ESSAI
De mon temps, on bridait des R6 à 25kW (si si, je parle déjà comme un vieux) mais désormais c’est max 95 ch qu’on ramène à 47.5, alors il ne reste plus beaucoup de sportives accessibles. La liste se restreint à un lot de 300, 400, 500 voire 650 cm3 qui sauve les apparences mais qu’un motard entraîné qualifie vite de roadster habillé et doté d’un guidon bas. Qu’en est-il de la R7 ?
Certains ne pourront s’empêcher de penser à la YZF-R7 de 1999, une moto incroyable étant donné qu’ils ont mis des rétros et une plaque sur la moto qui a gagné le Bol d’Or. Cette moto d’homologation produite à 500 exemplaires permit à Yamaha de s’engager en Superbike et au 8h de Suzuka. Suspensions Öhlins, entrailles en titane, bras oscillant de GP500, simplement une bécane folle mais dont le nom aura désormais une histoire différente.
Depuis l’arrivée des MT sur le marché, la demande revenait souvent d’en faire aussi une sportive après la déclinaison rétro. Tout en bas la MT-125 a deux sœurs (R125 et XSR 125), la MT-03 a deux sœurs, tout en haut la MT-10 est arrivée après la patronne YZF-R1 (d’ailleurs elle arrive cette XSR 1000 ?). Au milieu, MT-07 et MT-09 se déclinent bien en XSR, mais point de R depuis qu’elles existent.
La facilité aurait été d’habiller la MT-07, un guidon bas et en avant pour servir une soupe tiède qui fait illusion. Ou on y met une fourche et des freins de R6, des commandes reculées à la bonne place et de véritables guidons bracelets indépendants l’un de l’autre. C’est ce que Yamaha a décidé de faire.
L’héritage visuel des autres sportives est flagrant, le croisement avec une MT aussi. Le feu bulbe un peu cyclope en plein centre de l’admission d’air forcée est un peu inattendu mais quelque part c’est une intégration rationnelle pour lui créer sa propre identité. Par souci d’économie, des éléments comme le pot ou le phare arrière proviennent du stock de pièces déjà employées ailleurs. Impossible donc de faire une pièce signature autrement qu’ainsi.
Par rapport au roadster, la fourche est une différence qui saute aux yeux parce qu’elle est est inversée, dorée et d’un diamètre plus important. L’angle de chasse diffère de 0.8° plus fermé et la répartition des masses s’inverse : 51% à l’avant contre 49% pour la MT-07. Au cœur du châssis tubulaire en acier est placé un renfort en aluminium pour améliorer la rigueur du châssis. Enfin, la moto peut recevoir un shifter en option, lequel ne fonctionnera qu’en montée. Comme la commande de gaz est encore mécanique, la fonction blipper est exclue. Le reste des entrailles ne change pas.
La forme de sportive a entraîné le changement de réservoir, qui perd un litre de contenance, 13 litres au total. Le tableau de bord est repris, c’est un LCD négatif dont la lisibilité est travaillée et qui affiche fièrement le logo R7 en mettant le contact. Le nombre d’informations affichées simultanément est cohérent, avec une jauge d’essence et un indicateur de rapport engagé en permanence. La selle aussi est reprise, la surface est étonnement grande pour une sportive. J’y reviendrai en parlant du circuit.
Sur la route, l’ergonomie de sportive de la R7 se reporte sur son comportement. Il est incisif et précis comme ses semblables. Sur l’itinéraire que j’emprunte, je ne suis pas serein pour engager franchement la moto. Je ne doute pas d’elle, c’est du goudron dont je doute. J’ai bien des Rosso IV Corsa encore plus sport que d’origine (Bridgestone S22) mais j’ai tout sauf envie d’être surpris et de coucher la moto.
Seulement la “petite” Yamaha n’a pas la faculté de vous mettre en orbite instantanément. Si on peut être vif en entrée, la sortie de courbe se fait de façon moins dynamique. Les 73.4 chevaux, ou 68 mesurés par GBK Motos, tirent tout ce qu’ils peuvent mais je ne dirais pas non à 20 de plus pour rester bridable en A2.
Avec un véritable PR Brembo comme maître-cylindre, le freinage malmène la fourche trop souple qui est par contre trop raide pour gommer des nids de poules des routes en mauvais état. La fourche étant réglable tout comme l’amortisseur monté horizontalement, il y a quelque chose à faire à ce niveau-là. Sortie du magasin, elle sera réglée pour de la polyvalence, prenant notamment en compte un éventuel passager.
Après la route, la piste
J’ai aussi eu la chance de prendre cette Yamaha R7 sur la piste du Circuit de Bresse, avec les Bridgestone cette fois. J’ai immédiatement trouvé mes marques au guidon, même avec la première en bas, une selle et des commandes d’origine. Le moteur bicylindre avec le calage de vilebrequin à 270° est expressif et agréable bas dans les tours.
Essorer la poignée fait joyeusement monter le moteur en régime, pendant que le couple nous pousse en avant jusqu’à ce qu’il s’étouffe passé 8’000 tr/min et on passe le rapport supérieur. L’embrayage est assisté et se manipule du bout des doigts, un petit geste suffit. En ligne droite, je suis agréablement surpris par la place laissée au pilote. Grâce à la longue selle, je peux me reculer très loin pour m’allonger de tout mon long sur le réservoir.
Quand il s’agit de taper dans les freins, le système a du répondant. Bien sûr la fourche subit le transfert de charge, mais le ressenti reste bon et est efficace. À mon rythme, il fallait plus de 20 minutes avant de sentir un affaiblissement du freinage. Avec un pilote plus lourd et plus rapide, le levier est devenu plus souple au bout d’un quart d’heure; la faute à des durites de frein caoutchouc souffrant de déformation.
Le caractère joueur de la R7 en fait une très bonne moto pour une première sur circuit ou même une moto d’entrainement. Légère et moins puissante, elle force à conserver son élan dans les courbes. Elle a pour avantage de changer facilement de cap, même sans préparation, le plaisir est au rendez-vous. Passer la chicane à ses commandes est un jeu, les épingles une formalité. Là où le bât blesse, c’est qu’avec juste 13 litres de réservoir, on arrive vite sur la réserve à force de cravacher.
La sortie de cette Yamaha R7 est réjouissante, même imparfaite elle vient occuper une place de choix sur le marché que les autres constructeurs mettront du temps à contrer. La marge sur chaque unité semble être réduite, à voir les composants utilisés et le prix de vente de CHF 9’890.-. Ils misent assurément sur le nombre pour en faire un succès.
Une chose me paraît cependant primordiale à installer : une protection de réservoir. La peinture est exposée et est à la merci des boutons et autres fermetures éclair de blouson/pantalon. Ce serait dommage d’esquinter la belle. Pour le reste, gardez votre argent pour la faire rouler plutôt que pour des accessoires futiles.
GALERIE
BILAN
ON A AIMÉ :
Look sérieux
Vraie position de sportive
Vrais composants de sportive
ON A MOINS AIMÉ :
Dommage pour le nom R7
Mettez des durites avia d'usine, c'est pas cher
Le réservoir exposé aux rayures proche de la selle