"On souhaite laisser une trace de nous dans le monde moto, résume Nicolas Sieczko, le patron de la concession Honda Motorush. Une trace labellisée made in Geneva, made by Rush". La concession genevoise, pour promouvoir son savoir-faire et faire parler de Genève dans le monde motard, a donc réalisé une préparation maison sur la base, plutôt sage, de l'Integra 700. Et quelle transformation ! En entrant dans la boutique, on le remarque immédiatement, le "Projet X". Si la finition impeccable et les pièces nobles séduisent, la réalisation se savoure spécialement dans le détail.
A commencer par le travail réalisé sur la partie avant, simplement renversant ! La fourche Öhlins, développée pour la CBR 1000 RR, saute aux yeux, équipée d'un système de freinage complet signé Beringer : étriers radiaux, disques, raccords rapides de durits (comme en endurance) et maîtres-cylindre anodisés. Le tout relié aux leviers par des durits aviation au parcours soigneusement étudié. On bave carrément, au point de pouvoir passer à côté de la pièce maîtresse de la réalisation : les tés de fourches taillés dans la masse. Comme on s'en aperçoit vite, le guidon n'a plus rien à voir avec celui de l'Integra de base. Et pour cause : l'équipe de Motorush a pensé et conçu ses propres tés de fourche !
"Il y a peu de personnes qui peuvent réaliser ça, se félicite Nicolas. En tout, ces tés de fourche représentent deux mois et demi de travail ! On a démonté l'Integra, pris les mesures nécessaires et on est passé à la modélisation". En consultant les plans réalisés par l'équipe, on se rend bien compte de l'ampleur du travail, dont la réalisation a été confiée à Tim Coutherez. Le résultat : deux tés de fourche et des pontets de guidon taillés dans la masse, avec un eloxage rouge pour la finition ! Résumé en un seul paragraphe et monté sur le scooter, ça paraît facile. Toutefois le travail titanesque abattu par l'équipe ne doit pas être sous-estimé. "En partant de rien, tu prends des risques, explique Nicolas. On a croisé les doigts en recevant les tés, parce qu'on n'avait pas le droit de s'être planté dans nos mesures..." Le résultat, heureusement, est parfait.
Dans le même souci du détail, on note le nouvel emplacement du neimann, dans le carénage avant. Bien dissimulé, il libère ainsi l'avant pour ne laisser que le bloc compteur, le guidon et la plaque "Limited Edition 1 of 5".
La partie arrière de l'Integra a elle aussi été l'objet de toutes les attentions. On note par exemple le fabuleux amortisseur arrière Öhlins TT-X36, dont la bonbonne flanque le côté gauche de l'Integra. Le collier de fixation de ladite bonbonne est une pièce maison. Tout comme les biellettes de renvoi dudit amortisseur. Même refrain pour le bras oscillant, passablement modifié et dont le "lissage" a nécessité cinq jours de travail. La durit de frein est remplacée et passe à l'intérieur du bras, avant de rejoindre l'étrier Beringer, fixé sur une patte également réalisée par Motorush. Le passage de roue est modifié et l'équipe a adapté un feu arrière de CBR 1000, qui souligne l'aspect sportif l'ensemble. Un travail long et minutieux pour alléger et affiner la poupe du scooter, qui n'a plus rien à voir avec celle d'origine.
Si l'on peut admirer le beau travail sur l'arrière, c'est aussi grâce à la suppression de l'échappement d'origine, bienvenue tant du point de vue esthétique qu'auditif. "On ne voulait pas d'un scooter qui fasse juste du bruit, explique Nicolas. Le but était de trouver une belle sonorité, quelque chose de plutôt noble. On n'a pas cessé de modifier les courbes de la ligne pour trouver le son qui convenait". Et le boss de démarrer l'engin, au milieu de la boutique, pour souligner son propos. Woah ! Dès le ralenti, on oublie carrément qu'il s'agit d'un petit twin 700cm3 ! En montant un peu les tours, on en prend plein les oreilles et on monterait bien en selle pour faire gronder la bête !
Pas de doute, l'engin doit être jouissif à rouler ! Mais ce n'est pas pour tout de suite, car l'équipe de Motorush a encore du pain sur la planche, comme l'explique Nicolas : "Je crois qu'on a soudé plus de soixante fils, pendant une journée entière. Il y a beaucoup de modifications électroniques. On n'a plus de module ABS, par exemple... on est donc en train de préparer et monter un boîtier pour que le double embrayage (DCT) reçoive les données nécessaires pour fonctionner. Il est notamment relié à l'ABS... On est en train de se casser la tête !"
Après quatre mois de travail non-stop, il reste donc quelques détails à peaufiner avant d'achever tout à fait le Projet X. Les cinq exemplaires prévus seront bien mis en vente, à un tarif qui aura refroidi plus d'un intéressé, selon l'équipe. "La marge bénéficiaire est ridicule, confie Nicolas. Je n'ai même pas compté la perte d'exploitation de l'employé dévolu chaque jour à la préparation. Mais ça amène une autre ambiance dans l'atelier et le magasin. Les gens en parlent, viennent voir le prototype. C'est très positif."