Photos de Markus Jahn, Jörg Künstle, Toni Börner
Publié le: 15 mars 2019 par Marc Esposito
Essai BMW S1000 RR « M » 2019 – RRévolution bavaroise

On s’imagine souvent le constructeur bavarois comme étant classique, voire « pépère » mais il n’en est rien ! Aujourd’hui, nous avons le privilège de poser notre rétine et notre séant sur ce qui n’est rien que moins que la sportive 1000 la plus puissante et la plus aboutie du marché.

ESSAI

Faisons un petit retour en arrière, en 2009 plus précisément, BMW révolutionnait le monde des sportives en présentant la première mouture de la S1000 RR première à atteindre la barre mythique des 200cv, bien que la fiche technique n’en mentionnait que 193 (ce qui était la puissance minimale possible). Depuis, tous les autres constructeurs ont dû se pencher, avec plus ou moins de succès, sur leur planche à dessin pour revoir leur motorisation afin de rivaliser avec cette allemande survitaminée.

Aujourd’hui, la S1000 RR version 2019 revendique 207cv, soit la plus grande puissance d’une sportive 1000. Certains diront que non, mais fan d’italienne, passez ce paragraphe qui va vous déplaire, car si l’on ramène les cylindrée à 999cc comme la BMW, l’Aprilia ne développe plus que 201cv et la Panigale V4 193,8… Et on sait que le constructeur bavarois ne triche pas sur les chiffres annoncés.

Stronger lighter faster sont les trois saintes mamelles de cette nouvelle mouture

Cette petite parenthèse étant faite, intéressons-nous de plus près à cette nouvelle teutonne. Tout d’abord, je ne parlerais surtout de la version « M », vu que c’est cette dernière que nous avons essayée sur le circuit d’Estoril, et ensuite parce que dans notre belle patrie du chocolat, c’est la version qui va le plus se vendre avec comme objectif 80% des ventes, et vous comprendrez vite pourquoi.

BMW S 1000 RR 2019

Il faut tout d’abord signaler que la cuvée 2019 de la sportive bavaroise est 100% nouvelle, tout a été revu. A commencer par la ligne, et bien qu’on l’identifie immédiatement comme une S1000 RR, la version 2019 laisse tomber l’asymétrie de la face avant., J’ai beaucoup aimé cette face avant très agressive qui se rapproche un peu plus des standard. Pour la petite histoire, l’asymétrie des anciens modèles venait tout simplement du fait que pour avoir un feu de croisement et un grand phare efficaces, il faillait des optiques différentes. Le but premier n’était donc pas l’identité mais bien l’efficacité. Aujourd’hui avec les phares LED cela n’est plus nécessaire. Par contre, on retrouve toujours cette asymétrie au niveau des flancs de carénage, le côté droit gardant ses ouïes de requins.

Le design est vraiment réussi et la moto est très compact. Bien que la marmite sous le moteur soit bien visible, le nouveau échappement amène une plus grande légèreté à la ligne, au passage il gagne 1,3 kilos. Le coloris racing BMW de la version « M » lui vont à ravir tout comme sa selle qui offre un excellent grip et un bon confort.

Haut-moteur BMW S 1000 RR 2019

Le moteur

Le quatre cylindres en ligne a été complètement revu et une chasse drastique au poids a été faite. L’embiellage a lui seul gagne 1,7 kilos des 4 kilos économisés sur le bloc ! Et, surtout, la distribution se voit dotée du système ShiftCam qui permet de faire varier l’admission pour avoir plus de couple à bas-régimes et en même temps faire baisser la consommation. Le système est assez simple, deux servo-moteurs font bouger une came sur l’arbre d’admission aux alentours de 9’000tr/mn afin de modifier la levée des soupapes. Les graphiques présentés sont assez éloquents avec un gain de 10Nm à 6’000tr/mn ! Du coup, le pilote de la BM dispose d’un couple de plus de 100Nm de 5’500tr/mn à 14’500tr/mn et le couple maxi culmine à 113Nm à 10’500tr/mn.

Quant à la puissance, comme indiqué plus haut, elle s’établit donc à 207cv à 13’500tr/mn avec également un gain appréciable à mi-régimes entre 5’000 et 7’000tr/mn. C’est assez admirable surtout sachant que ce nouveau moteur répond aux castratrices normes Euro5…

Le châssis

Ce dernier n’est pas en reste, et BMW a changé son fusil d’épaule. Jusque là, la S1000 RR était réputée très très rigide. Il suffisait pour s’en convaincre de regarder son cadre et son bras oscillant. Or, le nouveau châssis prend l’appellation de Flex-Fram, n’entendez pas par là qu’il est mou, mais plutôt que la rigidité du moteur y a été intégrée. Le bras oscillant inversé est tout neuf également et a permis de revoir l’emplacement de l’amortisseur arrière afin que ce dernier fonctionne verticalement, donc bien plus efficacement. La hauteur de l’axe du bras oscillant dans le châssis reprend les cotes qui étaient utilisées en WSBK sur l’ancien modèle.

