Bien installé sur la nouvelle selle avec le buste assez droit, j’actionne le démarreur. Départ sous un ciel (encore) dégagé. Et la balade commence fort ! Nous sommes à Cascais, à l’ouest de Lisbonne, et en un petit kilomètre, nous arrivons sur l’océan. Woaw ! Attaquer d’entrée de jeu par la N247, une route côtière de 7km qui serpente le long des côtes de l’Atlantique, cela en dit long sur le programme concocté par notre ouvreur. La moto est assez menue et donne une sensation de légèreté. Cette impression est très nettement renforcée par la finesse du réservoir et la rends facilement accessible. J’imaginais pour ce Street Scrambler un son bien rauque, assez sourd, avec quelques retours à la décélération. Et c’est exactement ça. Les montées en régime produisent une sonorité ronde et caverneuse qui participe grandement aux sensations de conduite. Le grondement presque ronronnant du bicylindre vertical est jouissif. Assez rugueux, il s’avère très agréable à l’utilisation, procurant de belles accélérations avec un côté presque rageur si l’on s’aventure jusqu’en zone rouge. Mais pas la peine d’aller jusque-là pour se faire plaisir. D’un part car au-delà de 5500 tr/min, les vibrations se font très présentes, et d’autres part car si les 65cv annoncés sont disponible à 7500 tr/min, 55 de ceux-ci sont déjà disponibles à 5750tr/min. De fait, on se retrouve à naviguer entre 3000 et 5000tr/min et le twin est vraiment plaisant. Celui-ci distille son couple assez bas dans les tours, à 3200tr/min, et rends le moteur vraiment vivant. Il colle parfaitement à la philosophie de la moto et la propulse d’un virage à l’autre avec juste ce qu’il faut de caractère. Si pour vous, les chiffres sont importants, ne vous arrêtez pas à ce simple « 65cv » et allez l’essayer. Je vous garantis que vous serez surpris.
Durant cet essai, nous avons eu de tout. Ded sublissimes routes sinueuses traversant des pinèdes aux grands axes rapides en passant par des centres-villes historiques pavés. Au niveau météo aussi, c’était varié. Nous avons alterné entre routes sèches, grand soleil, orages et pluies diluviennes. Vive le climat océanique ! De quoi être copieusement aspergé, des jambes au dos, par les projections. Même lorsqu’il ne pleut plus, le simple fait de rouler sur la chaussée humide vous repeindra de la tête au pieds. Entre un look délicieusement vintage et une bonne protection, il faut choisir !
L’avantage, c’est que j’ai pu jauger au mieux de la tenue de route du Scrambler. Ma première impression a été qu’elle bougeait en courbe. Rien de grave, mais la sensation que la roue arrière a légèrement glissé dans le virage. Au fil de la journée, cette impression a fait place à une certitude. Le comportement de la moto est très sain, et ce sont en fait les pneus qui manquent un peu de grip sur sol humide. Il faut dire que les petites routes empruntées n’étaient pas toujours en parfait état. Alors bien sûr, ce n’est pas une sportive ni même un roadster, et la partie-cycle n’est pas un modèle de rigueur. Mais je ne me suis jamais senti en danger, et les différentes assistances ont parfaitement su contribuer à ce sentiment de sécurité. L’embrayage antidribble est parfait d’onctuosité et permets de tomber deux rapports si nécessaire sans la moindre appréhension. Les suspensions travaillent de manière efficace, dans un confort tout à fait convenable, et seules les grosses compressions peuvent vraiment les prendre en défaut. Le freinage, quant à lui, est en adéquation avec le style de la moto. Désormais signé Brembo, le simple disque de 310mm est pincé par un étrier 4 pistions et ralentit la moto avec progressivité et mordant. Seul un léger sifflement s’est fait entendre lors des phases de freinage, probablement à mettre sur le compte d’un manque de rodage (ma machine avait 750 kilomètres au compteur).
La nouveauté principale, ce sont les deux modes moteurs (Rain et Road), ainsi qu’un 3ème (non présent sur la Street Twin) dédié au off-road et qui désactive l’ABS et l’antipatnage. Très franchement, je n’ai pas senti de différences au niveau de la puissance (les courbes sont légèrement différentes) mais il semblerait que le niveau d’intervention sur les assistances soit logiquement plus élevé en mode pluie. Je n’ai pas tenté de pousser l’antipatinage à la faute mais aucune frayeur n’a été à déplorer malgré une bonne centaine de kilomètres sur des routes détrempées. Le Street Scramber est une moto très saine, qui prendra plaisir à vous emmener aux 4 coins du pays et ne rechignera pas à vous faire prendre quelques chemins de traverse non goudronnés. Pas de piste au programme de cet essai, je me suis donc aventuré au retour en contrebas de cette fameuse route côtière, afin de m’amuser un peu. Et là, je pèse mes mots, car la moto est vraiment fun sur ce type de terrain. L’avant se place facilement, le grip des pneus est tout à fait correct, et même si vous n’êtes pas un habitué du hors-piste et que vous laissez l’ABS et l’antipatinage travailler à votre place, vous vous en sortirez sans le moindre problème ! Seul bémol, en position debout, la double sortie d’échappement proéminente gêne la jambe droite, l’obligeant à trop s’écarter du réservoir. Seule solution, fléchir les genoux vers l’avant, mais la position devient alors bien plus fatigante. D’ailleurs, en parlant de l’échappement, je n’ai pas trouvé qu’il chauffait démesurément. Bien sûr, cela reste pondérer car les températures étaient de l’ordre de 15° en ce mois de novembre, mais en tous les cas, on lui pardonne d’avance les éventuels désagréments que cela pourrait représenter, tant ce double silencieux en position haute fait partie intégrante de son identité, signature visuelle par excellence des scramblers de la marque de Hinckley.
Au rayon des reproches, j’ai simplement été déçu de l’accueil réservé par la nouvelle selle. Bien que plus épaisse, elle m’a rapidement tanné le cuir de l’arrière-train, par ailleurs plutôt épais. Mais c’est vraiment histoire de lui trouver un défaut car le caractère joueur du scrambler amène bien du plaisir.
Au final, j’ai découvert une moto pétillante, hyper adaptée au quotidien, bien entendu parfaite pour les débutants, du fait de sa faible hauteur de selle et de ses assistances bienveillantes, mais aussi et surtout pour vous emmener du point A au point B avec une énorme dose de plaisir. Et si possible avec le maximum de détours. Le slogan “Triumph, for the ride” n’aura jamais aussi bien porté son nom. Quelque soit la destination, vous aurez le sourire aux lèvres en arrivant.
Prix 12'140.- CHF (+ 360.- CHF pour la peinture bicolore)
Disponibilité mi-janvier 2019
Le kit Urban Tracker :