Tout le monde en pense quelque chose, des Harley-Davidson. En bien ou en mal, elles ne laissent jamais vraiment indifférent. Pour comprendre l’engouement que suscite les natives de Milwaukee, il faut au moins en essayer une. Cette Sportster 1200 C (pour Custom) est l’un des modèles d’entrée de gamme du constructeur américain. D’une ligne légère et d’un gabarit étonnamment réduit, elle ne rebute pas les regards profanes.
Dans ce coloris Sedona Orange, la Sportster est délicieusement rétro. Sa ligne simple, soulignée de quelques chromes, met dans l’ambiance. Le petit phare et sa casquette sont surmontés par un guidon joliment cintré, sous lequel pendent les deux clignotants. Le réservoir, avec sa jolie forme de goutte d’eau, guide l’oeil vers une partie arrière basse et fine. Toutes les pièces sonnent le bon vieux métal lorsqu’on tapote dessus, confortant l’amateur de belles mécaniques sur la qualité de l’engin. C’est dingue comme cette moto donne envie de rouler! On ne se fera pas prier…
Au moment de s’installer à bord et de relever la moto, le gabarit réduit et la légèreté de l’ensemble sautent aux yeux. Les a priori prennent cher: voilà une Harley légère et facilement manœuvrable! Contact (sur le côté droit, à l’avant du cadre), l’injection bzzzite et rappelle que oui, on est bien sur une Harley-Davidson de 2011… Vous vous attendiez à une machine d’avant-guerre, avouez-le! D’une pression sur le démarreur, le twin s’ébroue dans une sonorité typique Harley, bien que discrète d’origine. Voir le V-twin vibrer dans le cadre au ralenti provoque une étrange exaltation. Voir bouger un moteur ainsi titille l’imaginaire: toute la moto devient vivante, d’un coup.
En laissant chauffer le moteur, on peut détailler l’instrumentation de bord… qui se résume au compteur! Quelques témoins lumineux, un totalisateur (et deux trips, selon Harley, mais qu’on n’a jamais pu trouver) et basta. Ce n’est même pas perturbant, mais plutôt en parfait accord avec la philosophie du Sportster. Comme le splendide bouchon de réservoir chromé, sans charnière mais si joli, qui attire l’oeil. On aime la regarder, on adore la sentir vibrer entre les cuisses… et on est bien assis dessus! La selle relativement moelleuse et les cale-pieds pas trop avancés offrent une position de conduite plaisante et confortable. Une Harley-Davidson est aussi vivable que ça? Foutus a priori!
On enclenche la première et c’est parti! Immédiatement bercé par le poum-poum du moteur, on prend son pied! On ne le voit plus vibrer, mais le twin se ressent dans chaque recoin de la machine. Les initiés vous diront qu’une Harley se reconnaît entre mille par le ressenti qu’elle procure: une fois posé dessus, force est de constater qu’ils ont raison. On passe les vitesses dès que les good vibes s’estompent, en écoutant le moteur travailler. L’impression de chevaucher un engin vivant se confirme: cette moto vous parle continuellement, que ce soit à l’arrêt ou à 120 km/h.
Si la position n’est pas forcément la meilleure pour faire corps avec la machine, la facilité de conduite est surprenante. Très facile à vitesse réduite, le Sportster 1200 se laisse emmener sans problème en ville. Les poignées et leviers n’étant pas aussi sur-dimensionnés que sur d’autres cruisers, les petites mains seront à l’aise pour conduire. L’embrayage n’est pas trop dur, mais le point mort est assez compliqué à trouver sans un certain temps d’adaptation. S’il y a bien un a priori qui se vérifie, c’est que les Harley ont la cote auprès du public. Que de remarques à l’arrêt ou en se stationnant! « C’est une belle machine! », « Elle est superbe, j’en avais une avant! », « Dites, elle est à vendre? » L’effet Harley-Davidson…
De quoi vous faire regretter de ne pas transporter un deuxième casque pour emmener une éventuelle curieuse. Qui sera vite découragée par l'inconfort total de la place dévolue au passager! L'assise étroite et pentue (!) garantit quelques sueurs froides au moment d'accélérer et les suspensions sont tout de même assez tape-cul… Hey, baby, c’est une Harley, pas un scooter! Et puis, en bon cheval, la Harley préfère la jouer solo, emmenant son seul cavalier vers les grands espaces.
C’est une fois loin de la civilisation, sur de vraies routes et près de la nature, que le Sportster s’apprécie le mieux. Prendre des courbes en appui sur les cale-pieds, sans chercher l’absolue performance, tracté par le 1200 toujours aussi disponible, est un régal. Le châssis est sain et assure en toutes circonstances, même à un rythme plus sportif. Car si vos prises d’angle resteront limitées, le Sportster jouit d’une légèreté propice à l’amusement! Seul le frein avant, un peu juste en conduite sportive, occasionnera quelques palpitations avant un virage serré.
En conduite normale, le freinage n’appelle cependant aucun reproche. Le simple disque avant freine honnêtement, mais acceptera volontiers l’aide de l’arrière pour ralentir plus efficacement. Un frein arrière qui, si le coeur vous en dit, vous offrira quelques glisses assisté du copieux frein-moteur. Une Harley qui sait s’amuser… encore un a priori qui s’envole! A noter qu’aux allures supportées par le châssis, les pneumatiques Michelin (estampillés H-D, s’il vous plaît) n’ont jamais été pris en défaut.
L’efficacité de cette Harley sur tout type de route est surprenante. Malgré la position pieds en avant, son pilotage demeure facile. Comme pour le moteur, on reste à l’écoute de son châssis vivant, qui filtre peu les irrégularités de la route et vous abreuve de sensations oubliées sur la plupart des motos actuelles. Le plaisir de conduite brut, le sentiment de partager la route avec votre monture. On se sent vite davantage cavalier que motocycliste, même si votre monture, heureusement, ne sent pas le cheval…
Difficile de ne pas être séduit par ce premier pas dans l’univers Harley. Vivant d’un bout à l’autre de vos trajets, le Sportster 1200 C vous offre l’aventure. Partir sur un coup de tête, avec trois bricoles dans le sac à dos, et tailler la route, il adore. A la manière d’un cheval sauvage capturé et dressé, il ne cessera jamais de vous rappeler d’où il vient et qu’il peut vous y emmener. Le Sportster vous prend aux tripes et vous invite à prendre la route autrement. Mais surtout loin et longtemps, porté par le poum-poum du moteur. Vous avez encore des a priori sur l’effet Harley? Vous savez quoi faire…