Enfin, la version « M » se dote de magnifiques jantes en carbone, qui sont les premières du genre à être homologuées de série. Selon les techniciens de chez Bridgestone qui officiaient durant le roulage, elles sont très solides et ils n’ont eu aucun souci durant les nombreux changements de pneus, les collègues précédents n’ayant pas été gâtés par la météo.

châssis BMW S 1000 RR 2019

Dans la recherche de la chasse au poids, je me suis d’abord montré sceptique face aux demis-guidons qui sont partie intégrante du té supérieur de fourche. Mais après réflexion et discussion, ce système est extrêmement bien pensé, car en cas de chute, si vous devez changer un demi-guidon il vous suffira d’ôter deux vis sur la S1000 RR alors que sur les autres motos il faudra au mieux enlever le té supérieur ou la roue avant pour faire glisser le tube de fourche et ainsi changer le demi-guidon. Seul ombre au tableau, l’angle de ces dernier n’est pas réglable mais a été redéfini de façon plus ouverte.

Il est aussi intéressant de noter que BMW se soucie de l’environnement avec comme exemple les leviers et les protections qui se trouvent sur les cale-pieds qui sont fabriqués en carbone recyclé. C’est à la fois léger et écolo.

L’électronique

La belle bavaroise est dotée d’une électronique a faire pâlir une MotoGP, voire même une navette spatiale. Tout est paramétrable et une foule du puces savantes veillent au grain et vous accompagnent avec comme seuls buts l’efficacité et la sécurité.

La version standard est dotée des traditionnels modes Rain, Road, Dynamic et Race et la version « M » reçoit en sus les modes Race Pro 1 à 3 qui figurent en option sur le modèle de base. Un launch control ainsi qu’un pit limiter viennent avec les modes Race Pro. Les suspensions électroniques font également partie du lot sur la « M ».

Toute cette armada est paramétrable depuis les commodos et le large écran couleur de 6,5 pouces. On accède ainsi aisément par exemple au wheelie control qui est maintenant indépendant du contrôle de traction pour une meilleure efficacité.

Au final, ce sont 14,5 kilos qui auront été gagnés sur la S1000 RR « M » qui affiche un poids record de 193,5 kilos avec les pleins… respect ! Cette bavaroise ne va pas avoir de problème pour s’afficher en bikini cet été.

Bon c’estquandqu’onroule ?

Installé au guidon de l’allemande, je trouve facilement ma place. Ayant été le possesseur d’une version 2012, je suis bluffé par la compacité de cette version 2019. A l’époque je trouvais la BM grande, voire presque trop grande pour mon mètre septante-deux, tandis que là je me sens parfaitement à l’aise, la compacité me convient parfaitement. Tout tombe bien sous les mains et les pieds. Première, petit coup d’embrayage très facile et roulez vieillesse (là je parle pour moi et non de la jeunette qui se trouve sous mon noble séant).

BMW S 1000 RR 2019

La première session se fait en monte d’origine avec le mode Race Pro I sélectionné, donc « tranquillement » pour chauffer les pneus et le bonhomme ainsi que se remémorer le magnifique tracé d’Estoril.

Mais ce qui m’a immédiatement sauté à la gueule (pardon je n’ai pas trouvé d’autre expression), c’est la légèreté et la facilité de cette « M » ! Le passage d’un angle à l’autre est tellement aisé que lors de mon premier passage dans le pif-paf très serré d’Estoril, au moment de lancer la moto à droite après le gauche, j’ai bien cru qu’allais faire un gros paf par terre ! Aucun besoin d’exagérer le mouvement ou de trop appuyer sur les cale-pieds, la BM va toute seule où vous regarder !

Il est ainsi extrêmement aisé de rejoindre la corde, on pose le regard dessus et la moto y va. Le maître mot est : FA-CI-LI-TE ! Impressionnant… pour vous dire, à l’issue de cette première session mon casque était sec ! Je n’ai même pas transpiré.

Le DTC fait aussi parfaitement bien son travail, il est aisé de venir à bout des Bridgestone S21 R sous le couple important du moteur et la lumière du DTC clignote comme une jouvencelle lors de son premier bal. A la sortie des virages en deuxième, je me surprends même à amorcer quelques petites glisouilles en toute sécurité.

Et le moteur dans tout ça ? Hé bien c’est simple, il est impressionnant de disponibilité et d’efficacité (encore ce mot !). On peut se permettre de descendre à mi-régime pour bénéficier de reprises musclées. La poussée, déjà copieurs vers 7’8’000tr/mn ne fait que se renforcer alors que le barregraphe monte à l’assaut de la zone rouge. Le gain de poids sur l’embiellage est significatif tant le moteur prend ses tours sans aucune inertie, et ce même en cinquième et en sixième dans la ligne droite. Je cherche d’ailleurs toujours à récupérer mes yeux qui se sont retrouvés au fond de mes orbites tellement que ça pousse fort !

