Au premier coup d’oeil, on remarque rapidement que la production est bel et bien italienne : cadre tubulaire en acier de couleur or, ligne taillée à la serpe. La Shiver ne trompe pas son monde sur ses ambitions de venir jouer sur le terrain des quatre pattes japonais.
Au premier tour de clé, le moteur me parle immédiatement, quel son ! Les motoristes y ont indéniablement mis du coeur et de l’oreille. Le son est rauque, le bicylindre est bien présent, la moto tremble. Pour l’occasion, j’en verserai presque une larme, tant ce son m’enchante.
Bon, je me reprends, enfourche la belle et me prépare à passer un long week-end en sa compagnie.
Ma première impression est plutôt bonne, je trouve immédiatement mes repères. L’embrayage (hydraulique) et le frein sont réglables en écartement sur quatre positions grâce à une molette. Le compteur est lisible, les commutateurs tombent naturellement sous les doigts, le large guidon de couleur or est lui aussi du plus bel effet. Pendant que j’y suis, les sélecteurs de freins et de vitesse sont également réglables, que ce soit en hauteur, mais également en profondeur (avant -- arrière) c’est assez rare pour le souligner.
Le démarrage se fait sans problème, la première vitesse s’enclenche facilement, les premiers tours de roues pour sortir de la ville se font sans problème ; le large guidon aidant au maniement de la belle. Le centre de gravité est assez haut, les grands gabarits seront contents, les moins de 170 cm auront du mal à toucher le sol. Seul petit regret au niveau de la maniabilité : un rayon de braquage un peu large pour la ville.
Me voici sorti des embouteillages et sur terrain campagnard ; 2ème, 3ème rapport, le son est toujours aussi mélodieux. Mes bras s’étirent. Le casque me rappelle que j’aurais dû le serrer un peu mieux. Les divers insectes s’amassent sur ma visière et mon cuir. Tout mon corps vibre grâce au bicylindre… quelle sensation de liberté! Pour ceux que les insectes et autres écrasements sur casque dérangeraient, vous pourrez toujours vous tourner vers la version Shiver GT, équipée, pour l’occasion, d’un saute-vent, ce qui devrait vous soulager.
Passons à la mécanique, le bicylindre en V de 95cv et ses 79 Nm ne vous laissera pas indifférent. Certes, en-dessous de 5’000 tr/mn, le moteur demande à être cravaché. Passé ce régime, plus besoin de lui rentrer dedans, il s’en chargera pour vous et vous rappellera ses origines italiennes. Dans son élan, il vous fera vibrer jusqu’à 9’000 tr/mn et recommencera rapport après rapport (sauf en 6e…). La sonorité, quant à elle, passera d’un son rauque à un son très rauque assortie d’une sensation de soufflerie qui vous botte les fesses.
Il est tout aussi facile de rouler avec un sac de sable (avec un passager) qu’en mode égoïste solitaire. Il suffit simplement de doser la poignée de droite et garder à l’esprit que vous avez une bonne poignée de chevaux qui ne demandent qu’à être libérés.
L’indicateur de rapport engagé, gadget fort utile, vous permettra de voir que vous n’avez plus de vitesse à passer. Oui, le couple même en 6e est bien présent. Il vous évitera, par exemple, de grosses glissades de l’arrière sur sol mouillé tant le frein moteur est présent, ce qui pourrait vite devenir désagréable pour les non initiés.
Vous me direz, un bon moteur, c’est bien ! Mais qu’en est-il de la partie cycle et de ce fameux cadre à l’italienne avec son amortisseur excentré ?
La position de conduite est naturelle, on trouve vite sa place, la selle reste confortable, même après 200 km. Bien entendu, certains ne seront pas de cet avis, chacun son séant.
La moto est équipée de frein made in Aprilia, des durites aviations sont présentes à l’avant comme à l’arrière. Les disques avant de 320 mm vous stopperont facilement à condition de ne pas les maltraiter. En effet, s’ils ont du mordant, ils manquent toutefois d’endurance. A la vue du frein moteur, cela ne m’a pas géné plus que ça. Le frein arrière et son disque de 245 mm est sans reproche, il ralentit convenablement la moto et ne m’a pas fait bloquer la roue.
Niveaux suspensions, je trouve que la fourche télescopique inversée de 43 mm est assez dure en début de parcours. Sans doute à cause d’une huile assez épaisse ; il aurait été dommage que cette dernière ne soit pas réglable. Le mono-amortisseur arrière SACHS, quant à lui, est sans reproche ; il bénéficie d’un débattement de 122 mm et est réglable en compression/détente, ce qui vous permettra d’adapter son réglage en fonction de votre sortie, partageur ou égoïste.
A l’attaque, le châssis équipé comme mentionné ci-dessus est bien aidé par des Dunlop Sportmax Qualifer qui remplissent aisément leur rôle.
L’ensemble reste ferme et franc à la fois. Son terrain de prédilection reste, toutefois, les routes ayant un bon revêtement, faute de quoi, vous risquez d’être tout de même bien secoué de l’avant. Le train avant est un modèle de précision, facile à inscrire en entrée de courbe et ne se relevant que très peu à la sortie. Au final, vous en redemandez encore en voulant toujours prendre plus d’angle. Malgré tout, il faut garder à l’esprit que vous avez une superbe lame entre les jambes. Cependant, il faut savoir la manier pour aller vite.
Les débutants risqueront de la trouver trop sèche, mais en prenant le temps de la manier, vous y prendrez beaucoup de plaisir.
Le tableau de bord, ou devrais-je dire l’ordinateur de bord, offre de nombreuses informations : un indicateur de rapport engagé, un chronomètre, un système de diagnostique moteur, la température extérieure, l’heure, les trips partiels, la consommation mixte et instantanée, la vitesse maximum atteinte. Seule ombre au tableau, le manque d’une jauge à essence, comptez en moyenne 190 km avant d’atteindre la réserve et devoir vous prêter au jeu du remplissage. Naturellement, la clé est codée et la présence de warning fini cet équipement complet, les British devraient en prendre de la graine.
En conclusion, une moto envoutante oeil n’y a pas besoin d’aller vite pour prendre énormément de plaisir, le tout a un tarif contenu au vue des prestations fournies : que du bonheur !
Note du sac de sable : la passagère sera ravie dèavoir un powerplate tout le long du trajet. Balade en couple et fitness en même temps.
Sincères remerciements au garage M&M Ride situé à Genève pour le prêt de la Aprilia Shiver.