Publié le: 15 mai 2024 par Patrick Schneuwly
Essai Triumph Rocket 3 Storm – Suprématie parmi les cruiser

Née il y a 20 ans pour séduire le marché américain, la Rocket 3 misait tout sur bigger is better (le plus gros sera le mieux) en disposant du plus gros moteur de production conçu pour une moto de série. Aujourd’hui, elle reste dans la place. Plus puissante, plus coupleuse et compatible avec les normes en vigueur. La Triumph Rocket 3 Storm distille des sensations intensément cruiser, capable de convaincre un conducteur de trail ou de roadster endurci.

ESSAI

Avant 2004, Triumph n’avait guère que la Speedmaster pour tenter d’intéresser le marché américain. Il leur faut un cruiser, quelque chose de sérieux face au gros V2 des concurrents. Ils savent qu’il sera difficile de tirer plus de leur bicylindre. Ils disposent d’un 3 cylindres transversal de 900 cm3 dans la Thunderbird, qu’ils vont commencer à gonfler. 1’200, puis 1’500 cm3 : trop peu. Ils tournent le moteur en longitudinal pour atteindre 1’800 cm3. Mais pour faire mieux, il faudrait un vilebrequin plus long. Chaque millimètre d’alésage d’un cylindre doit être multiplié par au moins 3 sur le vilo. C’est à ce moment qu’un mécanicien de Triumph décide de modifier sa machine pour chercher les 4 cm qui manquent au vilo et enfin atteindre les 2’300 cm3.

Le moteur est prêt. On finalise un premier dessin présenté à des clients potentiels. Les échos sont bons, mais ils demandent à avoir plus de détails. Ils fabriquent alors une maquette à taille réelle et la font livrer à grands frais aux États-Unis pour que des invités triés sur le volet puissent voir ce que sera cette fameuse Rocket 3. Les commandes pleuvent, c’est le début de l’histoire de ce modèle phare.

20 ans après, une louche supplémentaire de couple et de chevaux est proposée, issus de la cylindrée déjà grossie en 2019. 2’458 cm3 qui, avec la nouvelle cartographie, sortent 182 ch. et 225 Nm. La culasse et ce qui l’entoure, entièrement noir, étaient présents sur un modèle en édition limitée. Devant le plébiscite des clients, c’est finalement le choix qui sera fait pour la grande série en 2024.

Le design reste inchangé, alors que les couleurs sont différentes. Une multitude de pièces est anodisée en noir, ou alors, un métal noir est utilisé dès le départ. La peinture bicolore du réservoir permet de discerner les deux modèles R et GT. La première est plus roadster, pieds au niveau des cuisses, guidon droi,t un peu genre drag bar, le haut de son réservoir sera noir. La GT favorise le confort : il y a un dosseret pour le passager, le guidon vient plus en arrière pour avoir le dos plus droit, les repose-pieds sont en avant façon easy-rider. Ces versions là auront le bas du réservoir noir. Une description plus complète a été écrite à l’occasion de la présentation du modèle.

Une journée, deux motos

Etant donné qu’il y a deux déclinaisons du modèle et que Triumph nous a prévu un itinéraire généreux pour avoir au moins 100 km sur chacune, le hasard a voulu que mon essai commence sur la GT. J’appréhende d’avoir à quitter la ville juché sur une moto de 320 kg. En la relevant de la béquille, je prends une première mesure de ce qui m’attends. Je n’ai pas eu beaucoup d’opportunité de rouler sur des cruiser en easy rider, forcément quand je démarre je cherche le cale-pied avant de le trouver.

La circulation est dense et nous devons nous frayer un chemin vers des présélections vides et emprunter de longs boulevards avec des feux successifs. Nous ne roulons que depuis une petite demi-heure et déjà la chaleur dégagée par le moteur est arrivée à mon mollet droit. Ma main gauche s’emploie à tenir l’embrayage, bien qu’hydraulique, cette circulation saccadée est exigeante. À 20 km/h de moyenne, on peut rester en première mais la moto est vive. En deuxième, on est tout en bas du régime moteur, c’est un peu délicat. La Rocket est cependant maniable et en tenant compte de sa longueur on arrive à se frayer un chemin.