Vient le moment de passer en slicks et en mode RacePro II. Là les suspensions sont tout de suite plus fermes, plus adaptées à la carcasse des Battlax V02 R. A peine un demi effectué et j’ai l’impression d’être sur une moto de course alors que ma S1000 RR est strictement d’origine… Sur ce tracé il y a une cassure à droite un peu « gros-coeur » qui se passe à fond de quatre, et alors qu’avec les pneus d’origine et le mode Race Pro I je flirtais avec le vibreur en sortie, là je me retrouve à un bon mètre de ce dernier et à chaque passage je me dis : « vas-y tu peux en remettre une grosse louche ! »

Bon, faut quand lui trouver des défauts à cette moto ou bien ? En restant objectif, la seule critique que je donnerais concerne le freinage et le Race ABS. Ceux qui me connaissent savent que je déteste l’ABS sur piste, et malgré la qualité de celui de la BM, lorsque l’on prend les freins fort en bout de ligne droite, je trouve qu’on manque un tantinet de feeling dans le levier droit. Ce dernier devient un tout petit peu plus mou après quelques tours et je pense qu’en coupant ou en supprimant cet ABS on gagnerait en efficacité et en feeling.

A ce propos, les ingénieurs BMW ont pensé à quelque chose de tout bête : il n’est possible de couper l’ABS qu’en ôtant le support de plaque et le phare arrière. Toute moto roulant sur la route devant être dotée de l’ABS, une fois allégée de ces éléments sont terrain de jeu devient la piste où ce système n’est (heureusement…) pas obligatoire.

Le blipper est terriblement efficace, les rapports passent bien autant à la montée qu’à la descente, et le fait de se passer du levier gauche amène une grande stabilité à la moto et permet de se concentrer sur son pilotage. L’action de l’embrayage anti dribble permet aussi de rentrer les rapports et de se servir du freins moteur lors des freinage. A noter que ce frein moteur est aussi paramétrables via le tableau de bord. Enfin, il suffit de 38 secondes chrono en main pour passer d’une boîte normale à une boîte inversée.

Dans les derniers détails, j’ai grandement apprécié le grip impressionnant des cale-pieds, largement comparable à ce qu’on pourrait trouver en aftermarket racing. Une fois le poids posé sur le pied, plus rien ne vous fera bouger. Un « gadget » aura également été mis à contribution pendant ce roulage, il s’agit du capteur d’angle qui mémorise vos angles maxi gauche/droit, idéal pour se mesurer aux copains ! Perso j’aurais atteint 52 degrés à gauche et 55 à droite. Enfin, et pour ne rien gâcher, le son du quatre cylindres est magnifique, entendre passer les copains qui jouent pendant nos pauses est un régal.

BMW S 1000 RR 2019

Conclusion

En réfléchissant bien, je me dis qu’avec son tarif de CHF 23’820.- cette version « M » dotée de tout son attirail, et surtout de ses jantes carbone vaut diablement le coup et je comprends la volonté de BMW Suisse de miser sur 80 % de cette dernière.

Elle a tout pour plaire, elle est belle, légère, facile, efficace et surtout amène un ratio de prix/plaisir immense, surtout dans cette version « M » qui au final reste diablement belle et bien équipée. L’exercice le plus dur pour moi aura été de trouver des défauts à cette machine. Comme indiqué plus haut, le premier aura été pour l’ABS en conditions extrêmes sur piste, mais c’est un peu propre à l’ABS en général, et le second concernera le manque de coloris pour la version de base qui n’est disponible qu’en rouge. Mais bon perso je m’en fiche, la « M » me faisant de l’oeil… symétrique.

Pack « M » – CHF 4’070.-

  • Coloris exclusif Motorsport Light White/Racing Blue metallic/Racing red
  • modes de pilotage Pro
  • jantes M en carbone
  • batterie M lightweight
  • kit châssis M (réhaussement de l’arrière et pivot de bras oscillant)
  • suspensions DDC CHF 810.-

Pack Race – CHF 1’730.-

  • modes de pilotage Pro
  • batterie M Lightweight
  • jantes forgées M
  • kit châssis M

Pack Dynamique – CHF 1’270.-

  • contrôle dynamique de l’amortissement CCD
  • régulateur de vitesse
  • poignées chauffantes

GALERIE

BILAN

ON A AIMÉ :

Le moteur puissant et coupleux

Le châssis efficace

La légèreté

ON A MOINS AIMÉ :

L'ABS en usage extra intensif

Le manque de coloris en version de base