Bien que la position de conduite ait légèrement changé, cela n'enlève rien au ressenti du train avant ; au contraire, il semblerait que nous ayons encore gagné en maniabilité. La Tuono se faufile avec une aisance déconcertante.
On se hâte de rejoindre les petites routes, vierges de trafic et revêtues d'un asphalte accrocheur. La Tuono est à son aise. On retrouve le sourire des premières accélérations. Les virages s'enchaînent un à un. La belle Italienne virevolte avec vigueur. Son train avant d'une précision chirurgicale emmène la moto là où l'on regarde. On peut ainsi se concentrer pleinement sur son pilotage. A chaque sortie de virage, à grands coups de gaz, on est catapulté par le puissant V4. Par chance, le contrôle de traction assure la motricité à tout moment de la balade qui prend des tournures dignes d'une course du Darg Dog. Sur le commodo de gauche, il est possible de modifier le niveau d'intervention du contrôle de traction, par une impulsion sur l'une des deux gâchettes, "plus" ou "moins" ; pas forcément d'une utilité capitale sur route ouverte, mais cruciale sur circuit. La balade énergique se poursuit, couteau entre les dents et agrippé au guidon. Les paysages défilent à vive allure, le compteur de vitesse l'attestant. Et quand il s'agit de piler sur les freins, l'ensemble Brembo assure la prestation avec brio, mais surtout puissamment et de manière dosable. La fourche Sachs encaisse la brusque décélération sans broncher, conférant à la moto une grande stabilité.
On profite de cette balade pour jouer avec les différents modes de conduite. Les différences sont flagrantes entre les modes Track et Road, les deux extrêmes. En Track, le pilote fait corps avec la machine, la réponse de la poignée des gaz étant immédiate et le moteur affichant une disponibilité sans égal à tous les régimes. Quant au mode Road, la cartographie privilégie la douceur, sans prétériter l'explosivité du V4. Le mode sport, lui, fait dans l'entre-deux et se montre le plus adapté à une conduite dynamique sur route ouverte.
A haute vitesse, sur autoroute et sur circuit, la protection offerte par le saute-vent en continuité de la tête de fourche est juste suffisante. Si le supplice devait durer, on se réfugiera le buste collé au réservoir et les fesses bien en arrière de la selle. L'autoroute n'est décidément pas le terrain de jeu des roadsters, même si la coupe aérodynamique de leur tête de fourche semble offrir un soupçon de protection.
S'il y avait une chose à reprocher à cette charmante Italienne, c'est son appétit vorace ! Elle bouffe de la gomme (arrière) et fait du pompiste son meilleur ami. Evidemment, on ne fait pas d'omelette sans casser des oeufs, dit l'adage populaire. Les cent septante-cinq pur-sangs réclament du fourrage et le pneu arrière large de 190mm doit bien digérer le couple généreux disponible dès les plus bas régimes.
La Tuono (en français : tonnerre) porte bien son nom : aussi rapide que l'éclair, aussi bruyante que le tonnerre. Elle est une arme de guerre, sur route comme sur circuit. Facile à rouler, on se sent vite à l'aise. Diablement efficace, on se surprend à distancer sans peine tous nos poursuivants. On ne la mettra pas entre toutes les mains, mais on la conseillera à tout prix à celui qui veut des sensations et des performances pures... et brutes ! L'Aprilia Tuono V4 1100 RR s'impose à nouveau comme une référence parmi les roadsters bodybuildés du marché.