ESSAI
En 2020, en pleines vacances d’été sort la nouvelle : une CBR 600 RR sort sur le net, avec un look ravageur et des spécifications alléchantes. Oui mais voilà, celle-ci ne sera commercialisée qu’au Japon et en Australie. Les autres pays avec vos normes d’émissions, vous pouvez aller vous gratter. Ça n’empêchera pas des belges, notamment, d’en mettre quelques unes dans des conteneurs pour les utiliser sur circuit en Europe.
Le marché évoluant sans cesse, la demande sur ce segment croît à nouveau, ce qui motive Honda à revoir sa copie pour proposer une sportive 600 conforme Euro5. De plus, les teams et pilotes sont aussi en demande de ce genre de modèles pour la compétition. Évolution logique entre la 300 et la 1000.
La voici donc cette nouvelle CBR600, avec un regard acéré pour être la digne petite sœur de la Fireblade. Elle reçoit aussi des ailerons pour augmenter l’appui grâce à l’écoulement de l’air autour de la moto. Elle ne cache plus autant son moteur que les modèles précédents, ses carénages couvrent juste ce qu’il faut pour honorer ses gènes de sportive. L’échappement reste en position haute sous la selle, ce qui place le centre de gravité plus haut, mais donne un meilleur bras de levier pour balancer la moto d’un côté à l’autre.
Moteur éprouvé, quasi inchangé
Le bloc utilisé dans la CBR600 est du même type que celui que l’on voit à cette place depuis des années, mais des améliorations sont quand même faites pour alléger l’ensemble et atteindre 57.9 kg seulement. Les arbres sont tournés différemment, l’admission se ferme 5° plus tard, l’échappement s’ouvre 5° plus tôt. Le canal d’admission est usiné en plusieurs fois pour adoucir l’angle d’entrée et fluidifier l’écoulement du mélange air/essence. Le rapport de compression reste inchangé, avec 121 ch. et 63 Nm au final sur le banc.
Pour l’échappement, objet de toutes les attentions des autorités, ils ont usé de tous les moyens possibles pour atteindre les objectifs. Etonnamment, les ingénieurs ont réussi à se passer d’une valve active dans l’ensemble du système. Au collecteur, le diamètre est plus petit, tandis que les tubes de liaison ont des diamètres plus grands; ils lient le 1-4 et 2-3 au lieu de 1-2, 3-4. Sortie de collecteur, diamètre plus grand (45 au lieu de 42.7), puis le catalyseur tout de suite sous la moto. C’est là que la valve du modèle 2017 a disparu. L’économie totale de poids est de 400g.
La transmission secondaire adopte une couronne 42 dents, mais pour notre essai sur le circuit, ce sera même 43 dents avec une chaîne plus longue pour passer les pneus WET. Le nouvel embrayage plus souple demande un tiers moins de force à l’utilisation, avec la fonction de glissement et d’assistance (slip & assist). Il faut surtout fêter l’arrivée du shifter bidirectionnel en série sur le modèle, lequel est réglable en 3 modes, en fonction de la douceur souhaitée. Malheureusement, sa conception ne permet pas de retourner facilement le sens d’opération. Il faudra attendre sur des pièces d’équipementier pour y remédier si on y est habitué pour le circuit.
Les freins choisis pour la CBR600RR sont deux disques de ø310 mm à l’avant, pincés par des étriers radiaux 4 pistons Tokico, commandé par un maître-cylindre radial avec un levier réglable. À l’arrière, un simple disque ø220 mm est pincé par un étrier Nissin bipiston.
L’ensemble est sous les ordres d’une centrale ABS Nissin qui est 2 kg plus légère que celle utilisée en 2017. Cette unité fonctionne de concert avec l’IMU 6 axes Bosch MM7.10, identique à celle de la Fireblade et de l’Africa Twin. Son action est identique : permettre à l’ABS et au contrôle de traction d’agir différemment selon l’angle, empêcher la roue arrière de se lever lors de forts freinages et agir également comme anti-wheeling.