C’est presque un soulagement de trouver la voie rapide, de prendre un peu de vitesse et d’avoir plus d’espace Mais attention à ne pas relâcher son attention à l’heure du départ au travail. Le convoi de 6 Rocket en impose et lorsque nous repartons en trombe d’un péage, le reste de la circulation semble à l’arrêt. Le saute-vent de la GT fait bien son travail, j’ai le casque au calme mais pas non plus totalement à l’abri du vent. De quoi cruiser tranquillement sur les grands axes. Cette partie me permet aussi de tester le régulateur de vitesse, il m’a semblé n’être actif qu’à partir du 3e rapport. Le reste est on ne peut plus normal pour un régulateur.

L’itinéraire continue sur des nationales et de larges départementales, là où il y a toujours un nombre important de giratoires… Le dilemme entre la première et la seconde revient, tourner serré en 2e tape un peu. La température est plutôt basse, on active facilement le contrôle de traction lorsque l’on sort d’un giratoire, ce qui invite forcément à la prudence.

La route commence à serpenter dans la vallée, parfois accrochée à flanc de montagne ou taillée dans la roche. L’enchaînement fluide des virages est l’environnement rêvé pour une moto longue, très stable en courbe mais qui ne change pas rapidement d’angle. Je découvre la sensation particulière de contrôler un power cruiser avec les pieds en avant. Entre pression sur le cale-pied et mouvement du bassin, je suis étonné que la Rocket 3 Storm GT semble bien plus légère dans ces circonstances.

Toujours sur un filet de gaz, la souplesse du moteur permet d’adapter le rythme à chaque instant. La plupart du temps, je ne fais qu’utiliser le frein moteur en entrée de courbe, un peu de frein arrière si nécessaire. La pédale est idéalement placée et le force de freinage de l’étrier Brembo M4.32 est énorme pour un frein arrière. Ainsi la moto ne se relève pas et on continue à dessiner des courbes autant que la route le permette.

Le saut de la GT à la R

En milieu de journée, nous faisons logiquement nos séances photos en échangeant rapidement les deux variantes de la Rocket. Installé sur la R, je suis frappé par le changement de guidon qui est la différence la plus flagrante. La position des pieds m’a plus choquée dans l’autre sens. Ce guidon droit me tire les épaule plus en avant, les bras en extension. C’est plus à l’attaque de la route, moins confortable cependant. Dans les longs virages, j’opte plutôt pour du contre-guidage que pour des pressions sur les repose-pieds.

Sur la petite portion où nous avons fait les photos et vidéos en suivant une voiture, il y a un virage particulièrement lent. Si je passe avec prudence en GT, car je redoute la rencontre de mes pieds avec le sol, en R je passe avec bien plus de rythme. Je comprends un peu mieux le rôle des deux motos dans la gamme. Reste la seconde partie du trajet pour mieux apprécier cette version plus roadster.

Depuis le début de la journée, nous savions qu’à un moment donné, le ciel nous tomberait sur la tête. Alors que nous nous trouvons dans l’arrière pays varois, la température descend jusqu’à 5 petits degrés et il pleut fort. Pour fin avril, pas le temps rêvé sur la Côte d’Azur. L’essai doit continuer pour rejoindre notre point de départ et pouvoir vous parler de la R.

Sur les parties roulantes, l’absence de saute-vent se note rapidement. Plus de vent dans le casque diminue d’autant le confort de cette déclinaison roadster de la Rocket 3. En dynamique, dans les grandes courbes, la différence n’est pas énorme. Le comportement est sain, bien assis sur le large pneu arrière et maintenu par la suspension largement dimensionnée et bien réglée. Comme observé lors des photos, pour les virages serrés il me semble bien plus facile de passer vite avec cette position plus engagée sur la moto. Déjà sur le sec, le témoin de contrôle de traction s’allume facilement. Maintenant en mode pluie, le gros moteur est prostré dans une position de propulseur docile. Dans ces conditions, pas de sortie de courbe avec une dose généreuse de gaz.

