus belles cases du Joe Bar Team! Il y a de l’ambiance au guidon de la Kawa! La piloter dans le sinueux est un régal, tant que le bitume est lisse. Sur les petites bosses ou un revêtement irrégulier, les suspensions plus rigides calmeront vos ardeurs.
Petit mot sur le moteur, qui est un pur régal à rouler! Une fois passés les mi-régimes, où le couple vous propulse déjà fort, on s’allonge les bras à l’approche de la zone rouge! On a un vrai « gros » moteur entre les pattes, ça se sent! Les accélérations sont fulgurantes et la sonorité absolument divine. Au point d’emballer votre serviteur et, lui faisant oublier son voeu d’objectivité, lui faire clamer haut et fort en haut d’un col: « C’est comme ça qu’un quatre-pattes doit marcher! ». Pardonnez-lui…
Dans ces phases de pilotage plus soutenues, on pourra compter sur un très bon freinage. L’équipement déployé à l’avant (durits avia’, étriers et maître-cylindre radiaux) est très efficace, même si un peu plus de mordant aurait été souhaité. L’ABS limitera de toute façon les réjouissances (et les traces dans le pantalon…), intervenant assez vite en cas de freinage très appuyé. A l’arrière, il s’enclenche d’ailleurs un peu trop tôt.
Si la Kawasaki se sort avec les honneurs des virages, elles vous permettra surtout d’en profiter longtemps… et à deux! Malgré une selle passager au dessin radical, le confort est bien présent et permet à votre chère (ou cher) et tendre (ou pas) de profiter de la balade. En duo, d’ailleurs, on profite encore du couple de la Z. On enroule un rapport au dessus, en léchant juste les freins avant un virage plus serré, puis en balançant facilement la moto sur l’angle. Le confort et le couple d’un gros cube, l’agilité et la dégaine d’une moyenne cylindrée: la recette magique de la Z fonctionne toujours dans cette version R. Avec son grand réservoir, la barre des 200 kilomètres d’autonomie est facilement dépassée. De quoi aller se perdre en montagne sans craindre la panne sèche.
Fiable, facile au quotidien, confortable, apte au duo et toujours sympa à piloter. La Z 750 R n’a rien perdu des qualités de la version standard. Avec un surcroît non négligeable d’équipements, on aurait pu s’attendre à vraiment plus de sportivité, à une machine beaucoup plus affûtée. Pour Kawasaki, « R » ne veut simplement pas dire « Radicale ». On pencherait plus pour « Raffinée »: elle reste une Z, mais se montre plus aboutie et s’offre un supplément d’âme et de charme non-négligeable. La recette gagnante?