Le contrôle de traction HSTC est réglable sur 9 niveaux et peut également être désactivé. Grâce à l’écran TFT on règle çela facilement, tout comme les différents modes moteur et niveau de frein moteur qui peut être réduit par rapport à la normale.
Honda a sélectionné une fourche inversée Showa Big-Piston (BP) réglable en précharge, compression et rebond. Comparé à la précédente, elle est 15 mm plus longue au dessus du T de fourche supérieur, donc ça n’apporte rien de plus, sauf la possibilité de descendre les tubes et changer l’assiette de la moto vers l’arrière.
Le bras oscillant en aluminium perd 150g, et est relié à un mono-amortisseur lui aussi réglable en 3 paramètres dont le tarage du ressors qui est aligné aux performances de la fourche. L’angle de chasse s’ouvre un peu et augmente du coup la voie et l’empattement. Ceci rend la moto plus stable, moins vive avec le guidon.
En piste!
La malchance semble avoir décidé de frapper Honda, la période choisie pour présenter la moto sur le circuit de Portimao voit de nombreux épisodes pluvieux avec des fortes rafales de vent venir de l’océan Atlantique. Les groupes avant nous ont bien été affectés par ces conditions météo. Le matin de notre essai, la pluie tombe toujours malgré que le soleil ait pu être aperçu au réveil.
Nous avons droit à des instructeurs de luxe pour cet essai : Freddy Foray (ancien pilote EWC sur Honda, a gagné avec FCC TSR Honda France) et John McGuiness (il vous faut son CV?). Le premier nous averti qu’avec la pluie, il y a 3 rivières qui traversent la piste. Une en sortie du premier gauche après 4 virages à droite, une pleine corde dans l’épingle à gauche et une dernière en sortie du double droit, pile quand on devrait souder pour relever la moto.
Nos CBR600RR sont forcément équipées de pneus pluie. Des Pirelli en 200 de large à l’arrière, ce pourquoi la chaîne a été allongée de 2 maillons. Avec la pluie qui continue de tomber finement, on part en piste pour 10 minutes à suivre John pour se familiariser avec la trajectoire et repérer les fameuses rivières. La moto est réglée avec un haut niveau de HSTC (6 sur 9) et malgré tout, la puissance est maximale. Ce n’est que la deuxième fois que j’ai l’occasion de rouler avec des pneus pluie, donc en plus de découvrir la moto, je dois trouver de la confiance dans les pneus dont on ne connait pas l’adhérence avant d’avoir essayé.
J’aime bien la position de la nouvelle supersport, j’ai de la place pour ranger mes 1m85 et me reculer bien en place. Les cale-pieds sont bien adhérents, que ce soit sur la pointe de pied ou calé sur la talonnette. La piste est bien humide, mais grâce à l’ABS et le HSTC je n’ai pas de mauvaise surprise. C’est de bonne augure pour la session suivante.
La pluie s’est arrêtée mais le vent ne s’est pas encore levé pour aider le soleil à sécher la piste. Terminé de suivre quelqu’un, on doit se séparer pour que les photos et vidéos soient plus faciles à prendre. Sept pilotes de niveaux tous différents sur une piste homologuée à quarante, on devrait y arriver. Je trouve doucement des repères sur cette piste exigeante. Bout de ligne droite je dois arriver à 250 environ, fond de 4, puis freine inévitablement trop car le premier droit est sur une crête et on ne voit pas le vibreur en sortie.
Virage 4, l’épingle à gauche avec un freinage en descente, celle avec une rivière à la corde. À l’extérieur de la piste, il y a le tracé alternatif utilisé en F1, avec un virage plus serré. J’en profite pour essayer de retarder mon freinage. Avec beaucoup de poids sur l’avant, on sent bien travailler l’anti levée de la roue arrière. Ça se balade sous les fesses et si on est pas bien équilibré sur ses appuis, la moto dérive facilement. Je freine avant la crête, je repousse après la crête, c’est trop tard. Je crois être trop vite pour lâcher le frein et entrer dans le virage, je suis parti dans le tracé alternatif.