En somme, la Rocket 3 Storm est surtout importante pour son jubilé. Sa mécanique a une nouvelle cartographie, mais le reste était déjà vu. Les carters et tubes d’échappement noirs proviennent de récentes éditions limitées. Mes collègues qui ont connu la première du nom sont unanimes : elle a perdu du caractère. Oui elle est plus puissante, mais elle est bien plus facile à dompter. Quiconque a déjà conduit une moto puissante peut la prendre en main.

Ma favorite est la GT puisqu’elle a su nourrir ma curiosité pour le cruising. Position détendue, capacités dynamiques divertissantes et enivrantes. Je ne pensais pas me reconnaître dans ce style de conduite, j’ai vite révisé mon jugement. J’aurais aimé continuer ma journée avec les conditions de la matinée et cette GT.

Les Triumph Rocket 3 Storm R et GT sont en magasin au prix respectif de CHF 27’895.- et CHF 28’695.-. La finition est bicolore, toutes nos motos d’essai sont Sapphire Black & Granite. Les deux autres options sont Carnival Red et Sapphire Black ou Satin Pacific Blue et matt Sapphire Black. Grâce aux accessoires, ont peut adapter des pièces de la R ou de la GT sur l’autre modèle mais aussi la personnaliser. Rendez-vous sur le configurateur pour voir toutes les possibilités.

GALERIE

BILAN

ON A AIMÉ :

Un moteur qui pousse sans fin, peu importe le régime

Un look sombre, mais très soigné

Un système de frein hors normes

ON A MOINS AIMÉ :

Des choix de couleurs ternes

2.5 L. ça consomme...

Si seulement on avait le soleil pour le test!

FICHE TECHNIQUE

Dimensions
Longueur
2'365 mm.
Largeur
920 mm.
Hauteur de selle
GT: 750 mm, R: 773 mm.
Empattement
1'677 mm.
Poids en ordre de marche
GT: 320 kg, R: 317 kg.
Capacité du réservoir
18 litres
Électronique
Régulateur de vitesse
Oui, de série
Aide au pilotage
Modes moteur, contrôle de traction, anti-wheeling
Freinage
ABS
sur l'angle
Frein avant
Double disque ø320 mm, étriers Brembo Stylema 4 pistons
Frein arrière
Simple disque ø300 mm, étrier Brembo M4.32 4 pistons
Moteur
Type
3 cylindres en ligne, DOHC, 4 soupapes par cylindre
Cylindrée
2'458 cm3
Refroidissement
liquide
Alimentation
Injection électronique
Partie cycle
Châssis
Cadre complet en aluminium, en partie coulé, en partie forgé
Suspension avant
Fourche inversée Showa ø47 mm, réglable en compression et en rebond
Course av.
120 mm.
Suspension arrière
Amortisseur Showa à cartouche séparée, réglable en compression, rebond et en précharge par molette déportée
Course ar.
107 mm.
Pneu avant
150/80 R17
Pneu arrière
240/50 R16
Performances
Puissance
182 ch.
Régime puissance max
7'000 tr/min.
Couple Max
225 Nm.
Régime couple max
4'000 tr/min.
Transmission
Boîte
6 vitesses
Shifter
Oui bidirectionnel, en accessoires
Embrayage
Multidisque à bain d'huile
Finale
Par cardan
Véhicule
Marque
Triumph
Modèle
Rocket 3 Storm
Année
2024
Catégorie
Routière
Compatible A2
Non
Couleur
Carnival Red, Satin Blue, Granite (avec toujours du Sapphire Black)
Prix
27'895 .- CHF
Complément du prix
Modèle GT: CHF 28'695.-
Lien site officiel
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