Plus que 20 minutes, mais avec le soleil
Grâce à la couverture nuageuse qui se disperse, le soleil peut opérer sa magie et sèche généreusement la piste. Nous restons en pneus pluie car les rivières sont toujours là et parce que changer 14 roues prend un certain temps que nous n’avons pas. J’ai un peu de scrupules à rouler avec ces gommes car ça les endommage vite, mais pas trop le choix.
Je décide de changer le réglage de frein moteur pour mes derniers tours. Dans ma façon de piloter ça joue un rôle et j’y suis assez sensible. Jusqu’à présent, EBC était sur 3, le plus doux. D’une longue pression du bouton mode, je rentre dans le tableau de réglage, courte pression du même bouton et je passe de puissance à HSTC, puis anti-wheeling et EBC. Là, avec haut/bas on ajuste la valeur.
Comme il y a deux emplacements mémoire pour l’utilisateur, je fais USER1 avec EBC sur 1, USER2 avec EBC sur 2, le reste à l’identique. En roulant, une pression sur haut/bas permet de sauter de l’un à l’autre juste en fermant la poignée de gaz. Là, Honda a choisi la simplicité pour exploiter les aides que l’on a à disposition.
Sur 1, frein moteur non atténué, la différence est flagrante. Lors du freinage du virage 4, j’aime le ralentissement supplémentaire apporté. Je sens que je pourrais freiner plus tard et quand même passer ce virage convenablement. Pour le reste du tour, c’est trop de frein moteur. Je change en USER2 à la volée, d’un seul geste. Avec le niveau moyen de frein moteur, la moto conserve plus d’élan et j’essaye d’adapter mon pilotage. Au final, je trouvais plus satisfaisant avec l’EBC sur 3, la façon dont la CBR glisse entre le déclenchement et la corde fait plaisir.
L’expérience complète est positive, j’ai découvert le pilotage sur piste humide en toute confiance. Le package d’aides électroniques m’a, bien que ses actions soient discrètes, gardé sur mes roues. La position de pilotage est bonne, il n’y a que le revêtement de la selle un peu trop glissant qui me mette en difficulté. Posé sur le réservoir dans la ligne droite, j’aurais aimé une bulle quelques centimètres plus longue (comme sur une bavaroise qui a adopté une bulle longue et que j’ai bien aimé.)
La puissance des freins est tout à fait adaptée, j’ai eu un bon feeling du levier tout au long des sessions, même si ce sont des durites en plastique. Les suspensions et leur réglage pour l’occasion étaient à la hauteur, il ne me semble pas avoir tapé la fourche en butée et l’amortisseur n’a pas pompé. Lors des sorties de courbe la stabilité est rassurante, efficace. Le moteur prend joyeusement des tours grâce à la circonférence plus petite d’un pneu sur l’angle.
Les 121 chevaux de la 600 sont suffisant pour s’amuser sans se faire peur. Pour les exploiter, il faut être propre et régulier dans son pilotage. Sous peine de n’avoir qu’une fraction des 63 Nm pour se sortir d’une courbe. Mauvais rapport ou trajectoire douteuse et on sort en sous-régime.
La manipulation de la boîte est aussi doux que précis, j’ai toujours gardé le mode 1 pour le shifter, donc le plus doux. Peut-être qu’un pilote habitué à manipuler avec force son sélecteur préfèrera le mode 2 ou même 3.
Le prix de cette Honda CBR 600 RR est la dernière bonne surprise. Elle est affichée CHF 12’790.- et existe en deux couleurs : Grand-Prix Red et Matte Ballistic Black Metallic. Les revendeurs enregistrent déjà les premières commandes et les livraisons commenceront bientôt.
GALERIE
BILAN
ON A AIMÉ :
Le caractère d'une 600 intact
Pack d'aide électronique complet et facile à régler
Prix très compétitif
ON A MOINS AIMÉ :
Une selle d'origine glissante
Saute-vent un peu court
Impossible de retourner la sélection d'origine
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